9.4.1. La lecture anthropologique est révélatrice de l’homme et du fait humain.

Elle est d’abord révélatrice du fait humain à travers les œuvres de l’homme. Ce dernier, comme l’affirmait Ernst Cassirer, « ne peut être défini par aucun principe inhérent qui constituerait son essence métaphysique [...]. Le caractère dominant de l’homme, son trait distinctif n’est pas son essence métaphysique, mais son œuvre »³2. C’est cette oeuvre, c’est le système de ses activités qui définit et détermine le cercle de «l’humanité». L’œuvre littéraire, perçue dans une lecture anthropologique, sera donc révélatrice de l’homme comme producteur de formes symboliques, ce qui constitue pour lui « un besoin aussi impérieux et pressant que les nécessités biologiques les plus familières »³3.

Cependant les formes symboliques produites par le sujet humain sont toutes des oeuvres qui "naissent dans des conditions historiques, sociologiques [et culturelles] particulières"³4. Aussi la révélation du fait humain et des capacités de rationalisation et de symbolisation qui définissent l'homme se réalise-t-elle, dans chaque cas, en présence d'une oeuvre particulière, produite dans un contexte culturel donné par un individu et lue de même, dans un contexte semblable ou différent, par un autre individu lui-même situé dans des coordonnées sociales, historiques et culturelles précises. Dans ce sens, la révélation du fait humain sera d'abord révélation, non de l'Homme, mais d'un homme, ce qui n'empêche pas la saisie du global dans le local, de l'universel dans le particulier. L'identification de la personnalité complexe du sujet producteur de l'oeuvre à partir des différentes identités relatives qui composent cette personnalité et en particulier de son identité culturelle, s'actualise dans la découverte de comportements eux-aussi complexes, ou des figures ou personnages imaginaires dans lesquels il a investi une part de lui-même, d'une humanité et de l'humanité.