1.3.2.1 L’empire des médias

Il nous semble utile, dans un premier temps, de décrire à grands traits le paysage médiatique français, dans la mesure où, à force d’y être immergé on pourrait finir par ne plus le voir. Nous le ferons, très classiquement, en évoquant successivement la presse écrite, la radio et la télévision.

Selon l’enquête annuelle statistique du ’Service juridique et technique de l’Information’, on dénombrait en 1996 près de 3 000 publications commerciales pour une diffusion globale annuelle de 7 milliards d’exemplaires environ et un chiffre d’affaires de 50 milliards de francs. Les quotidiens (y compris spécialisés) sont au nombre de 120 et ils tirent annuellement 3 milliards d’exemplaires , c’est-à-dire 45% du total de la presse française. Les 898 hebdomadaires, 1205 mensuels, 670 trimestriels et 30 de périodicité élevée se partagent les 4 milliards d’exemplaires restants. Parmi les quotidiens, on distingue généralement les quotidiens nationaux (7 d’informations générales et 5 spécialisés) et les quotidiens régionaux (une centaine) qui, outre l’information internationale et nationale (souvent traitée uniquement à partir de dépêches d’agence) abordent essentiellement l’actualité régionale et surtout locale. La presse quotidienne régionale propose donc généralement des éditions partiellement différentes en fonction de la zone de diffusion. On compte par exemple 30 éditions locales pour ’Ouest France’, 11 pour ’La dépêche du Midi’, etc. Il faut signaler à ce propos que dans bien des régions, il n’existe plus qu’un seul journal, même s’il arrive que, formellement, on ait conservé deux titres: c’est le cas, dans le Rhône, où ’Le Progrès’ ayant absorbé ’Lyon Matin’, a néanmoins maintenu ce dernier titre, mais avec une rédaction commune et des pages locales totalement identiques. L’ensemble des quotidiens régionaux diffusent environ 7 millions d’exemplaires quotidiens.

La presse périodique peut se subdiviser en trois grandes catégories: la presse d’information générale, la presse d’un seul sujet, la presse d’un seul public. Toutes catégories confondues, la presse périodique - relativement à la presse quotidienne - est beaucoup plus importante en France que dans les autres pays développés. La presse d’informations générales, pour sa part, connaît une situation économique assez satisfaisante, un certain nombre de titres nouveaux ayant même réussi leur implantation (’V.S.D.’, ’Le Figaro Magazine’ et plus récemment ’Marianne’). On range dans cette catégorie aussi bien les magazines populaires très illustrés comme ’Paris Match’, que les ’news’ comme ’L’Express’, ’Le Point’, ’Le Nouvel Observateur’, etc, ou des revues plus ’typées’ comme ’La Vie’, ’Le Pèlerin’, ’L’Humanité Dimanche’, sans oublier bien sûr ce fleuron de la presse française que constitue ’Le Canard Enchaîné’, ni cet exceptionnel périodique (paraissant tous les 29 Février) qu’est ’La Bougie du Sapeur’. Dans un registre plus sérieux, il faut également relever que la presse municipale occupe aujourd’hui une place non négligeable parmi la presse écrite périodique. La plupart des communes de plus de 10 000 habitants éditent une revue généralement mensuelle qui n’est pas conçue comme un outil de propagande pour les élus en place, mais comme un véritable magazine réalisé par des journalistes professionnels, comportant certes une valorisation de l’équipe en place, mais aussi des reportages, des interviews, des articles relatifs à toutes les dimensions de la vie sociale de telle ou telle commune. Cette presse - gratuite - dont les enquêtes de terrain montrent qu’elle est assez largement lue et appréciée par la population, est, selon nos estimations, diffusée à au moins 20 millions d’exemplaires mensuels, ce qui constitue, et de loin, le plus fort tirage de la presse française 146 .

En ce qui concerne la presse périodique consacrée à un seul sujet, elle se porte plutôt bien et elle connaît généralement une expansion proportionnelle aux différents thèmes auxquels elle est dédiée. C’est ainsi que les revues consacrées à l’informatique, à la vidéo, à la moto, à la santé et à ... la télévision ont connu un développement exponentiel. La presse spécialisée dans la télévision mérite sans doute une mention spéciale, d’une part parce qu’elle est vendue à près de 14 millions d’exemplaires hebdomadaires (même si 4 millions d’exemplaires environ constituent un supplément gratuit aux quotidiens régionaux du dimanche) et d’autre part parce qu’elle est en quelque sorte une revanche de l’écrit sur l’écran. Outre la presse spécialisée ’grand public’ que nous venons d’évoquer, il existe également un grand nombre de périodiques spécialisés à caractère technique et professionnel qui connaissent généralement un succès certain, d’une part parce qu’ils répondent à un véritable besoin de formation permanente, et d’autre part parce qu’ils sont destinés à un public ’captif’. On pourrait citer par exemple ’La gazette des Communes’, ’Le moniteur des travaux publics’, ’La revue pratique de droit social’, ’La revue technique automobile’ et tant d’autres. Notons d’ailleurs pour être tout à fait exacts, que cette presse professionnelle est en réalité en même temps la presse d’un seul sujet et celle d’un seul public, précisément parce que l’on peut a priori identifier un public professionnel nécessairement concerné par tel ou tel sujet.

Pour ce qui est de la presse destinée à un seul public, elle a généralement connu depuis une vingtaine d’années une progression importante, même si des mutations ont eu lieu, que de nouveaux titres ont remplacé ou menacé de plus anciens et que certains ’créneaux’ ne semblent plus aussi ’porteurs’ que naguère. Ainsi, la presse féminine s’est développée d’une façon spectaculaire (plus de 10 millions d’exemplaires vendus) avec des succès foudroyants comme ’Femme Actuelle’ qui, lancé en 1988, diffusait déjà, deux ans plus tard, 1 800 000 exemplaires. A noter que cette revue appartient au groupe Prisma - presse qui est une filiale du géant allemand Bertelsmann. Dans le même temps des magazines plus traditionnels ou moins bien adaptés à l’évolution de la demande, ont nettement marqué le pas (’Elle’, ’Marie - Claire’, ’Nous Deux’, etc.). La presse destinée aux jeunes, pour sa part, ne connaît plus l’engouement des années 1960 et 1970 où des revues comme ’Salut les copains’ dépassaient le million d’exemplaires. La presse pour enfants connaît également quelques difficultés, liées notamment à la baisse démographique, même si de nouvelles publications, plus pédagogiques que ludiques, ont vu le jour (comme ’Sciences et vie junior’ ou ’Les clés de l’actualité’) et même si certains groupes comme Bayard Presse, premier groupe catholique, sont particulièrement actifs dans ce secteur (’Pomme d’Api’, ’Astrapi’, ’Okapi’, ’Je bouquine’, etc.). on pourrait encore citer ce que l’on appelle la ’presse masculine’, que personne n’avoue acheter mais qui se vend très bien (’Lui’, ’Penthouse’, ’Newlook’, ’Play-Boy’, etc.), secteur dans lequel le groupe Hachette-Filipacchi est leader. Il faut enfin évoquer un secteur relativement récent pour la presse: les personnes âgées. L’allongement de la durée de la vie conduit à un développement important de cette tranche d’âge, qui, par ailleurs, dispose souvent d’un pouvoir d’achat assez élevé, ce qui ne peut manquer d’intéresser les annonceurs. Un certain nombre de revues spécifiquement destinées au ’troisième âge’ (souvent des mensuels) ont été lancées avec un certain succès. Ainsi ’Notre Temps’, édité par Bayard - Presse, est vendu à 1 200 000 exemplaires.

Après ce survol très succinct de la presse écrite, qui avait essentiellement pour objet de montrer que ce média continue globalement à occuper une place très importante, malgré la concurrence de l’audiovisuel, il convient précisément d’évoquer quelques éléments caractéristiques de la radio et de la télévision française.

Comme nous l’avons déjà indiqué dans la section 1.3.1.3., la radio et la télévision françaises ont vécu jusqu’au début des années 1980 dans un régime juridique de monopole de service public. Il faut néanmoins souligner que ce monopole, en ce qui concerne la radio, était plus formel que réel, puisque les radios privées dites ’périphériques’ pouvaient ’arroser’ la France sans aucune difficulté (R.T.L. émet à partir du Luxembourg depuis 1933, R.M.C. à partir de Monaco depuis 1942, Europe 1 depuis 1955). Mis à part ce ’détail’, seuls ’France Inter’ et ses émanations (’France Culture’ et ’France Musique’) étaient habilités à émettre depuis le territoire français. Chacun se souvient de la bataille - parfois violente - pour la libéralisation des radios locales qui marqua le milieu et la fin des années 1970. Un certain nombre de ces radios locales ’hors la loi’, comme ’Lorraine coeur d’acier’, ont d’ailleurs marqué les mémoires d’une part parce qu’elles constituaient en elles-mêmes des expériences novatrices - et interdites - et d’autre part parce qu’elles accompagnaient souvent des réalités sociales fortes (crise de la sidérurgie pour ’Lorraine coeur d’acier’, problèmes des femmes, des immigrés, des homosexuels et de nombre de minorités plus ou moins opprimées). L’interpellation de François Mitterrand dans les studios d’une radio ’libre’ (’Radio Riposte’, radio du P.S.) et son inculpation pour avoir participé à une émission avait à cette époque défrayé la chronique.

Sitôt après l’élection de François Mitterrand à la présidence de la République, une des premières mesures prises par le gouvernement fut la légalisation des radios locales privées instituée par la loi de novembre 1981. Cette libéralisation permit effectivement - dans un premier temps - la floraison sur la bande F.M. d’une multitude de radios véritablement locales et associatives, soit qui existaient déjà sous une forme ’pirate’ soit qui se sont créées à la faveur de la nouvelle législation. Parmi ces radios, qui avaient quasiment toutes une dimension musicale assez prononcée, un grand nombre étaient d’inspiration ’communautaire’, c’est-à-dire se voulaient ‘’la voix des groupes minoritaires dans les grands centres’ 147 ou en tout cas porteurs d’une conception ’alternative’ de la société et ‘’d’un nouvel ordre de la communication caractérisé par la participation, la créativité et la gestion démocratique’ 148. Il s’agissait, en somme, d’une tentative de concrétiser cette formule du dramaturge allemand Bertold Brecht: ‘la radio est le plus merveilleux moyen de communication pour faire de l’auditeur un émetteur’ ’.

Aujourd’hui, si un certain nombre de radios sont restées ’libres’, locales et ’communautaires’, c’est-à-dire en dehors de la logique marchande (on pourrait citer, dans le Rhône, ’Radio Canut’, ’Radio trait d’union’, ’Radio Fourvière’, ’Radio Judaïca’, ’Radio Charpennes-Tonkin’, ’Radio pluriel’, ’Radio Salam’, etc.) force est de reconnaître qu’elles ne bénéficient pas d’une très forte audience, et surtout que de nombreuses expériences de cette nature soit ont purement et simplement cessé, soit ont été absorbées - et dénaturées - dans des réseaux nationaux commerciaux comme ’Radio Nostalgie’, ’Skyrock’, ’Chérie F.M.’, ’NRJ’ et tant d’autres. Par ailleurs les radios périphériques nationales, outre qu’elles émettent toutes sur la bande F.M. comme Europe 2 et R.T.L.2 qui sont dotées d’énormes moyens - car adossées à un grand groupe - constituent une concurrence redoutable pour les vraies radios locales. A côté des réseaux commerciaux et des radios ’communautaires’ demeurent malgré tout quelques fréquences dédiées au service public et à ses différentes antennes: ’France Inter’, ’France Info’, ’France Culture’, ’France Musique’, ’F.I.P.’, même s’ils conservent une audience non négligeable sont tout de même réduits à une portion plutôt congrue. Au total, si l’on prend le cas du département du Rhône, c’est 42 radios qui émettent sur la bande F.M., dont 5 émanant de Radio France, une vingtaine d’esprit ’communautaire’ et une quinzaine appartenant à des réseaux nationaux et à des radios ’périphériques’.

Il faut enfin souligner que si la radio a sans doute été le média dominant entre les années 1930 et les années 1960, et particulièrement pendant la seconde guerre mondiale, elle a évidemment énormément souffert du développement de la télévision à partir des années 1960. Cette concurrence redoutable, ajoutée à la révolution technologique qu’a constitué le transistor, a conduit à une première mutation: les récepteurs de radio sont devenus mobiles et peu onéreux et devinrent en quelque sorte un compagnon, voire un confident, avec une fonction de plus en plus ludique, ’conversationnelle’ et, à certaines heures, (notamment tôt le matin), informationnelle. Notons à cet égard que l’expansion de l’autoradio, évidemment liée à la généralisation de l’automobile a constitué une chance inespérée pour la radio qui est le seul média utilisable en voiture. La seconde mutation de la radio dont nous avons déjà évoqué les effets concrets en France, a été provoqué par l’utilisation de la modulation de fréquence (F.M.) qui en permettant la multiplication des émetteurs sans risque d’interférence, a créé les conditions techniques pour qu’émergent les radios locales. D’une façon générale, il semble que la radio a conquis une place très spécifique dans le paysage médiatique français et qu’elle n’est pas véritablement en relation de concurrence mais plutôt de complémentarité avec les autres médias en raison de son coût quasiment nul pour le consommateur, de sa maniabilité et de sa capacité à être écoutée en n’importe quel lieu.

Pour terminer ce tour d’horizon, il reste à donner quelques indications très générales concernant la télévision, étant entendu que nous n’avons pas l’ambition d’analyser le phénomène audiovisuel - ce dont une thèse entière ne viendrait sans doute pas à bout - mais de mettre en lumière quelques éléments qui nous semblent importants pour notre recherche.

Comme nous l’avons déjà indiqué, c’est la loi du 30 Septembre 1986 qui a officiellement mis fin au régime de monopole de service public que connaissait la télévision française depuis sa création, même si ce régime de monopole avait déjà été singulièrement mis à mal par la création de Canal Plus en 1984, sous un gouvernement de gauche, ainsi que de la 5 et de la 6 début 1986. La situation actuelle est donc caractérisée par la cohabitation sur le réseau hertzien national de 4 chaînes de service public (France 2, France 3, Arte, et la Cinquième) et de 3 chaînes privées (TF1, Canal Plus et M6). Mais cette situation apparemment équilibrée est en réalité marquée par le fait qu’une seule chaîne - TF1 - occupe une position dominante, avec environ 40% en moyenne de ’parts de marché’. En même temps, on assiste à une concurrence effrénée, notamment entre TF1 et France 2, avec une course à l’audience, sur laquelle nous reviendrons dans la section 1.3.2.2., qui a conduit France 2, particulièrement sous la présidence de Jean - Pierre Elkabbach, à utiliser les mêmes méthodes que TF1: animateurs vedettes payés à prix d’or; émissions de divertissement populistes pour ne pas dire racoleuses; multiplication des jeux; diffusion et rediffusion de téléfilms, souvent américains, le plus souvent policiers, et/ou violents et/ou mélodramatiques, etc.

On constate par ailleurs que la plupart des chaînes émettent aujourd’hui quasiment en permanence, ce qui augmente le besoin en fiction télévisée, la durée de diffusion de celle-ci augmentant plus fortement que la durée globale de programmation. Ainsi en 1986 les trois chaînes, alors publiques, ont diffusé 2 500 heures de téléfilms, séries, feuilletons; en 1989 c’est plus de 12 000 heures qui ont été diffusées par les cinq chaînes de l’époque ! Pendant la même période, les films de cinéma sont passés de 918 heures à 1 453 heures. Les fictions télévisées ont donc progressé de 380% alors que les films de cinéma croissaient de 63,17%. A partir de là, on comprend aisément que les chaînes fassent de plus en plus largement appel au marché international: selon une étude de l’I.N.A., la fiction étrangère (pour l’essentiel américaine) avoisinant les trois quarts de la fiction diffusée sur les télévisions françaises. Quant aux rediffusions, elles s’élevaient, selon la même source, aux deux tiers de l’ensemble de la fiction inédite française - qui obtient généralement de bons succès d’audience (comme en témoigne par exemple ’Le comte de Monte-Christo’ avec Gérard Depardieu sur TF1) - conserve en valeur absolue, une part à peu près constante 149. On peut donc craindre que la maintien des télévisions publiques, dans ces conditions, ne présente guère d’intérêt. En effet, si on peut à juste titre critiquer le ’syndrome TF1’ qui affecte France 2, on ne saurait pour autant considérer la programmation quelque peu austère d’Arte comme modèle. Il y a donc sans doute encore beaucoup à faire - et ce ne sera pas simple, même si la volonté existe - pour imaginer et faire vivre une conception complètement renouvelée du service public. On peut en effet regretter la privatisation de TF1 et l’extinction du monopole, mais c’est une réalité sur laquelle on ne peut pas revenir et qui s’impose à tous. Nous considérons donc, comme Michel Souchon, que ‘c’est du côté de la force et de l’originalité télévisuelle que peut se trouver le mieux l’intérêt de maintenir des télévisions publiques. L’évolution des programmes et de la programmation dans les prochaines années dépendra pour une bonne part des réponses qui seront apportées à la question: ’A quoi sert un service public de la télévision ?’’ 150.

Toujours au niveau du réseau hertzien terrestre, mais sur un plan local ou régional, on peut observer que, contrairement à certaines espérances affichées au milieu des années 1980, la libéralisation de l’audiovisuel n’a pas permis l’émergence de nombreuses chaînes ’de pays’, démocratiques, interactives et ancrées dans la réalité locale. En fait, il s’est passé - mutatis mutandis - le même phénomène pour les télévisions que pour les radios ’libres’ avec une difficulté supplémentaire, c’est qu’une chaîne de télévision, même avec des ambitions limitées, cela coûte très cher. C’est ainsi que la plupart des expériences de télévision locale non commerciale, quelque novatrices qu’elles aient été, sont restées anecdotiques, et que même les chaînes locales commerciales ont connu - et connaissent encore - des difficultés importantes auxquelles bien peu ont survécu. Dans le Rhône, par exemple, il n’existe qu’une télévision locale hertzienne, T.L.M. (Télé Lyon Métropole), qui ’vivote’. En France, le nombre total de télévisions locales doit être inférieur à 10.

Il est vrai que le créneau du local est déjà occupé - depuis déjà de nombreuses années - par France 3, dont c’est même en partie la vocation et qu’il est extrêmement difficile, pour ne pas dire impossible, de produire quotidiennement plusieurs heures de programmes constitués uniquement avec des informations ou des reportages locaux. France 3 affiche d’ailleurs à cet égard des ambitions limitées puisque les ’décrochages’ régionaux représentent seulement 1h30 par jour environ: le 12h/14h, le journal régional à 19h10 et un 6 minutes tout en images à 18h54. Quant à M6 elle se contente de 6 minutes d’informations régionales quotidiennes.

Il faut enfin évoquer la véritable explosion des chaînes diffusées par câble et/ou par satellite, cryptées ou non, puisque la magazine hebdomadaire ’Télé câble satellite’ annonce les programmes de 93 émetteurs, sans compter les chaînes hertziennes ni Canal Plus. Ces canaux sont souvent thématiques, car seule la généralisation du câble et du satellite peut permettre la rentabilisation de télévisions soit destinées à un seul public, soit dédiées à un seul thème. En effet, un programme très ciblé ne peut se rentabiliser que s’il rayonne sur de nombreux marchés. On a ainsi vu fleurir des chaînes consacrées à l’information en continu (’L.C.I’., ’C.N.N’., ’Euronews’...), des chaînes sportives (’Eurosport’), musicales (’M.T.V., ’M.C.M’., ’Muzzik’...), religieuses, cinématographiques (’Ciné classics’, ’Ciné cinéma’, ’Cinéstar’...), documentaires (’Planète’), etc. et des chaînes destinées à un public particulier, comme les enfants (’Canal J’, ’Disney Channel’...), les femmes (’Teva’), aux adolescents (’Canal Jimmy’), etc. Mais il existe aussi un certain nombre de chaînes généralistes, souvent des chaînes nationales qui diffusent par voie hertzienne terrestre dans leur pays et pour lesquelles le câble et le satellite sont un moyen de développer leur audience. C’est évidemment le cas pour la chaîne francophone ’TV5’, mais aussi pour ’R.T.L. 9’, ’Télé Monte Carlo’, etc.

Les chaînes diffusées par câble et par satellite, ont généralement recours à des sources de financement en tout ou en partie différentes de celles de la télévision hertzienne traditionnelle. En effet, comme le rappelle l’universitaire québécois Jean-Paul Lafrance, ‘Les moyens traditionnels de la télévision conventionnelle (la redevance, la subvention étatique et la publicité) sont tous en stagnation ou en décroissance’’ 151. Du coup, les chaînes thématiques font appel, souvent en les panachant, à 6 vecteurs de financement: la publicité ciblée, le paiement par l’ensemble des abonnés au câble, le paiement au canal (télévisions cryptées), le ’pay per view’ (paiement à l’usage), le prélèvement sur le télé-achat et la commandite.

On ne peut clore ce rapide panorama de la télévision sans évoquer la récente loi sur l’audiovisuel (la huitième en 26 ans) due à Catherine Trautmann, ancienne Ministre de la Culture et de la Communication.. Il est évidemment beaucoup trop tôt pour en évaluer toutes les conséquences concrètes, mais on peut au moins tenter d’en analyser les principes et d’en imaginer la portée.

Notes
146.

A titre d’exemple, Viva, le magazine de la ville de Villeurbanne (127 000 habitants), est diffusé 10 fois par an à 65 000 exemplaires.

147.

Michel DELORME (Président de l’association mondiale des radios communautaires): La radio communautaire in L’état des médias, opus cité, p. 80.

148.

Ibid.

149.

L’ensemble des indications de ce paragraphe sont issues d’un article de Michel SOUCHON: Les programmes et la programmation, enjeux de la concurrence entre chaînes in L’Etat des médias, opus cité, p. 59 à 61.

150.

Ibid. p. 61.

151.

Jean-Paul LAFRANCE: Les télévisions thématiques, publics ciblés et financements panachés in L’état des médias, opus cité, p. 62.