7.2.4. L’approche psychocritique fait du texte un objet symbolique, révélateur d’une psyché humaine.

Pour l’approche psychocritique, le texte est un « pré-texte qui renvoie à un texte second »23.

Quels sont les indices par lesquels le lecteur peut accéder à ce texte sous-jacent ou latent, c’est-à-dire au discours de l’inconscient manifesté ou voilé par l’oeuvre soumise au regard et à l’analyse du lecteur ?

Une approche psychocritique, rappelons-le, met en jeu, dans un premier temps, un repérage d’indices, tels que des « métaphores obsédantes », des particularités stylistiques, des expressions plus ou moins insolites, des répétitions de termes, de situations ou de figures. La constance de ces indices est elle-même fortement significative et constitue une structure autonome par rapport au discours conscient, structure dans laquelle le lecteur peut reconnaître les caractéristiques d’un discours très probablement involontaire et inconscient. Notons que les théoriciens de cette approche n’ont pas désigné avec une extrême précision ces éléments répétitifs, tantôt parlant de motifs, de symboles ou de métaphores, reprenant en cela l’attitude peu discriminante de Freud dans le choix de ses termes pour caractériser les signes ou les observations qui permettent à l’analyste d’appréhender le discours du patient.

Dans un deuxième temps, il s’agit, pour le lecteur, de mettre en réseau les éléments repérés lors de la première opération. Recherchant ce qui fait la cohérence des différents indices collectés, le lecteur peut observer combien le discours inconscient se « structure comme un langage » selon l’expression de J. Lacan 2 4. Les figures, les actions et les situations apparues dans cette étape de structuration de l’analyse ne tardent pas à s’imposer sous la forme d’un récit structuré qui a toutes les apparence d’un mythe. Au-delà des symboles freudiens qui peuvent être assimilées, dans leur ressemblance à l’objet, à des icônes, ainsi que l’affirme Charles Morris 2 5, c’est en fait l’ensemble du mythe personnel saisi et articulé à partir de ses différents indices qui devient à son tour signe à interpréter, qui reproduit iconiquement les éléments d’une histoire symbolique personnelle et universelle et qui peut conduire à identifier autour de quelles structures inconscientes s’établit la personne de l’auteur. Une telle identification, faite dans et par le discours du lecteur, n’exclut évidemment pas de sa part une identification de lui-même et de ses propres structures inconscientes.

Les approches textuelles influencées par la sociologie ou par la psychologie ont en commun d’expliquer le texte à partir d’indices choisis dont le nombre est nettement moins important que ceux retenus dans les approches structurale ou sémiotique. Qu’en est-il des approches thématique et mythocritique dont l’objectif commun est de mettre en évidence l’univers imaginaire d’un auteur ou celui d’une culture ?

Notes
2.

3 Pire (François), article « Psychocritique », dans Méthodes du texte, introduction aux études littéraires, Paris-Gembloux, 1987, p. 266.

2.

4 Lacan (Jacques), Ecrits, Paris, Le Seuil, 1966.

2.

5 Morris (Charles), Signs, Language and Behavior, New-York, Prentice Hall, 1946, p. 396 : Les signes « sont comme tels à même de dénoter des objets qui leur ressemblent sous certain rapport seulement ».