4.2.1.2.2. L'EMBAUCHE

Makram s'étant interrompu, je le relance sur la façon dont il se représente l'avenir : ‘<<être embauché puis ben, gagner ma vie, qu'on ait un minimum quoi c'est tout, j'pense que c'est le boulot qui fait l'essentiel, après, tout se construit autour du travail quoi...moi j'aimerais bien être ou soit ambulancier pour commencer hein ça sera une rampe de départ et heu toucher à l'électrotech aussi pour être électricien en industrie ou pour être polyvalent c'est-à-dire que si heu au bout d'un moment j'en ai marre d'être ambulancier et ben que je puisse changer et voir autre chose, parce que c'est essentiel de changer parce que tout le temps faire la même chose ça devient lassant>>.’ Travailler renvoie à nouveau à une nécessité financière, indexée au type de contrat de travail. Le contrat de travail à durée indéterminée - <<être embauché>> - est l'objectif visé par Makram pour assurer la survie d'une entité qui n'est pas limitée à sa personne, un <<qu'on ait un minimum>> indéfini, qui renvoie à la famille présente ou future.

En outre, pour la première fois, il fait appel à des catégories de "métiers" pour signifier le type d'emploi ciblé - <<ambulancier...électricien en industrie>>. Mais curieusement, les "métiers" envisagés ne constituent pas un aboutissement, puisqu'ils seront potentiellement interchangeables. Alors que je m'attendais à ce que cette catégorie, le "métier", soit mobilisée pour référer à l'objectif d'une insertion professionnelle pensée dans une logique de stabilité, le "métier" est l'objet d'une appropriation temporaire, presque fugitive, dont il se défera dès qu'il s'en sera lassé. Comme Latifa, le "métier" est pensé dans une temporalité déterminée alors même que la symbolique sur laquelle s'est construite la catégorie de métier est marquée par la stabilité.