4.2.2.6. RECHERCHE D'EMPLOI

Pour envisager de nouveau des démarches de recherche d'emploi, suite à un départ, volontaire ou non, Sylvain nous explique comment il se représente cette période de recherche, entre organisation et technique : ‘<<Mis à part le piston, mis à part ça, là déjà faut se renseigner, faut pas se jeter dans la gueule du loup, je veux dire faut pas prendre les pages jaunes et énumérer par ordre alphabétique, déjà faut voir beaucoup d'organismes même si ça sert à rien, voyez j'allais à l'ANPE, tous les matins, un matin sur trois, c'était vraiment des fois ça servait à rien mais rien que le fait d'y aller ça me remontait le moral, j'ai vu donc le dossier de l'Assintercom j'ai vu d'autres organismes que l'ANPE, une fois j'ai eu une réunion avec la Mission Locale de St Priest avec un chef d'entreprise, il nous a un peu aidé pour faire des CV, ça m'a apporté quoi, mentalement surtout, mais euh, niveau de la recherche non ça apporte pas, ça m'a stimulé quoi, le fait de lire le journal, voir une annonce rien que le fait de regarder ça encourage, et puis aussi j'avais gardé contact avec l'IFTIM, donc je téléphonais souvent à une dame qui avait des relations avec des entreprises...j'ai beaucoup de relations quand même oui c'est important ça montre qu'on n'est pas seul quand on est un tout petit chômeur c'est dur>>.’ La recherche d'emploi nécessite de mettre en oeuvre des capacités stratégiques où il apparaît pour Sylvain, comme pour Christine, Makram, Johan, Frédéric, Xavier A, Sami, et Cyril, plus efficace d'entretenir des relations que de se lancer dans des démarches de candidatures spontanées aveugles où il craint de se perdre. Les contacts avec les organismes publics ou parapublics, tels que l'ANPE ou la Mission Locale semblent s'inscrire davantage dans le registre du soutien moral, très apprécié, que dans celui de l'efficacité technique.

Il importe peu, ici, de déterminer ce qui serait "effectivement" le plus efficace pour un demandeur d'emploi dans ses démarches ; beaucoup plus important en revanche est la "croyance" en tel ou tel outil de celui ou celle qui va apporter sa confiance à une personne, un organisme. Car, là, réside peut-être l'efficacité d'une démarche, dans la croyance dont elle est investie, et qui constitue le ressort de cette efficacité. Efficacité symbolique de la croyance qui ne faudrait surtout pas réduire à une illusoire, car rassurante parce que plus rationnelle, efficacité technique.

Ainsi, la relation de confiance avec la Mission Locale apparaît-elle comme fragile du fait d'un champ de compétences identifié comme similaire à celui de l'ANPE, donc redondant : ‘<<Ce qui m'a déçu, c'est le quoi, le manque d'adresses, le manque d'annonces, quand Madame X tapait sur son Minitel, en fait c'est les mêmes annonces qu'à l'ANPE>>.’

Les services de la Mission Locale ne sont ainsi pas pensés comme devant se substituer à ceux de l'ANPE, ils doivent être "autres" et "mêmes" à la fois : des offres d'emploi, mais différentes. Mais ce que Sylvain retiendra de la Mission Locale, tout comme Nadine avant lui, c'est l'engagement professionnel : ‘<<J'ai été déçu de pas avoir trouvé d'entreprise, j'étais vraiment déçu...mais j'en veux pas, j'en veux pas à Madame X, au contraire c'est une femme qui, euh, excusez-moi, c'est une dame qui, on voit qu'elle a la volonté de vouloir aider les jeunes>>.’ Si la Mission Locale n'a pu directement aider Sylvain à trouver un emploi, ce n'est pas faute d'y avoir mis de la bonne volonté. Mais est-ce suffisant pour conquérir la confiance du public des demandeurs d'emploi ?

Ce qui ressort principalement de l'évocation de ses contacts avec la Mission Locale est que ces contacts se sont inscrits dans un ensemble de contacts, qui tous constituent des pôles relationnels mobilisables en cas de nécessité de recherche d'emploi. La Mission Locale constitue un partenaire institutionnel parmi d'autres, et vraisemblablement pas celui qui aura été perçu comme le plus efficace. Sylvain l'aura bien compris, les réseaux des dispositifs d'aide à l'emploi doivent se substituer aux réseaux relationnels familiaux lorsque ceux-ci se font défaillants, peu d'entre eux seront toutefois en mesure d'assumer ce rôle. Et comme beaucoup de jeunes qui attendent de la Mission Locale le "piston" que l'environnement familial ou amical n'est pas en mesure d'offrir, Sylvain sera déçu par un service d'aide à l'emploi qui ne fait que redoubler celui de l'ANPE, sans être davantage performant.