II. La Musique

« Des danseurs ne sauraient se passer de musiciens, un bal ne peut manquer d’avoir un orchestre ; aussi la fête de la Mort a-t-elle eu ses ménétriers pour inviter la foule à venir goûter au cimetière les joies du tombeau. L’idée des squelettes musiciens placés en tête des rondes funèbres, le plus souvent sur une estrade auprès du charnier, fut probablement suggérée par la coutume, très répandue pendant le moyen âge, de pratiquer des jeux et des divertissements après les saints offices autour des églises, dans le lieu même qui servait d’asile aux morts. C’est là que les pèlerins récitaient des cantiques et des légendes, que les trouvères et les ménestrels fablaient et chantaient, que les jongleurs faisaient leurs tours d’adresse, que les marchands vendaient mille babioles, et que la jeunesse des deux sexes tenait de doux propos et dansait. Cette coutume ne fut à la vérité qu’une tolérance de la part du clergé qui s’y opposa formellement toutes les fois qu’elle occasionna des abus et devint un sujet de scandale. Le Manuel du péché, composé, à ce que l’on croît, au XIIIe siècle, par l’évêque Grosthead, proteste contre cet usage dans les vers que voici :

Karoles ne lutes ne deit nul fere
En seint église, ki me voit crere ;
Kas en cimetière Karoler
Utrage est grant u lutter. 1292»
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’L’orchestre des morts’, ’danse macabre des Saint Innocents’.Edition de Guyot Marchant (1486).
Notes
1292.

KASTNER G., op. cit., p. 141.