3.1. Comparaison de la ressemblance intra-paire pour l’écriture, en fonction des groupes

Les résultats de notre étude chez l’adulte sont en faveur d’une plus grande ressemblance de l’écriture des monozygotes comparée à celle des dizygotes.

Toutes les différences significatives, à p.05, entre les moyennes des différences intra-paires, vont dans le sens d’une plus grande ressemblance des monozygotes ; elles concernent les marges, la hauteur du texte, la position de la signature, la direction des lignes. A p.08, on retient également les différences pour la pression moyenne et la rapidité.

Les différences intra-paires des germains sont très semblables à celles des dizygotes, sauf en ce qui concerne la juxtaposition : pour cette variable, les couples de germains différent davantage que les couples de dizygotes et il n’y a pas de différence significative entre les moyennes des différences intra-paires des monozygotes et des dizygotes.

Contrairement à ce que l’étude chez l’enfant pouvait laisser supposer, nous ne constatons pas une ressemblance significative des monozygotes pour les indices de forme et de liaison de l’écriture : nous notons, chez l’adulte, très peu de différence entre les moyennes des différences intra-paires des monozygotes et des dizygotes pour la juxtaposition et aucune différence relative à la forme du graphisme, jugée sur l’importance des boucles (tableau 34).

La plus grande ressemblance des MZ par rapport aux dizygotes semble donc toucher essentiellement les éléments de spatialité, particulièrement les indices de direction et de disposition dans la page. Toutefois, il faut noter que, pour certains de ces paramètres, les dizygotes différent plus que les germains.

Les différences entre monozygotes et dizygotes concernant les ressemblances intra-paires, pour de nombreux paramètres, nous ont conduite à envisager de distinguer les groupes en fonction des moyennes des différences intra-paires pour ces paramètres.

Les distances des jumeaux aux centres de gravité des groupes MZ et DZ, calculées pour ces variables, ne différent pas autant que dans le calcul établi sur la ressemblance physique, mais elles différent suffisamment pour permettre la classification des paires avec un risque d’erreur inférieur à 5 %, dans la plupart des cas, si on tient pour exacte la classification à partir du questionnaire.

Dans 97.8 % des cas, la classification en fonction de l’écriture correspond à celle obtenue d’après l’analyse du questionnaire et nous avons pu classer, en fonction de l’écriture, les paires pour lesquelles nous ne disposions pas des informations du questionnaire. Pour la paire 32, le risque d’erreur lors de la classification par l’écriture est à p.07 ; cette classification correspond à celle fondée sur la ressemblance physique, selon les indications données par un seul des jumeaux ; de ce fait elle nous paraît suffisamment probable pour être retenue. Cependant, on note que l’un des jumeaux de cette paire avait présenté des problèmes à la naissance et que la ressemblance, dans l’enfance, était moins importante qu’à l’âge adulte. Par ailleurs, il s’agit d’une paire discordante pour la préférence manuelle.

En ce qui concerne les jumeaux des autres paires, correctement reclassées mais dont la différence entre les distances aux centroïdes des groupes est faible (trois paires de dizygotes et deux paires de monozygotes), on remarque que tous sont droitiers, sans différence concernant la préférence manuelle, en fonction du questionnaire d’Annett ; tous ont effectué leur scolarité ensemble ; rien n’a affecté leur habileté manuelle ; leur opinion concernant leur situation gémellaire (“ vrai ” ou “ faux ” jumeaux) est conforme au résultat du questionnaire. Nous ne retenons, en fait, qu’une ressemblance physique accentuée pour l’un des trois couples de dizygotes et au contraire une ressemblance physique moins importante dans l’enfance pour l’ensemble des couples monozygotes. A noter également, un entraînement différent de la main dominante pour les jumeaux des deux couples monozygotes.

On peut trouver, dans ces informations issues du questionnaire, une explication à la moins bonne discrimination, en fonction de l’écriture, des trois couples monozygotes. En ce qui concerne les trois couples dizygotes, les résultats ne semblent pas en rapport avec une situation particulière.

La seule classification incorrecte concerne la paire 39, classée DZ d’après l’écriture avec un risque à p.05, alors que la discrimination en fonction du questionnaire l’attribuait au groupe MZ. On note, pour un des jumeaux de cette paire, des problèmes à la naissance et surtout un traumatisme dans l’enfance ayant affecté la ressemblance physique et l’habileté manuelle. Ceci peut expliquer les différences portant sur l’écriture.

La plus grande ressemblance des monozygotes par rapport aux dizygotes, pour certains paramètres de l’écriture est à rapprocher des résultats portant sur certaines fonctions cognitives et sur le développement intellectuel. Elle est très généralement retrouvée dans la littérature (Roubertoux et al., 1978 [131]), avec, notamment, une plus grande ressemblance des monozygotes dans des épreuves entrant dans le QI verbal du WISC-R (Rose et al., 1981 [129]) et également dans le QI de performance, quoique, dans ce cas, les études effectuées (Rose et al., 1981, [129] ; Beekmans et al., 1993, [9] ; Spitz, 1994 [143]) retiennent un effet du type de chorion responsable d’une plus grande ressemblance des monochorioniques.

Nous ne disposions pas, dans cette étude, d’un diagnostic de chorion et l’étude faite chez l’enfant peut nous amener à penser que cette variable influence le résultat obtenu en ce qui concerne les marges, la direction des lignes, voire la rapidité. Toutefois c’est ici le positionnement, dans son ensemble, du texte écrit et de la signature, qui apparaît concerné.

Outre le facteur relatif au type de chorion, d’autres facteurs peuvent également influencer les différences intra-paires. Nous aborderons cet aspect plus loin, avec la discussion portant sur l’ensemble du travail.