La frontière entre décoration et fonctionnalité n’est pas toujours évidente, et on peut considérer que le sablage n’est pas réellement un décor, pourtant, son usage démontre qu’il n’est pas uniquement fonctionnel.
Son application en surface avec l'engobe est une innovation du ier siècle apr. J.-C. ; toutefois, l’aspect qu’il donne au vase rappelle des productions antérieures1160 dont la surface granuleuse était due à la composition de la pâte saturée de dégraissant sableux rendu apparent par la rétractation de l’argile à la cuisson.
L’emploi de l’engobe sablé répond à un avantage fonctionnel : assurer, pour un vase destiné à contenir du liquide, une bonne adhérence entre la main et la paroi du vase. Il faut d’ailleurs noter que le sablage n’a pas été uniquement utilisé sur les céramiques à paroi fine, on le retrouve encore (hormis en usage d’abrasif) sur la lèvre de certains mortiers (Gilliam 238) ou même sur des amphores (London 555)2161 . D’une manière générale, tous les décors de l’atelier offrant un relief plus ou moins important, plus ou moins régulier, ont pu favoriser la préhension. Cependant, la présence de sable sur la totalité de la surface du vase n’est pas justifiée, et le revêtement sableux sur la paroi interne n’a pas d’intérêt si ce n’est pour reproduire plus fidèlement des productions qui présentaient cet aspect. La participation même de ce revêtement à l’apparence générale du vase est soulignée par des rainures qui fixent parfois les limites de sa répartition, et opposent plus clairement les différentes textures de surface.
Contrairement à la description du processus déterminé par F. Mayet (le vase encore frais était « plongé » dans du sable)3162 , le sablage est l’enrobage d’un engobe chargé de sable : il y a donc une surcharge de barbotine nécessaire à l’adhérence des grains. La granulométrie et la densité du sable sont variables, généralement le sable est assez fin et densément réparti contrairement aux productions de la Gaule du sud où le sable est souvent plus gros et sa répartition plus éparse.
Ce revêtement recouvre intégralement la plupart des bols à lèvres non modelées. Il est certainement en usage du début à la fin de la production. Les bols à lèvre en bandeau ne sont jamais lisses, le sablage est donc aussi systématique par défaut d’ornement à la barbotine. Sur ce type de vase le sablage peut aussi être considéré comme une absence de décor. Néanmoins, sur les bols à lèvre en bandeau mouluré, rarement ornés à la barbotine, le revêtement sableux est largement majoritaire. Il est encore courant sur les gobelets ovoïdes et évidemment sur les pots ovoïdes dont il recouvre la majorité des exemplaires.
1. Cette hypothèse est confirmée par l’existence de tessons de céramiques à paroi fine à pâte siliceuse mais recouverts d’un engobe de composition visiblement calcaire et chargé de sable. Ceux-ci, observés parmi le matériel de la fouille de St-Vincent, formeraient un chaînon manquant transitionnel entre les productions siliceuse et calcaire.
2. Symonds (R. P.), « Early romano-british fine wares », Rei Cretariæ Romanæ Fautorum, acta 35, 1997, p. 226. L’auteur anglais minimise le rôle fonctionnel du sablage sur les céramiques fines et invite à le considérer uniquement comme une alternative décorative.
3. Mayet (F.), Les céramiques à parois fines de la péninsule Ibérique, Paris, 1975, p. 6. Outre le fait que cette application serait insuffisante pour fixer le sable, sur la plupart des vases, qu’il soit d’origine lyonnaise ou ibérique, le rajout d’engobe est bien visible et c’est dans cette épaisseur qu’apparaissent les traces de pinceau.