4.1.1.6.1. UN DIPLÔME

Le processus par lequel Latifa s'approprie la trajectoire scolaire légitime renvoie à l'inscription temporelle dans laquelle s'est construite sa socialisation scolaire. L'objectif est alors de ne pas "perdre de temps" quitte à "faire des années en plus". Cet étrange paradoxe prend sens à la lumière d'un horizon d'expériences qui vient justifier le paradigme dominant de l'orientation scolaire. L'orientation scolaire est un processus tant scolaire que social, soumis à une logique de la rentabilité, qui se doit pour cela d'être articulé à un "projet de formation" cohérent qui fonde la logique de déroulement du parcours scolaire. Une réorientation met donc en jeu la rentabilité du parcours appréciée dans les termes du duo temps-diplôme. L'idéal étant de parvenir à la certification dans les plus brefs délais. Mais lorsque ce couple idéal ne fonctionne plus, il faut alors choisir entre deux voies, le maintien de l'orientation "choisie" au risque d'un allongement du temps dédié à son aboutissement, ou une réorientation qui allongera nécessairement ce temps consacré, en permettant une qualification aboutie, ou au contraire, au risque de ne pas aboutir davantage. C'est ce que l'expérience d'une amie vient confirmer à Latifa, la confortant dans le "choix" qu'elle a fait de maintenir le cap de sa "réorientation" initiale.

Tout aussi intéressant est le fait même que Latifa oppose une "impensable" réorientation à la poursuite de son parcours pour penser l'issue probable de ce parcours. La sortie à cette impasse que constitue une recherche de contrat d'apprentissage infructueuse aurait pu être énoncée en termes de recherche d'emploi, ou d'inactivité. Mais ce qui construit ce parcours d'insertion professionnelle comme signifiant est l'obtention d'un diplôme, car Latifa a parfaitement intégré la nécessité de la qualification comme condition minima d'accès au marché du travail, et comme condition de réalisation de son parcours.