§1. La construction historique d’un marquage sexué des revenus féminins

 L’espace familial, s’il est laissé à l’écart de toute considération marchande, n’est pas exempt de toute considération monétaire, ne serait-ce qu’à travers la gestion du budget familial. En pénétrant les foyers, la monnaie devient un mode à part entière de régulation et de définition des relations familiales. Les règles de la circulation monétaire entre les différents membres de la famille, notamment les parents, traduisent leurs relations tout en étant susceptibles de les infléchir. L’usage d’un instrument monétaire unique appauvrit considérablement la variété des instruments employés jusqu’alors, incitant les personnes à imaginer des techniques de différenciation (A). L’enjeu est d’ordre pratique ; il est également d’ordre social puisqu’il concerne la division sexuée des rôles (B). Devoir social et dépendance : ces deux fonctions conditionnent l’accès des femmes à la monnaie. Elles exercent leur devoir social en assumant la gestion rationnelle et parcimonieuse du budget familial : émerge un idéal de la mère de famille « bonne gestionnaire » largement soutenu par la pression publique (C). Leur statut de dépendante est renforcé par le mode de détermination des salaires féminins (D).