Pour cette partie, nous privilégions le principe de progression car nous cherchons à vérifier si des sujets, mis en situation de restitution narrative, parviennent à reconstruire un produit dynamique, c'est-à-dire un écrit progressant d'un début (i.e. but à accomplir) vers une fin (i.e. but accompli). Les propositions dites essentielles se répartissent en deux catégories : les composantes narratives (désormais CN) et les sous-composantes narratives (désormais SCN). Les SCN permettent le passage d'une CN à une autre. La figure 7 schématise ces divers degrés d'importance :
Rappelons (cf. chapitre 1) que la majeure partie des recherches menées sur cette hiérarchisation des différentes propositions d'un texte (Barthes, 1966 Johnson, 1970 ; Brown et Smiley, 1977 ; Meyer, 1977 ; Adam, 1984) parle, non pas de CN et de SCN, mais de "fonction" et d'"indice" et, plus précisément, de "noyau" et d'"expansion" — termes introduits par Barthes en 1966 — et met en corrélation l'importance informationnelle attribuée spontanément par les lecteurs aux noyaux et à leurs expansions et les probabilités de compréhension/ mémorisation/restitution.
Dans notre cas, où nous posons donc que seules les CN et les SCN sont responsables de l'avancement du produit, la difficulté reste alors de les identifier. Diviser un texte en unités d'analyse plus petites représente une tâche très délicate, car éviter un traitement subjectif n'est pas chose aisée. En effet, ‘"personne ne sait autrement qu'intuitivement déterminer le thème d'un passage. [...] Il faut donc renoncer à une procédure déductive pour découvrir ce dernier et recourir à des méthodes empiriques et inductives’" (Fayol, 1985 : 41). Pour mettre en place une telle méthode, nous nous sommes inspirée d'une expérience menée par Johnson (1970). L'auteur, pour obtenir la segmentation d'un récit en sous-éléments, a élaboré un test, dit "objectif", qui consistait à demander à deux groupes d'une cinquantaine d'étudiants, appelés "juges", de diviser un texte en unités plus petites. Avec un tel procédé, les segmentations obtenues semblent fiables étant donné que le coefficient de corrélation entre les deux groupes atteint 0,93. Aussi avons-nous adapté cette méthode à nos données et la division des deux supports auditifs en CN et SCN apparaît aujourd'hui plus sûre. Dans le présent chapitre, nous étudions le développement des CN en fonction du texte à restituer et en fonction de l'âge des sujets. L'analyse des SCN fera l'objet du chapitre 5.