4.1.3.1.1. LE SECTEUR PRIVE

Les contrats en alternance s'avèrent en effet bien souvent une charge non négligeable pour les entreprises et ce d'autant plus que les "jeunes" sont plus âgés ; les salaires rétribués étant fixés en pourcentage du SMIC et en fonction de l'âge. Beaucoup d'entreprises préfèreront alors recruter des jeunes déjà qualifiés et expérimentés plutôt que de "prendre le temps" de former des jeunes à un coût non négligeable.

Le recrutement d'un salarié en contrat en alternance impose également, de par le rythme de l'alternance, une organisation du travail qui ne s'adapte pas forcément facilement avec les contraintes des entreprises et ce d'autant plus que les effectifs sont réduits, comme cela peut être le cas chez un artisan photographe.

Tous ces éléments contribuent à rendre très difficile la recherche de contrats en alternance, et d'autant plus dans un contexte où les entreprises réduisent leurs <<besoins>> en main d' oeuvre.

La catégorie de la temporalité se constitue comme catégorie déterminante pour expliquer les difficultés rencontrées par les jeunes pour s'insérer sur le marché du travail par le biais de ces contrats en alternance. "Précaires" parce que temporaires, ils sont également "problématiques" pour les entreprises parce que leur temporalité impose une gestion de la main d' oeuvre adaptée à un rythme qui n'est pas celui de l'entreprise.

Ayant essuyé quelques échecs, Nadine se réorientera vers un autre projet d'insertion professionnelle également suggéré par la conseillère de la Mission Locale, et visant directement une insertion dans l'emploi : <<Elle m'avait orientée aussi vers, enfin on avait parlé de choses et d'autres, et du service communication dans les grandes entreprises qui se font, parce que moi j'avais fait un peu de la photo donc, j'avais aussi des cours de communication, c'est pour ça que ça serait bien de voir dans les grandes entreprises, style Rhône-Poulenc, des grands services, bon ça aussi, des candidatures spontanées j'en ai fait à la pelle pendant pfou, pendant un an au moins et puis ben c'est vrai que c'est pas évident toujours pour les gens qui sortent des écoles>>. Non titulaire d'une qualification professionnelle validée - <<j'avais fait un peu de la photo donc, j'avais aussi des cours de communication>> - Nadine se lancera dans une recherche d'emploi qui, au bout de longs mois de démarches, se révèlera infructueuse.

Le parcours d'insertion professionnelle de Nadine se déconstruit et se reconstruit au fil d'expériences de démarches de recherche d'emploi qui lui révèlent peu à peu l'inadaptation de sa formation aux emplois qu'elle vise. Ce parcours d'insertion marqué par de continuelles bifurcations visant à accorder aspirations et possibles va marquer une pause avec l'entrée dans la fonction publique.

Après avoir tenté quelques années durant d'exercer un "métier-passion", Nadine se verra obligée de revoir ses projets à la lumière de compétences davantage monnayables sur le marché du travail : <<Après j'ai un peu désespéré, j'ai laissé tomber un peu le côté, euh, disons artistique entre guillemets, que j'avais pensé exercer, disons en tant que professionnelle, parce que j'ai vu que c'était pas très, vraiment possible, puis c'est vrai qu'après, j'me suis dit, après tout, en fait, vaut peut-être mieux garder ça comme une passion et puis ben, je suis sur autre chose, donc comme j'avais un peu une formation avant Bac G1, j'ai un peu cherché des emplois dans le secrétariat, ça pas été positif, enfin ça a pas été positif, c'est pareil, aussi j'avais pas vraiment d'expérience et donc après j'me suis dit, bon (rire), j'crois que je vais rentrer dans l'administration, donc j'ai passé des concours, et puis, au bout du deuxième et ben j'en ai réussi un>>. La fonction publique va se présenter à Nadine comme une alternative, par défaut, lui permettant à la fois d'occuper une activité professionnelle rémunérée et de conserver ses projets "artistiques", dans lesquels elle avait pensé se professionnaliser, comme activités non professionnelles.

Dès le début du processus de reconstruction de son parcours que constitue cet entretien, Nadine expose un système de valeurs associées au travail qui s'oppose très clairement à la passion. Le travail est implicitement une nécessité qu'il n'est même pas besoin de justifier, et face à laquelle l'activité-passion doit s'ajuster.