4.2. LA "PRECARITE" AU MASCULIN

4.2.1. MAKRAM, OU LE REFUS DE L'ASSISTANCE

Makram, comme dix-huit des jeunes rencontrés sur les trente enquêtés, aura préféré me rencontrer à son domicile, ou du moins au domicile de ses parents. Je suis reçue dans une spacieuse maison, aux pieds des Minguettes de Vénissieux. Cadet d'une famille de quatre enfants, il a perdu son père quelques années auparavant.

Lors de l'entretien, Makram, 23 ans, attend d'être retenu dans un organisme de formation pour entamer une qualification en électrotechnique.

Il a pris contact avec la Mission Locale il y a environ deux ans, alors qu'il recherchait une formation qualifiante en électrotechnique : ‘<<J'étais venu pour une formation et puis ils m'ont envoyé, c'était pour un BEP électrotechnique, ils m'ont envoyé à l'IFRA et heu j'ai passé le concours à l'IFRA et en fin de compte j'ai pas été retenu, ...c'est bien sans être bien quoi, c'est-à-dire qu'on nous envoie dans un centre de formation mais heu y a pas une recherche avant (...) c'est, nos attentes un peu s'dépêcher quoi, c'est pas ciblé ce que veut faire la personne et dans quelle direction il veut aller (...) c'était à l'époque où y avait Madame Z>>’. Tout comme Christine, Makram va d'emblée contextualiser sa première rencontre avec la Mission Locale par l'évocation d'une période située dans un passé qui paraît bien antérieur : ‘<<C'était à l'époque de Madame Z...>>’, identifiant, de nouveau comme Christine, avec précision, la personne qu'il a rencontré. Alors même qu'il s'agit d'évoquer une histoire pensée par le chercheur comme "récente", relevant d'une mémoire sans cesse actualisée par le présent, l'énonciation mobilisée nous tire vers un passé, qui loin d'être oublié, ou brouillé par le passage du temps, évoque néanmoins un étirement du temps qui paraît disproportionné, <<c'était à l'époque de...>>.