Le rôle des kabu-kabu est de transporter les usagers d’un point à un autre de la ville et de ses environs.
Dans la ville, ce mode est rendu populaire par deux principaux facteurs. En premier lieu, un prix raisonnable qui varie de 50 à 150 Fcfa, selon la distance à parcourir et la capacité à négocier de l’usager. En second lieu, en moto l’usager est assuré qu’il n’aura pas à finir son trajet à pied vu la capacité de ce mode à circuler même sur des voies peu praticables - il faut rappeler que Konni ne compte que deux routes bitumées et deux voies récemment pavées.
Ce sont ces deux qualités qui ont manqué aux quelques taxis collectifs qui ont tenté en 1989 de concurrencer les kabu-kabu. En effet, la faible accessibilité des quartiers en automobile ainsi qu’un tarif fixe à 100 Fcfa la course ont vite découragé les usagers et ce mode a disparu au bout de seulement deux mois, tandis que les kabu-kabu continuaient à se développer.
Au cours de notre enquête, 40% des individus de plus de 13 ans interrogés disent utiliser ce mode de transport au moins une fois par semaine. Parmi ceux-ci, 11% l’ont utilisé pour leurs déplacements de la veille. Sur 5,5 déplacements effectués par chacune de ces personnes, 1,7 soit presque le tiers, est réalisé en kabu-kabu. C’est un mode qui sert essentiellement à la vie professionnelle et plus de 60% des motifs évoqués sont liés au travail (aller au travail, revenir du travail, s’approvisionner dans le cadre d’une activité commerciale ou productive) contre 20% pour la sociabilité qui est le deuxième motif mis en avant.
En dehors de l’activité ou de l’inactivité des individus, un autre facteur entre en jeu en ce qui concerne l’usage du kabu-kabu : la position du quartier par rapport au centre. En effet, si 40% des personnes enquêtées déclarent faire usage de ce mode, ce pourcentage varie de 11% à 67% selon que le quartier est plus ou moins central. En moyenne, un tiers de la population des quartiers centraux dit avoir recours à ce mode au moins une fois par semaine, contre plus de la moitié dans ceux qui sont plus éloignés du centre-ville. Ainsi, une des conséquences directes et positives de l’introduction de ce mode est l’augmentation de l’accessibilité des quartiers, ce qui est un élément d’importance pour une ville qui vit de transactions se réalisant au coeur de la cité.
Le développement urbain des kabu-kabu ne s’est pas accompagné d’un abandon de leur circuit interurbain. En effet, les taxis-motos continuent à conduire les gens de l’autre côté de la frontière et ont dans le même temps conquis une partie du marché Konni/villages environnants, faisant dans ces deux cas concurrence aux taxis de brousse. Ils couvrent un rayon de 15 km autour de la ville et le tarif peut monter jusqu’à 500 Fcfa à mesure qu’on s’éloigne de la ville.
Si nous n’avons pas les données permettant d’évaluer le trafic entre Konni et ses environs, nous pouvons en revanche avoir une idée de ce qui se passe avec le Nigéria. En effet, les services de la Mairie ont institué une taxe quotidienne de 50 Fcfa pour chaque kabu-kabu, payable lors du premier passage de la journée à la frontière. La recette hebdomadaire de cette taxe est de 75 000 à 80 000 Fcfa. Ceci indique donc qu’il y a au minimum 200 véhicules qui transportent un passager au Nigéria au moins une fois dans la journée.
Enfin, les utilisateurs déclarés du kabu-kabu disent lui consacrer en moyenne 2 200 Fcfa par mois, toutes destinations confondues, ce qui représente 15% de leur revenu moyen qui est de 15 000 Fcfa.