3.6.1. Géographie de la diffusion

La première carte de diffusion des céramiques de l’atelier de la Butte a été dressé à partir du mobilier recensé sur le limes rhénan ou en Angleterre par K. Greene1¹⁹² . Jusqu’à la publication de la rue des Farges à Lyon2¹⁹³ ce matériel composait l’unique typologie de l’atelier. La plupart des camps militaires occupés durant le ier siècle de notre ère qui bordaient l’Empire au nord-est y figurent. Peu de fouilles de sites civils avaient encore eu lieu en milieu urbain. Toutefois, l’examen des sites anglais avait été si exhaustif qu’il déséquilibre encore la représentation de la géographie des exportations des productions lyonnaises3¹⁹⁴ . Si un travail d’inventaire équivalent était mené sur les sites suisses il mettrait en évidence une densité sans doute aussi forte.

Après sa mise à jour, cette carte de diffusion (fig. 90) illustre toujours clairement la destination des céramiques à paroi fine vers le nord-est, jusqu’en Grande-Bretagne où sa présence n’est pas simplement anecdotique puisque la céramique de la Butte y est la plus abondante des importations de paroi fine devant les productions espagnoles et rhénanes. L’ensemble du limes germanique était desservi par la Saône puis le Rhin ou la Moselle. La remontée du haut Rhône a d’autre part permis l’approvisionnement des sites bordiers du lac Léman, la totalité de la Suisse apparaît comme un débouché privilégié. Vers l’est, le cours du Danube a conduit directement la production lyonnaise à Carnuntum et - plus indirectement - vers le Magdalensberg.

La superposition des aires d’exportations des productions augustéennes de la Muette ou de Loyasse avec celle de l’atelier de la Butte montre les mêmes concentrations de découvertes. Malgré l’interruption de la production de tradition augustéenne et la modification totale de la typologie et de sa technologie, il semble que l’atelier de la Butte ait repris l’intégralité du marché pour lequel avait été installées à Lyon les succursales italiques. Une diffusion aussi marquée en Grande-Bretagne n’a pas été mise en évidence pour les productions de l’atelier de la Muette, et les amphores lyonnaises, contemporaine de l’atelier de la Butte, sont plus rares outre manche1¹⁹⁵ .

Quelques vases à paroi fine de la Butte sont signalés dans le nord de la France et sur les sites régionaux du Massif Central. Vers le sud, la ville de Vienne a livré un matériel lyonnais assez abondant, par contre, la diffusion en basse vallée du Rhône a été très aléatoire, les productions espagnoles y sont mieux représentées.

Les ambitions commerciales de l’atelier de la Butte reflètent assez bien ce que l’on sait du commerce lyonnais. Le flux principal était orienté vers le nord-est avec quelques retombées sur le nord de la France, l’ensemble des sites suisses était desservi, les relations restaient privilégiées avec Vienne toute proche au sud, tandis que les contacts étaient de moins en moins importants vers le nord-ouest ou le sud en fonction de l’éloignement, enfin une absence presque totale de relation avec le sud-ouest. C’est une carte qu’on ne saurait limiter au commerce de la céramique. En effet, la diffusion des amphores lyonnaises qui recoupe cette géographie est un commerce de denrée. Néanmoins, pour la céramique, Lyon est devenu à l’époque augustéenne avec ses succursales un relais du commerce italique, dirigé vers les Germanies et la Belgique. Un commerce qui a approvisionné les sites militaires limitrophes de l’Empire, mais pas exclusivement puisque de nombreux sites d’habitats (notamment en Suisse) ont consommé à la fois des denrées alimentaires et de la céramique venues de Lyon.