A. Une production discursive basée sur la narration

En aucun cas, le terme récit de vie ne s’apparente à un récit complet, où l’enquêté nous plongerait dans sa plus tendre enfance pour nous livrer l’intégralité de son parcours personnel. Le terme « récit de vie » signifie simplement que la production discursive du sujet prend la forme de la narration. Il y a récit de vie à partir du moment où un sujet raconte un épisode quelconque de son expérience vécue.

En fonction des objectifs de la recherche, le sujet est invité par le chercheur à considérer ses expériences passées à travers un filtre. Le récit est structuré autour d’une succession temporelle d’événements et de situations qui en résultent, ou bien autour de certaines pratiques. Mais ces pratiques sont « mises en situation », au sens défini plus haut. Elles sont également inscrites dans le cours du temps. D’où le terme récits de pratiques en situation, suggéré également par Daniel Bertaux [1997], que nous préférons au précédent : il nous semble plus adéquat et moins ambigu.

Comme toute enquête, ils peuvent être utilisés à titre exploratoire, uniquement pour « baliser » la recherche et suggérer des hypothèses, ou bien comme instrument à part entière dans la recherche. Leur fonction est alors analytique, et c’est l’option retenue ici102.

Notes
102.

D. Bertaux distingue une troisième fonction : la fonction expressive. Le récit est publié intégralement, non plus dans une optique de recherche mais de communication. On peut citer à titre d’exemple l’ouvrage publié par P. Bourdieu et ses collaborateurs (Pierre Bourdieu (1993), La misère du monde, Paris : le Seuil). Cet ouvrage vise à rendre publique une souffrance racontée par ceux qui vivent cette souffrance. Cinquante et un entretiens sont retranscrits en intégralité.