L’objectif essentiel de leur bref séjour est de faire des achats à Konni ou à Illéla. Une partie de ces individus arrive à Konni par ses propres moyens. Ces individus sont impossibles à appréhender avec les méthodes de recueil de données que nous avons utilisées ; cependant, au regard du faible taux de motorisation des ménages au Niger et surtout en milieu rural (où il est quasiment nul37, exception faite de charrettes à traction animale et de quelques vélos), on peut supposer cette part peu conséquente. Le reste des personnes, le plus grand nombre, arrive en transport en commun, essentiellement des taxis-brousse. Konni étant un carrefour des routes Est-Ouest, Nord et Sud, plusieurs lignes de transport (décrites dans le chapitre 3) s’y côtoient. Il nous a cependant été impossible de connaître le nombre de véhicules sur chaque ligne, les conducteurs ne pouvant - ou ne voulant - donner que des renseignements les concernant personnellement. Le problème de l’évaluation du nombre des opérateurs est aussi lié à la faible régulation de l’activité.
Sur les lignes qui relient exclusivement la ville à son arrière-pays immédiat, le mercredi, jour du marché de Konni, chaque véhicule (de 8 à 17 places) peut effectuer, à plein, 1 à 2 allers-retours. Le dimanche, jour de marché de Illéla, l’affluence est 2 à 3 fois plus forte, mais Konni n’est alors qu’un lieu de correspondances. Ces lignes ne sont en place que 2 jours par semaine et pendant la saison sèche. Il existe cependant pendant cette période et les jours de la semaine où l’offre est très faible, un service de transport par taxi-moto qui dessert les villages dans un rayon de 15 km. Pour ces lignes, la saison pleine se situe en octobre-novembre, après les récoltes, quand les paysans affluent vers Konni pour vendre leurs productions et acquérir - pour certains - des marchandises leur permettant d’entretenir un petit commerce pendant la saison sèche.
Les lignes nationales reliant Konni aux grandes villes drainent également les ’journaliers’ de l’arrière-pays moins immédiat, de même que ceux des autres villes qui se trouvent sur les itinéraires. La ligne Niamey-Konni concerne, parmi les ’journaliers’, essentiellement des personnes en correspondance qui s’arrêtent à Konni pour faire du change et prendre un autre véhicule. Ce sont des commerçants nigérians qui vont faire des affaires à Niamey, des commerçants maliens qui passent par le Niger pour aller au Nigéria, des personnes en exode qui reviennent de l’étranger ou d’autres villes du Niger au début de la saison des pluies. Ils s’arrêtent pour faire quelques achats avant de regagner leurs villages. Il y a enfin ceux qui vont ou viennent du Nord du pays en passant par Tahoua, et à l’Est, par Maradi.
La ligne Tahoua-Konni est au niveau national la plus fréquentée par les ’journaliers’. Les deux villes étant distantes de moins de 150 km, les habitants de Tahoua et des alentours n’hésitent pas à faire l’aller-retour dans la journée pour faire leurs courses à Konni ou à Illéla. Mais, il y a là aussi ceux pour lesquels Konni et Tahoua sont seulement une étape du voyage.
La ligne Maradi-Konni draine, quant à elle, comme nous l’avons vu plus haut, périodiquement les gens en exode, et plus régulièrement des commerçants des deux villes qui ont à faire dans l’une ou l’autre, et ceux qui ont des clients ou des fournisseurs à Sokoto. Il y a enfin, comme pour Tahoua, d’autres personnes pour lesquelles Konni et Maradi sont seulement une étape du voyage.
L’objectif principal du bref séjour d’une majorité de journaliers est donc de faire des achats à Konni et/ou à Illéla. La baisse de l’activité commerciale consécutive à la dévaluation du Fcfa en 1994 a atteint les principales lignes nationales avec plus ou moins d’intensité. Tous les chauffeurs se plaignent d’une chute de clientèle de l’ordre de 60 à 80%. Les temps d’attente pour remplir les véhicules sont beaucoup plus longs aujourd’hui (quelques heures, avec néanmoins une fréquence plus forte le dimanche) du fait de cette désertion et probablement aussi du fait que l’offre ne s’est pas recalibrée à cette nouvelle demande.
En dehors des lignes nationales, il y a la ligne internationale, Konni-Illéla, qui est de loin celle qui mobilise le plus de monde. Les jours ordinaires, un peu plus d’une vingtaine de véhicules sont au départ de cette ligne, mais ils sont jusqu’à une soixantaine le dimanche. On retrouve là les ’journaliers’ amenés à Konni par les lignes nationales, mais aussi internationales : les Nigériens qui vont à Sokoto ou plus loin, de même que les Nigérians qui viennent pour faire des achats à Konni, ou pour aller à Tahoua ou Niamey (selon les chauffeurs 7 à 8 passagers sur 10 n’habitent pas Konni). Dans la semaine, les véhicules, avec le système de tour de rôle en vigueur, peuvent attendre jusqu’à une demi-heure leur tour et arrivent à faire 5 allers-retours dans la journée. Le jour du marché, compte tenu de la très forte demande, le système de tour de rôle est remplacé par le chargement libre. Le délai d’attente est alors de 1 à 10 minutes pour environ 10 allers-retours dans la journée.
L’ensemble de ces lignes drainent donc vers la Région de Konni, ou à l’intérieur même de cette Région, des personnes de passage dans la ville pour une journée ou quelques heures, avec en général un objectif principalement économique. Elles amènent néanmoins aussi des individus qui viennent pour des motifs un peu moins exclusifs, et qui restent alors plus longtemps. Il s’agit des personnes reçues dans les ménages et qui restent au moins une nuit dans la ville ; nous avons pu les recenser dans les ménages enquêtés qui les hébergent lors de leur passage.
Niamey représente le lieu où le taux de motorisation des ménages est le plus fort (2 ménages sur 5 disposent d’un véhicule). Les autres centres urbains se situent loin derrière ; Konni a néanmoins un taux relativement élevé (un tiers des ménages), mais il s’agit principalement de véhicules deux-roues, notamment des vélos.