1.2.1 Pour l’étude de l’emploi des formulations concernant la « vie physique »

La question de la détermination d’un ensemble d’écrits, qui ne sont pas textes officiels, à étudier
Un ensemble de textes officiels concernant la « vie physique » a pu être circonscrit. Sa définition en extension a permis un inventaire exhaustif de cas d’utilisation de l’expression « vie physique ». Leur analyse a conduit à s’interroger quant à la manière d’envisager la question de la « vie physique » en EPS. Elle n’autorise pas, en revanche, à trancher en la matière. Il n’est alors guère possible que de s’intéresser à la question de la « vie physique » au plan des écrits qui ne sont pas textes officiels. Cela appelle la détermination des publications à examiner. Elles doivent présenter deux caractéristiques. Il s’agit qu’elles aient trait à l’EPS et comportent l’expression « vie physique » puisque l’élucidation à opérer concerne la « vie physique » en EPS. Il faut, en outre, que les écrits retenus aient été rédigés après la mise en place de l’arrêté du 24 mars 1993 : l’étude envisagée a en effet lieu d’être au regard de textes officiels parmi lesquels il est le premier à être entré en application. C’est en fonction de ces attributs qu’il y a à déterminer un ensemble de publications. La question se pose alors de la spécification de celles-ci, ce qui conduit à s’interroger quant à la possibilité de définir in extenso l’ensemble auxquels elles appartiennent.

Des écrits nombreux et de natures diverses sont à considérer
Nombre d’écrits relatifs à l’EPS et à la « vie physique », rédigés après la parution de l’arrêté du 24 mars 1993, ne sont pas textes officiels. Il en est, parmi ceux-ci, qui traitent de la pratique, en EPS, d’une activité physique. Les actes de l’université d’été organisée par l’AEEPS en 1993 comportent, par exemple, plusieurs contributions de ce type143. Certaines productions, qui ont rapport à la « vie physique », ont une portée plus générale, en matière d’EPS. Il en est ainsi d’un écrit de G. Bonnefoy, qui a trait au « savoir gérer sa vie physique » en EPS144. On peut mentionner d’autres cas encore : on a, par exemple, un article de J. Le Boulch, publié en 1997, qui concerne la « Place de l’éducation physique en éducation par le mouvement »145. La « vie physique » intéresse en outre des auteurs exerçant des fonctions diverses, en rapport avec l’EPS. Certains se présentent ou sont présentés au lecteur en tant que représentants de l’institution : il en est ainsi, notamment, de C. Pineau et A. Hébrard, auteurs d’un article qui a paru en 1993. Les signatures indiquent en effet : « Le Doyen de l’inspection générale de l’Education nationale EPS : Claude Pineau. Le président du groupe technique disciplinaire EPS : Alain Hébrard »146. C. Rouziès, qui a produit un document publié en 1998147, indique en outre en celui-ci qu’il est « Inspecteur général de l’Education nationale »... D’autres auteurs apparaissent au lecteur comme chercheurs : par exemple, D. Delignières, dans une publication de 1993148 ou G. Cogérino, dans un écrit publié en 1999149. Il y en a encore d’autres qui signent en tant qu’enseignants d’EPS : J.-P. Dugal, dans un article édité en 1993150, ou M. Jarthon, dans une parution de 1997151, le font...

La mise en place d’un échantillon d’écrits
Il apparaît que l’étude envisagée porte sur un ensemble de publications qu’il est difficile de saisir en extension. Elle concerne, en outre, des productions de natures diverses, provenant de sources variées, émanant de points de vue différents. Il convient alors d’élaborer un échantillon d’écrits, ce qui peut être fait à partir des parutions de la Revue EPS ou des Dossiers EPS. On peut considérer que la Revue EPS fournit une image relativement bonne des conceptions qui ont cours chez les intervenants en EPS. P. Arnaud défend ce point de vue au travers de plusieurs publications152. Certains écrits des Dossiers EPS, qui ont trait à l’EPS, contribuent à la diffusion de ces conceptions. La « vie physique », par ailleurs, intéresse des personnes exerçant en France des professions diverses, qui ont rapport à l’EPS. Or, la Revue EPS ou les Dossiers EPS offrent une tribune à des auteurs provenant d’horizons relativement variés. La fréquence de parution de ces supports est aussi à considérer. Elle permet en effet la diffusion d’un ensemble d’écrits relatifs à une question et une période données consistant. Ainsi la Revue EPS et les Dossiers EPS offrent-ils l’occasion de créer un échantillon autorisant l’étude envisagée. On peut l’élaborer à partir des écrits concernant de façon explicite et prioritaire l’EPS en son ensemble. La question de la « vie physique » ne se réduit pas à une réflexion relative à une activité physique donnée ; elle est de nature à concerner l’EPS dans sa globalité. Ces indications permettent de disposer d’un ensemble de productions dont on peut extraire l’échantillon. Chaque écrit retenu doit avoir été rédigé une fois l’arrêté du 24 mars 1993 en application : il s’agit alors qu’il comporte des informations indiquant qu’il a été élaboré alors que valait ce texte officiel ou après son abrogation. Il faut, de plus, que tout écrit de l’échantillon comporte l’expression « vie physique ».

La spécification et la mise en catégories des formulations relatives à la « vie physique »
Vingt productions ont été repérées, qui présentent les caractéristiques requises : six articles, extraits de six numéros de la Revue EPS, et quatorze publications, réparties dans six numéros des Dossiers EPS. Ces écrits émanent de quinze sources différentes ; leurs auteurs font valoir différentes fonctions en rapport avec l’EPS et des lieux d’exercice divers. Un article de C. Pineau, publié en 1993, fait par exemple partie de l’échantillon. Il contient l’expression « vie physique » et a pour titre : « L’application de l’arrêté du 24 mars 1993 relatif au baccalauréat et autres examens de l’éducation nationale »153. Il est notable que les écrits de l’échantillon présentent des phrases comportant l’expression « vie physique » qui ne sont pas reprises d’un texte officiel. On a, par exemple : « Savoir gérer de manière optimale ses apprentissages est la condition nécessaire et suffisante d’une gestion ultérieure pertinente de la vie physique. »154 On se trouve en fait en présence d’une diversité de formulations relatives à la « vie physique ». On peut les spécifier et les mettre en catégories au moyen d’une analyse de contenu. Chaque phrase ou titre comportant l’expression « vie physique » peut être confrontée aux autres. Cela permet de trancher quant aux « écarts de similarité »155, entre une formulation et chacune des autres. Une ‘« procédure par tas » est à employer pour ce faire : il n’existe pas de classification autorisant une « procédure par boîtes »’ 156. Il s’avère que chaque formulation peut être jugée semblable ou non à toute autre en fonction de trois attributs (Tableau 1). Le premier a rapport à l’action, aux actions, à l’état ou aux états indiqués par le nom, les noms, le verbe ou les verbes que complète « vie physique ». Le deuxième a trait au déterminatif précédant « vie physique ». Le troisième est relatif au rapport au temps pour les individus que concerne la « vie physique », les élèves. En fonction du jeu combiné de ces attributs, on repère vingt-quatre catégories de formulations.

Tableau n°1 : Les attributs permettant de spécifier les formulations et les catégories de formulations relatives à la « vie physique » (extrait de l’étude n° 1)

Attributs
Action(s) ou état(s)
indiqués par le(s) nom(s) ou le(s) verbe(s)
que complète « vie physique »
Déterminatif
qui précède « vie physique »
Rapport au temps, au regard de l’élève
gérer / gestion / G
organisation / organiser
...
adjectif interrogatif : quelle
adjectif possessif : sa / leur
article défini : la
article indéfini : une
nom(s) ou verbe(s) que « vie physique » complète, déterminatif précédant « vie physique » ou « vie physique » envisagés :
pour le présent et le futur
pour le seul futur
sans relation explicite au temps
Exemples de phrases et de titres « Nous sommes persuadés que l’avenir proche de la discipline va se structurer autour de son troisième objectif, concernant le “savoir gérer sa VIE PHYSIQUE”. »
« Offrir à chacun les connaissances et les savoirs concernant l’entretien de ses potentialités et l’organisation de sa VIE PHYSIQUE aux différents âges de la vie. »
« Quels impératifs imposent d’avoir une VIE PHYSIQUE à tout âge ? »
« Quelle contribution de l’EPS pour quelle VIE PHYSIQUE ultérieure ? »
« Gestion de sa VIE PHYSIQUE »
« L’accès aux connaissances relatives à l’orga-nisation et à l’entretien de la VIE PHYSIQUE »
« Vous semble-t-il accessoire, nécessaire, important, indispensable que l’élève ait une VIE PHYSIQUE à tous les âges de son existence ? »
« Offrir à chacun les connaissances concernant l’entretien de ses potentialités et l’organisation de sa VIE PHYSIQUE aux différents âges de l’existence. »
« Il n’est pas avancé ici la gestion de la VIE PHYSIQUE future, terminologie contem-poraine, mais l’esprit y est, à cela près qu’il s’agit alors d’une gestion au service de la société plus qu’à son propre service, l’hédonisme n’a pas encore cours. »
« L’accès aux connaissances relatives à l’orga-nisation et à l’entretien de la VIE PHYSIQUE »
Remarques
Remarques
Dans certains cas, il n’est pas de nom ou de verbe qu’accompagne ainsi « vie physique ». On peut ainsi avoir : « Quelle EPS pour quelle vie physique ultérieure ? » Il est à noter une occurrence pour laquelle il n’est pas de déterminatif précédant « vie physique ».
On a : ‘« Le questionnaire demandait de choisir le type de caractéristique de vie physique avec lequel les enseignants étaient d’accord ou non.’ »
Dans un cas on a : ‘« Or, la vie physique de l’adulte, comme celle de l’adolescent scolarisé, relève au moins autant d’apprentissages antérieurs que d’aptitudes plus ou moins entretenues et développées [...]. »’
On a, en cette occasion unique, jugé qu’il est question de « vie physique » pour ce qui est du présent et du futur.

Pour une étude de l’emploi des formulations relatives à la « vie physique »
La procédure qui a permis leur repérage vaut dans le cas des textes officiels dont l’examen a conduit à s’interroger quant à la « vie physique » en EPS. On y trouve sept catégories de formulations. L’usage des formulations relatives à la « vie physique » dans les écrits de l’échantillon n’est pas systématiquement celui qui a cours dans ces textes officiels. Il est ainsi question, dans l’une des publications de l’échantillon, du ‘« troisième objectif, “apprendre à gérer sa vie physique” »157.’ La formulation utilisée en cet énoncé relève d’une catégorie à laquelle il n’est fait recours qu’une fois dans les textes officiels examinés : on la trouve dans la circulaire du 21 novembre 1995158. Or, elle apparaît en un propos relatif à l’évaluation. De plus, les catégories de formulations qu’utilisent les auteurs des écrits de l’échantillon ne se retrouvent pas toutes dans les textes officiels considérés. Il est ainsi une catégorie de formulations, dans un écrit de C. Pineau publié en 1994159, qui n’apparaît pas en ceux-ci. Il y en a une autre dans une publication sortie en 1997, concernant les « rencontres Chercheurs / Praticiens » de 1996160. Nombre d’exemples de cette veine pourraient être donnés. Une étude est ainsi à effectuer en préalable à celle visant à élucider la question de la « vie physique » : il s’agit de spécifier les cas d’utilisation des formulations relatives à la « vie physique » dans l’échantillon, pour s’enquérir du rapport de chacune aux textes officiels. Cette élucidation a pour but de permettre l’examen des questions soulevées à partir des textes officiels.

Notes
143.

Association des enseignants EPS, Actes, université d’été EPS 1993, AEEPS / Université Aix-Marseille II, 1993, pp. 31-37, 39-46, 47-51, 53-57, 63-67,

144.

Bonnefoy (G.), Contextualisation du thème et problématique de l’université d’été, in : Association des enseignants EPS, Op. cit., pp. 11-17

145.

Le Boulch (J.), Education physique, éducation motrice psychocinétique (place de l’éducation physique en éducation par le mouvement), in : René (B.-X.), Op. cit., pp. 62-69

146.

Pineau (C.), Hébrard (A.), L’éducation physique et sportive, Revue EPS, n° 240, mars-avril 1993, p. 16

147.

Rouziès (C.), Op. cit., p. 4

148.

Delignières (D.), Entretien avec D. Delignières, in : Association des enseignants EPS, Op. cit., p. 83

149.

Cogérino (G.), Apprendre à gérer sa vie physique, Paris : PUF, collection pratiques corporelles, 1999, quatrième de couverture

150.

Dugal (J.-P.), Evaluation rénovée et contenus en question, Revue EPS, n° 243, septembre-octobre 1993, pp. 34-36

151.

Jarthon (M.), APS et santé ; les instructions officielles, in : Comité d’études et d’informations pédagogiques de l’éducation physique et du sport, Op. cit., pp. 54-58

152.

Arnaud (P.), La didactique de l’éducation physique, in : Arnaud (P.), Broyer (G.), Psychopédagogie des APS, Toulouse : Privat, 1985, p. 282

L’auteur introduit ainsi une série d’articles qui paraîtront dans la Revue EPS sous le titre : « La Revue EPS et l’innovation didactique » en 1985 et 1986.

153.

Pineau (C.), L’application de l’arrêté du 24 mars 1993 relatif au baccalauréat et autres examens de l’éducation nationale, Revue EPS, n° 243, septembre-octobre 1993, pp. 57-60

154.

Cogérino (G.), Gestion de la vie physique, Revue EPS, n° 251, janvier-février 1995, p. 21

155.

Moles (A.), Op. cit., pp. 207-209

156.

Bardin (L.), L’analyse de contenu, Paris : PUF, 1977, pp. 152-153

157.

Cogérino (G.), Des pratiques d’entretien corporel aux connaissances d’accompagnement, Dossiers EPS, n° 37, 1998, p. 24

158.

Circulaire n° 95-253 du 21-11-1995, Op. cit., p. 3550

159.

Pineau (C.), Programme en éducation physique et sportive, Revue EPS, n° 245, janvier-février 1994, p. 60

160.

Comité d’études et d’informations pédagogiques de l’éducation physique et du sport, Rencontres Chercheurs / Praticiens 1995-1996, Créer le dialogue entre chercheurs et praticiens, Journées nationales, 27-28-29 septembre 1996, INJEP-Marly-Le-Roy, Revue EPS, n° 263, janvier-février 1997, p. 59