Le cadre

Sans doute peut-on placer dans le même souci d'anonymat les constantes du tableau ( dimensions du triptyque ), et la présence du verre. Bacon tenait à ce que tous ses tableaux soient sous verre. On se voit ainsi --- spectateur, lecteur, interprète ---, reflété par les grands à plats sombres. Mais quand Sylvester interroge Bacon sur le brouillage et les reflets mis en place par le verre, Bacon refuse, malgré l'insistance de Sylvester, de vouloir faire jouer au verre le même rôle que le miroir, ou le Grand Verre de Duchamp.

‘- Les reflets, demande Sylvester, sont-ils quelque chose que vous tenez positivement à avoir ou quelque chose dont il faut s'accommoder?
- Je ne tiens pas à ce qu'ils soient là; je trouve qu'il faut s'en accommoder... J'aime aussi la distance que le verre crée entre ce qui a été fait et le spectateur. J'aime que l'objet soit, pour ainsi dire, mis aussi loin que possible. 438

D'autre part, ce que Francis Bacon refuse en tant que créateur, il l'aime, en tant que spectateur, curieux du brouillage des formes donné par le verre dans certains tableaux de Rembrandt, attentif à la logique de Duchamp et à sa recherche.

La logique du peintre n'est pas nécessairement ce que perçoit le spectateur. Nous le verrons plus loin avec le regard de Didier Anzieu sur les tableaux de Francis Bacon.

Notes
438.

L'art de l'impossible (p. 172, 173 )

- Are the reflections something you positively want to have, or are they something to be put up with?

- I don't want them to be there; I feel that they should be put up with (... ) I also like the distance between what has been done and the onlooker that the glass creates; I like, as it were, the removal of the object as far as possible. ( p. 87 )