4.1.3.2.1. "L’ÉQUIVALENT-TRAVAIL"

La procédure de justification mise en oeuvre fait appel à l'insuffisance du travail fourni. La catégorie du travail, ou plutôt du manque de travail, se constitue donc comme catégorie justificative d'échecs scolaires répétés, et permet de donner sens à ces échecs, qui resteraient sans cela, comme ce fut le cas de l'échec au concours de l'AFPA, incompréhensibles.

Cette catégorie du "travail" qui s'est constituée socialement comme justificative de la réussite ou de l'échec scolaire tente, comme l'a analysé François DUBET, de faire tenir ensemble deux logiques contradictoires inhérentes au fonctionnement du système scolaire : une logique démocratique - tous les enfants sont égaux - et une logique méritocratique - les élèves ont des performances scolaires différentes. Mais lorsque cet "équivalent-travail" ne fonctionne plus, autrement dit lorsque l'élève travaille sans obtenir de résultats, cette logique justificative du travail perd son sens et laisse l'élève désemparé face à un échec scolaire qu'il ne peut plus justifier.

On comprend dès lors comment cette catégorie du "travail" peut se constituer comme catégorie justificative d'échecs, dès lors qu'il s'agirait, sinon, de construire d'autres catégories justificatives bien plus stigmatisantes, que ce soit en termes d'incapacités personnelles ou d'inégalités sociales. D'autant plus stigmatisantes qu'elles pèsent du poids d'un déterminisme sur lequel on ne peut agir, contrairement à la catégorie "travail" qui s'est socialement construite comme catégorie éminemment individuelle dont chacun peut prétendre à l'entière maîtrise, à la condition d'une "volonté" suffisante.

Nadine, comme l'ensemble des jeunes rencontrés, aura affronté des échecs scolaires qui lui auront imposé des réorientations dans des secteurs non désirés. Mais à la différence de la plupart, elle aura été confrontée à des réorientations scolaires durant le cycle terminal de son parcours. Elle aura pu en conséquence, pourvue du Baccalauréat, s'orienter à nouveau dans un secteur de son choix, comme ce fut le cas de Chantal et de Vincent.