4.2.2.3.1. L’EXPERIENCE PROFESSIONNELLE

Si l'emploi d'été ne constitue qu'un "moment" éphémère dans la temporalité scolaire de Sylvain, le recrutement dans le cadre du contrat de qualification, pourtant appréhendé comme nous l'avons vu auparavant, comme seul support d'un projet de formation diplômante, devient expérience professionnelle significative du fait d'une inscription temporelle régulière, bien qu'alternée.

"Travailler" n'implique donc pas nécessairement "rentrer dans la vie active". Sylvain <<travaillait>> l'été dans le cadre <<d'emplois saisonniers>>, mais il n'en avait pas pour autant acquis le statut d'actif. Est en jeu ici un statut, celui d'actif, plus peut-être que celui de travailleur, qui s'acquiert non seulement par un contrat de travail, mais par la nature de celui-ci, quand bien même ce dernier n'est pas à durée indéterminée. Vingt-quatre mois de Contrat à Durée Déterminée pour la durée du Contrat de Qualification permet à Sylvain de se définir comme "actif", alors même que paradoxalement l'objectif n'est pas nécessairement le maintien de ce statut par l'embauche, mais l'obtention d'un diplôme.

Le système d'opposition sur lequel il construit son énonciation met ici au jour une conception du travail qui a pour enjeu un statut, celui d'actif. Alors même que dans les deux cas, les emplois d'été lorsqu'il était scolaire et le contrat de qualification en tant que salarié, s'inscrivent dans un parcours qui a pour objectif l'acquisition d'un diplôme, les uns sont renvoyés au rang d'expériences non professionnelles, et l'autre au rang d'expérience professionnelle doublée du statut d'actif. Dans un cas le statut dominant reste celui de scolaire, dans l'autre le contrat de qualification l'inscrit automatiquement en qualité de salarié, donc d'actif.

On voit dès lors comment Sylvain s'approprie de façon polysémique cette forme particulière d'emploi qu'est le contrat de qualification. Tout à la fois <<formation>>, <<boulot>> et <<expérience professionnelle>>, le contrat de qualification lui aura permis en outre d'accéder au statut privilégié "d'actif". à aucun moment Sylvain ne soulignera la précarité du statut du contrat de qualification, dont il a en outre été licencié, et qui surtout l'aura, pour cette raison même, empêché de poursuivre et terminer sa formation en Baccalauréat Professionnel. Sans doute son statut actuel d'actif stable, <<responsable de rayon>>, lui permet-il d'occulter les points négatifs de cette expérience d'actif précaire qui n'aura ni validé sa formation, ni été embauché.