3.2 Un faible recours aux institutions financières africaines

Près de la moitié des immigrés (47 %) possèdent un compte dans un établissement financier africain. Ces comptes ont souvent été ouverts par les immigrés avant de quitter leur pays. Ainsi, plusieurs de ces comptes enregistrent très peu d’opérations financières.

Une plus grande partie des immigrés n’ayant pas de compte dans un établissement financier africain (40 %) a jugé inutile d’en disposer. Certains immigrés affirment vouloir ouvrir un compte dans une institution financière africaine mais ne connaissent pas de filiales de banques maliennes et sénégalaises en France. Ils sont en revanche très peu nombreux à évoquer leur manque de confiance à l’égard des institutions financières africaines. Ce manque de confiance est certainement en rapport avec la récurrence des crises bancaires en Afrique (voir annexe 6).

Les immigrés disposent, à près de 80 %, d’un seul compte dans les institutions financières africaines ; ce qui correspond à la moyenne du nombre de comptes ouverts dans celles-ci. Ils sont cependant minoritaires à avoir en même temps deux comptes ou plus dans ces établissements financiers.

La Banque de l’Habitat du Sénégal (BHS), la Banque Internationale du Mali (BIM) et la Banque de développement du Mali (BDM) sont les banques qui gèrent le plus souvent les comptes bancaires des immigrés maliens et sénégalais. Plusieurs autres banques ont été citées mais avec des fréquences beaucoup moins importantes.

Contrairement aux raisons évoquées pour le choix d’une institution financière française, la crédibilité est, selon une grande majorité des détenteurs de comptes bancaires dans un établissement financier africain (16 %), le critère de choix le plus fréquent. Ici aussi, comme dans le cas des banques françaises, la proximité du domicile ou du lieu de travail (14 %) joue un rôle déterminant dans le choix d’une banque. Les choix de banque africaine faits au hasard (5 %) sont aussi importants que ceux qui reposent sur les facilités de transferts financiers.

Les migrants maliens et sénégalais détenteurs de compte dans un établissement financier africain ont tous ou presque un compte dans une institution financière établie en France. Cependant, les raisons qui les ont poussés à avoir un compte dans une institution financière en France sont indépendantes de celles qui les ont motivés à ouvrir un compte dans une banque africaine. Autrement dit, il n’y a aucun lien entre les raisons évoquées pour choisir une banque établie en France et celles évoquées pour choisir une institution financière du pays d’origine. Toutefois, chez les migrants la proximité est la principale raison qui détermine le choix d’un établissement financier.

La dépendance entre l’appartenance ethnique des immigrés et l’ouverture de compte dans une institution africaine n’est pas significative. Il n’existe pas de lien statistiquement significatif entre le type de compte ouvert dans une banque africaine et la raison du choix de cette institution africaine. Les raisons évoquées par les migrants maliens et sénégalais sont indépendantes du type de compte ouvert dans un établissement financier africain.

Les motivations avancées sont les mêmes qu’il s’agisse d’un compte d’épargne ou d’un compte chèque. Ainsi, globalement, les migrants n’ont ni un a priori favorable ni un a priori défavorable envers les banques africaines. Cependant, il y a, dans les banques africaines, cinq fois plus de comptes d’épargne que de comptes chèques ouverts par les migrants.

Les comptes ouverts par les immigrés maliens et sénégalais ont, pour plus de la moitié, moins de cinq ans d’existence. Plus du quart des comptes ont été ouverts il y a moins de cinq ans ; c’est la même proportion pour ceux dont la date d’ouverture se situe entre cinq et huit ans. La date moyenne d’ouverture d’un compte dans une institution financière africaine est de huit ans et demi.

Plus de huit comptes sur dix ouverts par les immigrés maliens et sénégalais dans les banques africaines sont des comptes d’épargne. Cette prédominance des comptes d’épargne sur les comptes chèques témoigne de l’intérêt accordé à l’épargne retour notamment en vue de financer un projet dans le pays d’origine.

Le lien entre le type de compte ouvert dans une banque africaine et l’utilisation prévue des fonds de ce compte est significatif. Les fonds déposés dans les comptes d’épargne vont servir le plus souvent à financer un projet futur de l’immigré. En revanche, les immigrés qui souhaitent avoir un accès facile aux services bancaires dans leur pays ont ouvert, dans leur majorité, un compte chèque.

Les comptes ouverts dans les banques africaines servent généralement de supports d’accumulation pour préparer le financement de projets dans le pays d’origine. En effet, plus de la moitié des immigrés maliens et sénégalais (47 %) affirment que l’argent mis dans leur compte servira à financer des projets au pays. Pour certains immigrés (29 %), ces comptes facilitent leurs opérations courantes au pays alors que pour d’autres, ils leur permettent de réaliser plusieurs types d’opérations financières, en particulier les transferts sous forme de mise à disposition de fonds au destinataire désigné.

Moins de la moitié des immigrés détenteurs de compte bancaire dans une institution financière africaine effectuent des versements réguliers dans leur compte. La majeure partie alimente leur compte de manière très irrégulière.

La fréquence moyenne des versements est mensuelle pour 88 % des détenteurs de comptes bancaires effectuant des versements réguliers. Le reste des déposants est également réparti entre ceux qui versent de l’argent tous les trimestres et ceux qui font des dépôts tous les semestres.

Le montant global moyen des versements effectués par les déposants réguliers s’élève à 583 francs. Dans deux cas sur trois, les immigrés versent sur leur compte une somme inférieure à 500 francs et dans 16 % des cas comprise entre 500 et 1 000 francs. Parmi les 16 % effectuant un versement d’un montant supérieur à 1 000 francs, un petit nombre d’immigrés (5 %) déposent régulièrement plus de 4 000 francs sur leur compte bancaire ouvert dans une institution africaine.

Il n’existe aucun lien significatif entre le montant moyen des versements ou dépôts dans un compte géré par une banque africaine et l’utilisation prévue de l’argent mis dans ce compte. Il n’empêche que les immigrés maliens et sénégalais qui désirent financer un projet dans leur pays d’origine déposent un montant moyen plus important que les immigrés qui ont d’autres objectifs, en particulier le fait d’effectuer facilement des opérations bancaires courantes dans le pays d’origine.