4.1.1.1.1. CONTRAT DE REORIENTATION

Latifa ayant marqué une pause, je vais la relancer sur ce qui a motivé son "choix" de faire un contrat d'apprentissage : ‘<<Le redoublement c'était plutôt défavorable parce que j'avais pas un très bon niveau c'était plutôt vraiment faible et voilà quoi, c'est pour ça qu'on m'a conseillé de faire un contrat d'apprentissage, parce que redoubler ça servait à rien>>.’ Relancée à nouveau sur le "choix" du secteur du secrétariat, Latifa poursuit : ‘<<En troisième on m'a dit un BEP, lequel, bon j'préfère prendre secrétariat que vente, parce que j'avais pas le niveau aussi pour faire un BEP de sanitaire et social c'était trop dur pour moi alors j'ai pris secrétariat ...j'aurais aimé continuer quoi, pas aller en BEP du tout, moi j'aurais bien voulu être sage-femme, mais j'avais pas le niveau après j'ai préféré aller en BEP et maintenant j'aimerai continuer dans le secrétariat, j'préférerai>>’. Le parcours de Latifa s'inscrit dans une logique de reclassement. Réorientée en fin de troisième pour niveau insuffisant elle se trouve dans l'obligation de "choisir" entre le secteur de la vente et celui du secrétariat. Deux ans plus tard, ayant échoué son diplôme elle se trouve à nouveau dans l'obligation de "choisir" entre un redoublement qu'on ne lui conseille pas et un contrat d'apprentissage qui restera pour elle la seule option, puisque nous le verrons, ses demandes de redoublement seront toutes refusées pour niveau insuffisant.

Latifa s'est conformée à l'imposition qui lui a été faite de se réorienter contre sa volonté. Ce ne sera pas le cas de tous les jeunes que nous rencontrerons. Sylvain, dont nous ferons la connaissance ultérieurement, aura préféré reconstruire son parcours en dehors du cadre scolaire plutôt que d'accepter un déclassement scolaire. L'histoire familiale et la logique d'inscription sur le marché du travail de Latifa pourront en partie nous permettre de comprendre cette "acceptation".

Latifa n'envisage pas de se réorienter dans un autre secteur professionnel quand bien même les difficultés à poursuivre son parcours l'obligeraient à y consacrer plus de temps que prévu. Elle est prête à y passer le temps qu'il faudra mais elle ne compte pas abandonner son projet de qualification : ‘<<Moi j'aime pas changer à chaque fois, j'préfère continuer quoi, quitte à ce que je retape plusieurs fois ça m'dérange pas du tout, j'suis partie pour faire un contrat d'apprentissage j'vais pas changer pour aller travailler, j'ai même pas mon BEP j'peux pas aller travailler, non, déjà avoir mon BEP et puis après pouvoir aller en Bac Pro, mais j'vais pas travailler entre temps, j'vais pas tout stopper, j'préfère continuer dans l'école>>’. Comme elle, Paulo préférera s'obstiner dans la voie choisie plutôt que de se réorienter dans un autre secteur d'activité et de s'obliger ainsi à un nouveau parcours de formation fastidieux.