C. – LE PLAN DE LA THÈSE.

Afin d’articuler de façon satisfaisante les deux niveaux de la réalité du vote, l’acteur et l’acte, la structure de cette thèse se veut binaire.

Tout d’abord, nous nous intéressons aux données instrumentales, aux traces "tangibles" de l’activité des individus et des groupes qu’expliquent les représentations symboliques et imaginaires qui structurent la pensée des acteurs et modèlent leur comportement social et politique. L’analyse sera donc centrée sur l’inscription du vote dans le champ individuel et dans le champ social, sur le principe de cette inscription et ses contraintes également. Cela implique une première orientation de l’étude sur les individus, sur les rapports inter-individuels, sur l’organisation et le fonctionnement des ensembles partiels qui segmentent le champ social et sur la société conçue comme un Tout structuré et cohérent, en évitant de compartimenter ou de cloisonner ces différents niveaux d’analyse dans le but de prendre également en compte le poids des déterminismes sociaux et ainsi de dégager les éléments irréductibles de la spécificité du vote au Cameroun (PREMIÈRE PARTIE).

Dans cette première partie de notre travail, nous nous attachons à montrer la séparation et l’autonomisation des sujets, le développement des médiations qui les placent en position individualisée, les rapports entre caractéristiques inaliénables des sujets et caractéristiques acquises et transmissibles socialement.

Ensuite, ce travail de recherche vise à mettre en perspective le Vote, au travers des faits que l’on peut précisément dater, en prenant en compte la dynamique sociale : l’analyse ne s’intéressera pas uniquement au Vote, mais aussi aux forces qui le font évoluer et au sens de cette évolution. On verra donc le Vote tantôt privé de contenu : coquille vide mise au service de différentes stratégies, illustrant un processus de division sociale, mais se donnant à voir également comme la représentation de l’unité des groupes. Tantôt le Vote sera travaillé par la négativité, traversé de forces antagoniques remettant en cause les valeurs qui sous-tendent son organisation et son fonctionnement, ce mouvement comportant un double aspect : en tant que critique de l’ordre établi et contestation des systèmes d’autorité, 118 le vote y apparaîtra moins comme un cadre nécessaire et bienfaisant de la vie sociale et politique, que comme un dispositif d’oppression et d’aliénation maintenant les individus en situation de dépendance et d’assujettissement. Mais le même mouvement contiendra également une certaine part d’affirmation positive, en laissant entrevoir en filigrane, en pointillés, les linéaments d’un autre ordre, les rudiments d’une autre logique, la promotion de nouveaux rapports d’autorité. 119 ( DEUXIÈME PARTIE).

Dans cette seconde partie de notre travail, le Vote s'avère dans tous les cas, tiraillé entre des attractions divergentes qui tout à la fois se combinent, le faisant exister comme une réalité vivante, dynamique et évolutive, qui attestent finalement d’un apprentissage de la démocratie au Cameroun.

Notes
118.

Ceci correspond à l’apparition notamment d’une série de comportements "autonomes", par lesquels l’on cherche – par des pratiques très diverses à conquérir des "espaces de liberté ".

119.

La contestation apparaîtra ici comme la négation de la légitimité du discours institutionnel et des pratiques qu’il justifie et qui la sous-tendent, ainsi que la remise en cause des habitus reproducteurs de cette légitimité.