3.5. Élements de chronologie.

3.5.1. Nature et limites des éléments chronologiques

Replacer la production de l’atelier de la Butte dans la chronologie du ier siècle apr. J.-C., et scinder la typologie sur une échelle temporelle, lorsque c’est possible, est un exercice à la fois tributaire des données et des méthodes. Les camps augustéens du limes rhénan ont fourni aux céramologues des jalons chronologiques absolus et précis, mais leur occupation prolongée au cours du ier siècle apr. J.-C. nous privent de repères aussi déterminants. Le matériel découvert sur le site de la Butte apporte peu d’éléments satisfaisants sur ce plan. C’est donc sur l’étude des contextes stratigraphiques lyonnais et régionaux que repose essentiellement les conclusions chronologiques sur la production de l’atelier.

Outre les problèmes propres à la céramologie du ier siècle apr. J.-C. sur lesquels nous reviendrons, la stratigraphie lyonnaise est établie sur des bases liée à l’histoire de l’archéologie locale. En fait, la fouille de la rue des Farges, première grande intervention réalisée en stratigraphie dans l’agglomération lyonnaise, demeure encore aujourd’hui, par la quantité et le traitement du matériel la référence pour les données céramologiques, et pour la méthode. L’examen des études réalisées sur le matériel de la fouille du Verbe Incarné montre clairement que la chronologie du site, qui a été fouillé immédiatement après la rue des Farges, a été construite à partir des phénomènes observés rue des Farges. Ainsi, l’ensemble de la céramique à paroi fine de la Butte trouvée au Verbe Incarné, est devenu, après avoir été datée par la sigillée de la rue des Farges, élément datant du second site. Certes, le raisonnement est propre à la discipline archéologique, mais en demeurant linéaire il entérine un schéma qui faute de contradiction ou d’élément nouveau explicite, forme une règle d’application. Pourtant, l’établissement de modèles typochronologiques, confortable à partir d’un site unique, apparaît souvent fragilisé quand l’étude multiplie les sources.

Les modèles élaborés rue des Farges ne sont pas remis en cause, ils forment toujours un corpus fiable. Néanmoins, le traitement rapide du matériel de la plupart des fouilles lyonnaises réalisées depuis dans le cadre de sauvetages urgents ne permet pas d’apporter la contribution nécessaire à la validation, à l’enrichissement ou à l’amélioration de ces modèles.

La chronologie de la céramique fine du ier siècle apr. J.-C. repose principalement sur la production de la sigillée qui était largement dominée par l’atelier de la Graufesenque à partir du règne de Tibère. Et finalement, sur la brève période considérée, les trois derniers quarts du ier siècle apr. J.-C. peu de d’indices permettent de resserrer les datations de contextes. Les deux principaux terminus sont établis autour de 40 apr. J.-C. (date traditionnelle de l’apparition de la forme Ritterling 12, parfois discutée pour être remontée autour de 30 apr. J.-C.) et de 60 apr. J.-C. (apparition de la forme Dragendorff 37 et du service décoré de feuilles d’eau). La période de production de la sigillée marbrée (40-70 J.-C.) ou l’évolution typologique de quelques formes apportent des éléments complémentaires. La céramique à paroi fine de la Butte est donc le plus souvent datée du milieu du ier siècle apr. J.-C., des empereurs Claude/Néron ou par la fourchette 40-70 apr. J.-C. Entre la fin du ier siècle apr. J.-C. et le début du iie siècle apr. J.-C., la chronologie pose encore plus de problème, et les ensembles stratigraphiques sont couramment datés sur plus de quarante ans. Nous disposons donc de peu de paliers pour construire une chronologie précise, et des ensembles décalés en chronologie comme ceux de la boutique de Vienne ou de la rue Chambonnet, sont précieux.