3.3.5 Systèmes décoratifs et chronologie ornementale

L’examen des associations entre les formes et le décor sur des séries de vases a fait apparaître quelques usages caractéristiques du protocole de la production (fig. 63-64). L’observation de ces phénomènes avait été totalement négligée, toute organisation de la production autre qu’aléatoire ou faiblement raisonnée ne pouvait être envisagée.

Les formes les plus précoces de l’atelier (types 1, 2.1, 2.3, 2.4, 3) sont restées dépourvues de toute décoration en relief. Leur production était peut-être déjà interrompue avant la généralisation de l’usage de l’argile plastique et de la barbotine pour l’ornement. L’introduction de ces procédés décoratifs accompagnait un renouvellement typologique. C’est ce que semble démontrer les liens d’exclusivité mis au jour entre ces innovations décoratives et le type 4.1. Il faut alors supposer que l’association qui unit une forme et un ensemble de possibilités décoratives appliquées par l’atelier de la Butte respecte l’adoption et l’imitation d’un modèle existant plutôt que la mise en place progressive d’une suite d’innovations.

Après un premier répertoire limité à des traitements de surface et la reprise de quelques décors à la barbotine courants sur les productions padanes dès l’époque augustéenne, se développe à partir des années 40 apr. J.-C. un véritable système décoratif. Les procédés mis en oeuvre sont multiples : argile plastique, barbotine, poinçons et les nombreux motifs employés, combinés, offrent un large choix de possibilités. S’il est intimement lié avec le bol de type 4.1, la datation de ce programme ornemental est indépendante de la typologie, les décors se répandent sur d’autres types préexistants.

Dans la seconde moitié du ier siècle, l’introduction dans le répertoire typologique de l’atelier de gobelets inspirés par les productions ibériques entraîne l’adoption partielle de nouvelles formules décoratives (rangées de mamelons, guillochis). Celles-ci restèrent dépendantes des formes auxquelles elles étaient associées. Le choix sélectif opéré parmi les modèles largement diffusés des ateliers de Bétique est resté limité. Parallèlement, un service lisse dépourvu de toute décoration ou de traitement de surface voit le jour.

La disparition des décors élaborés dans la première moitié du ier siècle laisse place à l’époque flavienne à quelques décors caractéristiques. Les vases à dépressions, le guillochage, les compositions d’épingles (avec ou sans chaînette) succèdent aux écailles et aux appliques.

Dans sa dernière phase d’activité, réduite à l’approvisionnement local, la décoration en relief disparaît totalement, seuls des vases lisses ou sablés sont encore commercialisés.

L’étude stratigraphique de la production de l’atelier a permis d’établir une première chronologie de l’ornementation, décor par décor (fig. 63-64). La fiabilité des datations proposées dépend de l’abondance des motifs (certains sont uniques) et de la qualité des contextes de découvertes. La sériation des formes avec cette chronologie ornementale créée une nouvelle ordination de la typologie (fig. 65).