§2. Représentations sociales, normes et institutions : un processus cognitif, social et autorenforçant

Les représentations sociales sont une

‘« forme de connaissance, socialement élaborée et partagée, ayant une visée pratique et concourant à la construction d’une réalité commune à un ensemble social » [Moscovici, 1997, p. 53]. ’

On parle d’ailleurs de savoir commun ou encore de système d’interprétation. Les représentations sont également un guide de comportements, elles ‘« régissent notre relation au monde et aux autres, orientent et organisent les conduites et les communications sociales » [ibidem]’.

Les développements les plus récents de la psychologie confirment les intuitions de Mill. Psychologie cognitive et psychologie sociale nous enseignent que les représentations dépendent à la fois de l’expérience personnelle, de la pratique, et de l’environnement social (A)150. Des travaux de psychologie économique précisent davantage le processus concernant les représentations économiques et il est possible d’appliquer le raisonnement aux représentations de l’euro, en montrant leur dimension sexuée (B). Par contre, Mill sous-estimait l’interaction entre pratiques et représentations. Les représentations finissent par se transformer en normes sociales : elles ne représentent plus seulement une manière de voir et d’interpréter la réalité, elles deviennent un guide normatif de comportement. Lorsqu’elles acquièrent une dynamique autonome sur laquelle il devient difficile d’agir, on peut alors parler d’institution (C).

Notes
150.

Toutefois, ces deux dimensions (cognitive et sociale) sont plus souvent prises en compte à travers des programmes de recherches distincts que de manière simultanée [Hewstone, 1997 ; Semin, 1997]. Ainsi une première approche (approche dite des représentations sociales) se focalise sur la nature sociale de la catégorisation et de la classification, et aborde tout traitement des processus de catégorisation comme irréductible à la dimension individuelle et subjective. La seconde (approche dite des attributions), se focalise sur les structures et les processus cognitifs internes, sur l’organisation et la représentation des catégories dans l’esprit de l’individu, mais dans une perspective de la pensée humaine qui reste relativement fragmentaire et décontextualisée.