Conclusion du chapitre

La méthode qualitative a été négligée par les méthodes formalistes et le raisonnement hypothético-déductif, considérés comme le seul moyen de produire du savoir scientifique. Elle représente pourtant l’unique voie possible pour décomposer les processus de décision, saisir leur dimension à la fois intéressée et morale et appréhender les contraintes, objectives ou subjectives, qui président à leur élaboration. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, la microéconomie ne permet pas de saisir l’intention des acteurs, alors même qu’elle affirme leur primat. En se limitant aux résultats des actions, la microéconomie ne permet pas d’appréhender les mécanismes de décision, qui restent finalement cantonnés au statut de « boîte noire ». La microéchelle s’impose dès lors que l’on abandonne le principe des préférences révélées ainsi que l’hypothèse d’un comportement uniquement mû par un arbitrage en termes de fins / moyens. Elle restitue aux sujets leur place d’acteurs, acteurs qui sont appréhendés non pas de manière isolée, mais en interaction les uns avec les autres. L’opposition méthodologique entre individualisme et holisme est aujourd’hui dépassée. L’appréhension du réel suppose une réconciliation entre les deux méthodes, et cette réconciliation s’appuie sur l’analyse de l’interaction entre les acteurs et leurs règles. Celles-ci ne sont pas préexistantes à l’action, elles doivent être considérées comme des repères créés et modifiés en permanence dans et par l’action. Seules les actions individuelles sont intentionnelles. Les ensembles collectifs sont des constructions intellectuelles, même si elles finissent par dépasser les acteurs qui sont à l’origine de leur édification. Affirmer que le fondement des règles nécessaires à la réussite de la coordination des acteurs n’est pas naturel mais historique et négocié, suppose toutefois de doter ces derniers d’une capacité à créer ou à faire évoluer ces mêmes règles. C’est finalement dans cette optique que s’inscrit l’analyse à microéchelle.