3.1 La construction de l’objet d’étude

Une partie introductive montre comment a été construit l’objet d’étude. Contrairement à une démarche hypothético-déductive, la construction de l’objet part de l’observation de terrain, et s’appuie sur un aller-retour permanent entre « faits » et « théorie ». Le terrain n’est plus une instance de vérification d’une problématisation préétablie mais le point de départ de cette problématisation. Cette démarche exige une rupture épistémologique avec la méthode positiviste, et répond à un souci de réconcilier éthique et économie (chapitre 1). En nous appuyant sur les travaux de Amartya Sen, nous proposons une grille de lecture de la précarité fondée sur la notion d’autonomie et de maîtrise de soi.

La précarité doit être appréhendée en termes d’insuffisance de droits ou d’incapacité à faire valoir des droits, voire à prendre conscience de ses droits. Ce cadre de réflexion soulève d’emblée plusieurs questions :

• - comment, au quotidien, les femmes pensent-elles leurs droits et leurs obligations ?

• - comment permettre aux femmes, non seulement d’accéder à davantage de droits, mais aussi à en prendre conscience, à les faire valoir, et à les faire évoluer en leur faveur ?

Cette question de l’évolution des droits et des obligations soulève inévitablement celle de l’accès à la monnaie. La monnaie, dans sa forme contemporaine, n’a-t-elle pas été conçue pour mettre fin aux liens de subordination interpersonnels ? Une approche anthropologique et institutionnaliste de la monnaie et de la finance montre que la réalité est plus complexe (chapitre 2). La monnaie n’enlève rien à la primauté des relations de droits et d’obligations. Elle les exprime, même si elle les fait également évoluer. La relation n’est pas univoque mais dialectique. La question de l’accès aux droits se transforme : quelle dialectique entre d’une part, les droits et les obligations dont les femmes se sentent investies et d’autre part, l’accès qu’elles ont à la monnaie ? Pour rendre compte de cette dialectique, nous suggérons la notion d’appropriation monétaire. La problématique étant précisée, il est alors possible de décrire la méthode adoptée pour collecter les données empiriques et les terrains choisis (chapitre 3).