1.1 Définition et types d’expérimentation

La complexité de l’expérimentation exige d’abord qu’elle soit définie (1.1.1). Il importe dans un second temps d’exposer la diversité des types d’expérimentation (1.1.2).

1.1.1 Définition de l’expérimentation

Dans les sciences de la nature, le recueil d’informations de base s’effectue à partir de la méthode expérimentale qui permet d’explorer ou de vérifier l’existence d’un lien de causalité entre phénomènes bien repérés. Le processus d’expérimentation exige deux conditions. D’une part, les phénomènes étudiés doivent être isolables de leur contexte. Autrement dit, l’expérimentateur doit être en mesure de fixer les variables d’environnement afin de neutraliser, le plus possible, le risque de multicausalité dû à l’intervention de facteurs externes.

D’autre part, les variables observées doivent être « manipulables » de l’extérieur, au sens où le chercheur peut modifier séparément les variables de commande de façon à pouvoir décomposer le cas échéant la causalité circulaire. De plus, l’expérimentation doit être reproductible dans d’autres cadres spatio-temporels où l’on repère les mêmes phénomènes examinés, ce qui permet de vérifier si l’on retrouve les mêmes relations de cause à effet. L’expérimentation s’avère parfois très délicate à réaliser du fait de contraintes techniques – difficulté de modifier et/ou de contrôler certaines variables – et de considérations éthiques – problème de moralité quant au traitement différencié des personnes.

Dans le schéma classique du raisonnement scientifique expérimental, il s’agit d’observer l’effet produit dans une situation donnée par la manipulation intentionnelle d’une variable par le chercheur. L’expérimentation est ainsi considérée par Claude Bernard125 comme une « observation provoquée ». Le chercheur doit, selon Claude Bernard, imaginer et réaliser les conditions matérielles de l’expérimentation.

L’hypothèse est validée lorsque l’effet observé correspond à l’effet prévu. Dans les sciences sociales, cette intervention du chercheur n’est pas sans difficulté, et ce pour plusieurs raisons (J.-L. Loubet Del Bayle, 1978). D’abord, l’expérimentation pose des « problèmes éthiques », car elle porte sur des phénomènes sociaux et par conséquent fait appel directement ou indirectement à l’être humain. Elle touche l’être humain dans sa personnalité tant physique, psychologique, intellectuelle que spirituelle.

Ensuite, l’expérimentation se heurte à des difficultés techniques de réalisation dues à la complexité des phénomènes sociaux. Une expérimentation rigoureuse requiert trois conditions. La première est que le chercheur retrouve dans la réalité une situation analogue ou identique à celle qu’il a observée ou qu’il puisse la reconstituer en laboratoire. La seconde est que l’expérimentateur puisse modifier de manière intentionnelle et précise une et une seule variable de cette situation.

La dernière condition est, pour le chercheur, de s’assurer que les effets constatés résultent uniquement de la modification de la seule variable manipulée et non d’autres variables non contrôlées.

Notes
125.

Auteur cité par J.-L. Loubet Del Bayle [1978]. Introduction aux méthodes des sciences sociales, Éditions Privat, Toulouse, 240 p.