2) La divine musique de l’escadron des anges

Dans Ailes de lumière cependant, un passage peut évoquer dans une certaine mesure la différence qui sépare l’image de Franz et sa présence au monde, de celles de Feliciano :

‘On aime les anges, on rêve aux anges pour dépasser ce qu’il y a d’imparfait, d’étriqué, de pauvre dans la condition humaine. Jusqu’à la fin de l’époque classique, pendant tout le Moyen Âge et la Renaissance, ce dépassement se faisait par la fuite. Les peintres, les sculpteurs épuraient le corps et le visage humains pour exprimer, de la créature déchue, une figure céleste.
Ailes, p. 12.’

En suivant ce rappel historique, Franz, ange issu d’une « entreprise de sublimation transhumaine », semble bien appartenir à la classe des « anges de l’ancien temps qui volaient dans un ciel immaculé », et s’opposer à Feliciano dont les traits évoquent l’angélisme baroque qui intéresse ici l’auteur. Mais les outils et les possibilités du romancier ne sont pas ceux du sculpteur et l’on est tenté de dire que Franz est un ange classique doué d’une ambiguïté supplémentaire relevant du dialogue amoureux qu’il entretient avec Friedrich : il est doté d’un corps dont il semble oublier ou ignorer la réalité, une enveloppe charnelle qu’il offre aux désirs de son compagnon sans se donner lui-même, préservant ainsi son « immunité ». D’un angélisme baroque au contraire est Feliciano, qui, pour sa part, trouve son exacte description dans cette iconographie, et dont la courbe du destin correspond à ce que Dominique Fernandez nomme « le projet baroque », « bien plus dangereux et excitant », qui consiste à :

‘Non plus fuir ce qu’il y a d’humain dans l’homme pour atteindre au dépassement de la condition humaine, mais au contraire assumer à fond l’humain et en faire la matière même de l’angélique [...]. On surmonterait l’état profane, on chercherait la délivrance sans rien renier de la nature de l’homme. [...]
L’ange qui ne renie pas son corps, l’ange qui ne veut pas être angélisé, l’ange qui veut aussi faire la bête, l’ange sexué et complet des baroques a besoin de la pierre, du marbre, du stuc ou du bois. Il prétend être, non plus seulement contemplé à distance, mais touché, caressé, palpé, désiré.
Ailes, pp. 12-3.’

Aux matériaux du sculpteur, il faut encore ajouter l’imagination et les mots de l’écrivain qui réinvente l’ange baroque aussi bien que l’ange classique, lui donne la parole, lui rend la vie avec les moyens de la création, qui jouent sur des effets non moins érotiques ou sensibles. Toutefois, après ces précisions qui semblaient indispensables, il faut noter les modèles littéraires qui ont aussi retenu l’attention de Dominique Fernandez : il en est fait dans le même livre un rapide rappel 128 qui permet de mesurer sa propre originalité quant à l’exploitation romanesque du sujet, quant à sa volonté de la rendre musicale.

Cette audace, nous la retrouvons d’ailleurs dans la dispute qui oppose Raf et Michele au début du Voyageur enchanté 129 et qui rappelle justement la rivalité complémentaire entre les anges classiques et les anges baroques :

‘Raf, devant l’ange de gauche, celui de Nicolo dell’Arca. — La musique est féminine. Regardez ces cheveux , ces mains, cette bouche, cette douceur, cet air éthéré. L’ange de la musique est une femme !
Michele, devant l’ange de droite, celui de Michel-Ange. — Non ! La musique est un combat viril, un effort vers la beauté qui demande courage et obstination, une énergie créatrice tendue sans répit vers son but. C’est ainsi que Michel-Ange l’a incarnée, dans ce lutteur aux boucles drues, au corps trapu, aux membres d’athlète. Il ne faut nulle mollesse dans la musique, mon cher Raf !
Voyageur, p. 101.’

Ici encore l’opposition sert à introduire l’ambiguïté et la nécessité du rêve androgynique. Reconnaître l’ange dans la musique, c’est donc reconnaître la délicieuse part de rêve qu’elle nous offre, rêve qui permet d’oublier que nous n’appartenons qu’à un seul sexe. D’ailleurs cette essence séraphique de la musique se manifeste chez le compositeur lui-même, comme le fait remarquer Enrico Beyle à Friedrich lors d’une première et amusante rencontre à Vienne : « Mozart, un altro angelo ! » (p. 138). L’italien permet ici aux personnages d’exprimer des sentiments d’une façon moins pudique et plus directe, mais, l’ambiguïté levée, cette rencontre annonce les interprétations que Friedrich donne de La Flûte enchantée et réintroduit le motif de l’ange dont on découvre peu à peu les différentes facettes et les très nombreuses résonances.

Dominique Fernandez, dans son oeuvre romanesque, par l’intermédiaire de ces deux anges, n’a pas répété une même image, ni exploité un motif qui le fascine sans lui donner un développement, sans offrir une direction nouvelle et différente, sans se lancer un nouveau défi. Non seulement, il est passé de l’ange baroque « de la race de ceux qui plaisaient aux habitants de Sodome » à l’ange plus « classique » mais non moins simple, mais il a su leur donner un moyen de séduction et un don supplémentaires qui jusque-là n’avaient pas été exploités par les artistes. D’autre part, il s’affranchit aussi de ses célèbres prédécesseurs en ne jouant pas sur le déguisement ou sur l’apparence efféminée d’un homme ou masculine d’une femme, ni sur le prénom, il suggère l’angélisme par l’essence même de ses deux personnages, par la qualité de leur existence. Que la musique apporte ici une part de mystère, de rêve et de plaisir, cela semble incontestable, mais quels autres motifs peuvent ainsi pousser l’auteur à changer en musiciens des anges, à leur donner, en plus de leur séduction naturelle une énigme supplémentaire, à les entraîner dans des expériences mystiques ? Assurément, ce n’est pas seulement la simple et pourtant profonde admiration qu’il éprouve pour Giacomo Serpotta et ses inoffensifs putti musiciens :

‘À Palerme, je pensais à de la meringue. Ici [à Agrigente], le fils du forçat a dû battre de la pâte d’amande pour en tirer ces stucs capiteux. Dans l’abside, au-dessus de l’autel, une grande composition bouillonne de rayons, d’enfants et d’anges, l’un de ceux-ci tenant entre ses jambes un violoncelle dont il caresse les cordes avec son archet. Pâtisserie, sculpture et musique : la triple alliance encore une fois célébrée.
Gorgone, p. 290.’

Nous retrouvons ici la fusion des trois plaisirs, qui, une fois encore se dérobent aux mots et à l’explication, saisissables seulement par la comparaison ou par les rapprochements analogiques, liés à la subjectivité des sensations. Le plaisir suscité par cette sculpture baroque reste donc sans explication, sans interprétation, comme si l’état d’enfance des protagonistes influençait l’écrivain : que dire de plus devant la musique, pourquoi ajouter des mots pour expliquer la gourmandise, quand le spectacle entier est donné, vivant, jubilatoire, fête sans fin pour le regard ? Dominique Fernandez et Giacomo Serpotta nous invitent donc à savoir redevenir enfant, à profiter de notre plaisir et à nous taire. L’ange et l’enfant ne sont pas tant ici des messagers que des guides silencieux qui se contentent de montrer comment atteindre la volupté sans disserter sur la volupté.

‘Nulle église ne nous a paru plus confortable, plus élégante que celle Rottenbuch. [...] De chaque côté du choeur, de très jolis putti se démènent pour organiser un concert : qui se s’époumone dans une trompette plus longue que lui, qui se trémousse à la mandoline, qui tape sur un tambour à tour de ses bras menus, qui déploie un parchemin et s’apprête à lancer une trille. Au milieu de ce petit monde qui folâtre et rit aux éclats, se dresse la figure mélancolique de David. Il promène ses doigts effilés sur les cordes de sa harpe. Mais il sait bien, lui, que ce n’est qu’une feinte, et que son instrument restera muet. Ah ! comme on comprend sa tristesse ! Comme on se désole que ces pierres, ces marbres, ces stucs ne puissent pas chanter, que le leur assemblage ne naisse pas la plus capiteuse des musiques !
Banquet, p. 162.’

David, seul homme de cette scène, par sa mélancolie, exprime le regret de l’auteur lui-même, sa tristesse est non seulement celle d’être exclu d’un concert qui, pour lui, demeure muet, mais aussi d’avoir irrémédiablement perdu cet état de l’enfance de la grâce et du jeu, et, au-delà, cette nature androgyne toujours profondément liée à la musique. Ainsi, dans chaque ange musicien semble se cacher Orphée, révélé seulement par le désir impuissant de l’homme chassé d’un paradis primordial : paradis non de la sagesse mais de l’imagination, des facéties, de la mise en scène d’un spectacle toujours renouvelé par les changements de la lumière. La distribution des rôles à ces acteurs d’âges différents souligne cette rupture. À l’homme adulte le chagrin et la harpe, aux enfants la gaieté et tous les instruments d’un orchestre. Est-ce aller trop loin que de supposer qu’ici l’admiration de l’auteur naît à partir de cette mise en scène de la rupture, soulignant l’impossible fusion entre l’innocente et joyeuse nature de la musique des enfants ailés et la résignation du héros biblique qui rappelle par son maintien tous les échecs subis pour tenter de retrouver l’état de plénitude des sphères platoniciennes ?

‘L’association de l’ange et de la musique n’est que trop évidente. Les anges chantent comme des oiseaux. Les accords s’envolent à tire-d’aile. Au théâtre San Carlo à Naples, alors que Renata Tebaldi venait d’achever le grand air de La Force du destin de Verdi ; j’ai entendu, pendant quelques secondes de silence qui suivirent l’ovation, un spectateur crier du poulailler : Sei un angelo. « Tu es un ange. » Nouvelle ovation. Pas de compliment plus grand à faire à une chanteuse, à une voix de soprano, que de la proclamer « angélique ». Non d’un gosier humain mais d’une gorge céleste jaillissent les accents qui tiennent une salle ensorcelée.
Ailes, p. 47.’

Regret de la perte du chant des castrats, regret de l’état précédant la Chute, mais la musique reste cependant dotée d’un pouvoir particulier, susceptible d’ensorceler un public, de faire rêver à cette nature angélique perdue. Les accents de la musique évoquent les anges de la statuaire, les anges baroques jouent aux musiciens : les rapports entre la musique et ces autres forces de séduction sont mis en valeur par le réseau de métaphores et de comparaisons tissé par l’auteur. D’autre part, le rêve réalisé dans le temps de l’éblouissement, de l’émerveillement suscités par une statue ou par les charmes de l’art vocal est à la fois un moyen d’espérer encore le rétablissement de la nature androgynique et de regretter qu’elle soit révolue :

‘Au-delà du cliché, songeons qu’il n’y a pas de meilleur chemin pour s’aventurer derrière les frontières assignées à la condition humaine qu’un air de musique. Par le va-et-vient en liberté des notes, par l’échelle des tons qui le hisse jusqu’au paradis, par l’infini du flux et du reflux sonore, l’homme nie ses limites. Aussi n’est-il pas étonnant que, pour rendre plus efficace l’intervention des anges en sa faveur, il les enrichisse de pouvoirs mélodiques.
Ailes, p. 47.’

Ange et musique, dans une sorte de compagnonnage efficace, sont donc des promesses de bonheur données à l’humanité. La qualité de cette association mystique étant d’ailleurs perçue comme naturelle, comme une expression originelle du paradis, puisque le chant des anges, comme celui d’une cantatrice parvenue au sommet de son art, atteint à la pureté et à la grâce du chant des « oiseaux ». Noblesse et beauté : le « gosier humain » se change en « gorge céleste » et le plaisir se transforme en extase. Une fois encore sont liés le religieux et le naturel, le mystique et le païen, la magie baroque affranchit dans la fusion morale et esthétique qu’elle opère, réunit les contraires et renvoie l’image d’une félicité absolue louée par la Bible ou par Ovide : « tout était dans tout ». Que ce soit l’expansion naturelle de l’ange ou un don qui lui est accordé pour rendre efficace une prière, les nombreux exemples d’anges musiciens que nous fournit Dominique Fernandez montrent combien le musicien peut se faire ange, et combien l’ange semble créé pour être musicien, capable d’exprimer tous les sentiments, de transmettre tous les degrés d’émotion, de la colère belliqueuse à l’amour, de la dévotion à la séduction.

Toutefois l’époque moderne, une fois encore, coupe les ailes de l’ange et renforce la nostalgie de l’auteur : « Si l’on cherche du côté de l’opéra, on trouvera très peu de personnages d’anges » (Ailes, p. 48). Et, ici, Dominique Fernandez rappelle son inconsolable regret quant à la perte des castrats, en déclarant qu’il est impossible de respecter « le véritable angélisme », c’est-à-dire la double nature, l’indistinct, dans la pratique musicale moderne. L’ange, lorsqu’il est adulte, ne mérite qu’exceptionnellement son nom ou semble destiné à le perdre après en avoir joui comme les enfants du King’s College :

‘Le type national d’ange en Grande-Bretagne, c’est le petit garçon soprano, de huit à douze ans, appelé treble. Le King’s College, en particulier, est un vivier d’anges vivants sans équivalents dans le monde [...]. Entendre le jeune Roy Goodman, immortalisé par le disque, dans le Miserere d’Allegri, c’est se sentir soulevé, c’est planer, c’est accéder au mystère des anges.
Ailes, p. 48.’

Cette idée, si elle réaffirme la nostalgie de l’opéra napolitain, nous propose aussi une voie d’explication de la disparition prématurée de Franz ou de Feliciano. Le romancier ne se devait-il pas de les faire disparaître brillamment (en plein vol, pourrait-on dire, si l’on ne craignait pas de pousser un peu trop loin la métaphore filée par l’auteur), tout en arrêtant leur vie à un moment propice, au sortir de l’adolescence et dans un moment physiologiquement indécis, par la castration ou la maladie ? Que serait un vieil ange, pourrait-il seulement exister, son essence ne tient-elle pas à sa capacité de séduction ? Mais, préférant conclure ce chapitre sur cette possibilité de bonheur plutôt que sur le constat un peu désespérant que nous pouvions lire plus haut : « Un matériau dur et compact est plus fidèle à l’esprit angélique que la musique réputée immatérielle. » (p. 48), Dominique Fernandez choisit le réconfort teinté d’une frustration dont il répète constamment les termes depuis Porporino : la perte des castrats dont il reste inconsolable. Maintenant, peut-on encore douter de la nature séraphique de Feliciano, n’avons-nous pas trouvé toutes les lignes de force qui le constituent, à partir de sa nature séraphique, et musicale, et baroque ?

Reste le cas de Franz. Le lecteur doit-il se contenter de le voir qualifié d’ange ou de « séraphin » par Friedrich ? Nous avons vu à quel point l’orgue était lié au divin et au spirituel dans un sens parfois inquiétant, mais dans L’Or des tropiques on découvre aussi une profonde parenté entre l’essence séraphique et l’orgue, à partir de l’ornementation d’un instrument et la description qu’en donne Dominique Fernandez :

‘Cinq anges magnifiques rehaussent le buffet. Deux sont accrochés aux tourelles de côté, dans une posture acrobatique ; deux autres lèvent avec emphase un bras, au sommet de l’édifice ; le dernier, debout sur la tourelle centrale, souffle dans une trompette, dont l’embouchure est bordée de huit fleurs d’or, pour autant qu’on arrive à distinguer les détails dans la pénombre qui dissimule l’instrument. [...]
La trompette de l’ange sur l’orgue de Mariana nous rappelle le goût des Brésiliens pour les instruments aux sons éclatants. À côté des violons, violes, violoncelles, contrebasses, flûtes et hautbois, chaque orchestre comptait des trompettes, des cors et des ophicléides. 
Or, pp. 370-1.’

Ici l’ange renseigne sur un goût local, une tradition : non seulement messager du ciel, informant les hommes et enrichissant leur rapport à la musique, il semble devenir lui-même indispensable à la musique ; cette image des cinq « anges magnifiques » accrochés à l’orgue met en valeur une fusion charnelle entre eux et l’instrument, ils naissent de l’instrument autant que la musique pour orgue est créée à partir de leur essence. C’est un rapport imprécis mais pourtant profond qui rappelle la fusion entre Franz et son instrument, où la musique est moins le chemin vers un paradis que la possibilité d’une extase donnée pour elle-même, un dialogue personnel à entretenir avec l’abîme dans un instant présent.

Enfin, dans le Banquet des anges, d’autres anges, d’autres créatures, qui comme Franz se fondent dans la nature par une sorte de dissolution dans les éléments, d’union mythique due à la volonté créatrice d’un artiste, nous rappellent, quoique muets, le fulgurant passage sur terre de Franz, cela étant souligné par le décor sylvestre qui les entoure, l’esprit de la scène évoquant le lien ténu entre l’harmonie cosmique et musicale. Le mystère, le recueillement, la nature et l’oeuvre dévastatrice du temps commandent le charme de la forêt de Bethléem en Bohême : les statues de Matthias Braun, comme Franz, ne peuvent être vraiment comprises, elles séduisent sans rendre la force de leurs charmes ni les raisons de leur création à la volonté de rationaliser leur création. Quel est leur rôle ? Que nous disent-elles ? Le récit de voyage s’achève une fois encore sur une question, l’analyse face au mystère séraphique, qui tient non pas du surnaturel mais de la nature elle-même reste impuissante, et rendant ses armes, laisse libre cours au rêve :

‘Une brume dorée se répand sous les arbres. Derrière les statues qu’elle domine de ses frondaisons compactes, la forêt s’élève en pente douce vers un plateau solitaire où les troncs semblent moins drus. Qui sait si, derrière les rangées de chênes, de sapins et de bouleaux, nous ne découvrirons pas le paradis mythologique que nos anges, tant de fois, nous ont promis dans leurs concerts ?
Banquet, p. 373. ’

Une fois encore, cependant, il nous faut avoir recours à une comparaison, à une image pour tenter d’approcher Franz. Son existence mystérieuse est non seulement liée à sa nature séraphique mais aussi à sa marginalité dans l’oeuvre, car rappelons-le, si Dominique Fernandez éprouve un plaisir roboratif devant les anges classiques, ceux-ci ne l’intéressent pas en premier lieu et, dans ses récits de voyage, il préfère s’abandonner au plaisir offert par l’art baroque plutôt que de s’abîmer dans une contemplation immobile de statues aux lignes éthérées et à la posture raide à la manière d’Henri devant les statues-colonnes de la cathédrale de Chartres, à la fin de L’Écorce des pierres (pp. 205-7). Ainsi, l’intérêt que représente Franz au plan romanesque paraît considérable puisque, ange classique et pur, il ajoute une nouvelle dimension à la population séraphique et représente un véritable défi esthétique pour l’auteur qui ne confie pas, cette fois, comme dans Porporino, le rôle de l’initiateur aux plaisirs et à la débauche à l’ange mais à un personnage secondaire : Julius. Intérêt dont le dernier retentissement touche l’évolution sensible et morale de la relation des deux amis, l’évolution de leur désir et de leur dialogue, puisque Friedrich ne s’est pas épris d’un jeune homme mais d’un ange musicien et désire donc une créature qui vit sans avoir conscience de son corps, sans envie ni désirs. Faut-il soupçonner dès maintenant dans la fin belle mais tragique de ces deux guides une manifestation des dangers de la musique ou doit-on placer à part Franz et Feliciano précisément en vertu de leur nature angélique ?

Notes
128.

Ailes, pp. 14-8.

129.

V. Supra p. 179.