SECTION 1 : CADRE ET CONDITIONS DU DÉROULEMENT DES INTERACTIONS CONSTITUTIVES DU VOTE : UN CADRE EXCEPTIONNEL ET/OU PARTICULIER.

Si l’on se réfère à la chronologie du déroulement de la période électorale établie dans les textes officiels en tant que dispositif de normalisation de la pratique électorale, l’ouverture de la campagne électorale étant fixée à partir du quinzième jour qui précède la date du scrutin, et l’achèvement de celle-ci la veille de la tenue des opérations à minuit, 967 alors qu'elle est réelle, la singularité ou la particularité du jour des élections ainsi que la distinction du temps du vote par rapport à celui des autres opérations électorales passent inaperçues.

En effet, dans le code électoral au Cameroun, ce temps n’est pas spécialement marqué ou séparé de celui de la campagne électorale, par un moment qui serait par exemple consacré à la réflexion, contrairement à la souche française de ce processus se déroulant au Cameroun.

Dans la pratique électorale française en effet, à laquelle le déroulement des opérations de vote au Cameroun semble emprunter ses traits principaux, la campagne électorale s’arrête le vendredi soir à minuit – ce qui n’est pas le cas au Cameroun – comme pour solenniser le jour mythique de la réflexion durant lequel, toutes passions éteintes, le citoyen dans le secret de sa conscience fait le choix qu’il va exprimer le dimanche dans le secret de l’isoloir. 968 Cette coupure temporelle du samedi permet de bien distinguer le moment du scrutin de celui des autres opérations électorales : sur ce point particulier, on peut dire que la copie camerounaise se distingue de son modèle français.

Deux éléments, et leurs effets conjugués, permettent de rendre compte du caractère exceptionnel du jour des élections au Cameroun. Le premier se rapporte à la culture des groupes qui conditionne pour partie les occupations auxquelles on s'adonne, les comportements, les attitudes et les croyances que l’on adopte en la circonstance. Le second élément relève des textes officiels qui, en tant que dispositif de normalisation, s’efforcent aussi d’obtenir de la part des citoyens certains types de comportement en déterminant le dispositif matériel de production des votes, en définissant les obligations qui sont tenus d’être respectées, les règles qui doivent être suivies.

Notes
967.

Cf. Titre VIII, Chap.III, Art.82, al.1

968.

Offerlé (Michel), Un homme, une voix ? Histoire du suffrage universel, Paris, Gallimard, 1993, p. 78.