B. Le fonctionnement : repérer les déficits de droits et les corriger ou les compléter

Les personnes se retrouvent une fois par semaine autour d’un thème précis qu’elles ont elles-mêmes choisi. Une animatrice est chargée d’encadrer et de guider les discussions et les activités ; elle est chargée également de faire le lien avec les organisations que le groupe sera amené à rencontrer. Certaines sont bénévoles, d’autres assument ce rôle dans le cadre de leur fonction de travailleur social361.

Les thèmes de réflexion sont multiples. Au départ, lorsque le groupe se forme, sont généralement abordées des questions très pratiques : la gestion de budget et l’apprentissage de la comptabilité, la consommation et les achats, l’utilisation des outils de paiement, le fonctionnement d’un compte bancaire, les impôts, les assurances, le logement, les relations avec les banques, les administrations, les collectivités locales, ou encore la justice familiale. Au fil des séances, les thèmes s’élargissent au-delà des préoccupations quotidiennes : l’environnement, la religion, la politique, etc.

Ce qui importe ici, c’est l’adaptation des thèmes aux préoccupations de chacun. Donnons quelques exemples. Dans la plupart des cas, celui du budget est abordé, mais chaque fois de manière différente. Ainsi dans les Écoles de Bousbeque, d’Armentières Quatre saisons et d’Armentières Salengro, toutes trois animées par la même personne, ce thème du budget a pris chaque fois une forme spécifique en fonction des attentes du public. À l’École de Bousbeque, l’accent a été mis sur les possibilités d’économies : comment consommer moins d’eau et d’électricité, comment favoriser l’auto-production ? À l’École d’Armentières Quatre saisons, l’accent a été mis sur l’obtention de droits supplémentaires. À l’École d’Armentières Salengro, les personnes ont souhaité l’aborder à travers l’accès à l’emploi.

À l’École d’Halluin, le groupe comporte une prédominance de mères d’enfants en bas âge et d’adolescents, de ce fait plusieurs thèmes ont été consacrés à la vie familiale. Face à la scolarité difficile des enfants de plusieurs d’entre elles, a été traité le thème de l’échec scolaire, en collaboration avec une conseillère du Conseil d’information et d’orientation (comment prévenir l’échec scolaire, quelles issues possibles, les différentes filières et débouchés, etc.). Face aux difficultés de certaines mères de famille monoparentale, a été également évoquée la question des droits et des obligations de chaque parent en cas de divorce, des possibilités de recours en cas de non respect de l’une des deux parties, et ceci en collaboration avec une juriste spécialisée en droit familial. L’École de Wazemmes regroupe aussi une majorité de mères de famille avec enfants en bas âge ; elles en ont assez de ne « s’occuper que de leurs enfants », tout en n’ayant rien à leur offrir, notamment en termes de vacances. Les femmes ont alors décidé de développer diverses activités (cuisine, couture, organisation de soirées et de thés dansants) avec un double objectif : d’une part « se sentir utile », d’autre part réunir des fonds afin d’organiser des vacances pour leurs enfants. L’École de Bruay La Buissières, située dans l’ancien quartier minier du Loubay, regroupe des femmes, mais aussi quelques hommes, de tout âge, partageant le même souhait : « connaître autre chose » que leur quartier. Ils y sont tous très attachés, mais en sont rarement sortis et éprouvent de ce fait une certaine appréhension à l’égard de tout ce qui vient de l’extérieur : quel que soit le sujet, ils essaient de multiplier les sorties.

Pour chaque thème, le processus est le suivant : les membres du groupe commencent par faire l’état des lieux de leurs connaissances, en s’appuyant sur les expériences de chacun. Face aux questions non résolues, un spécialiste est sollicité et propose une intervention. Parfois le groupe se déplace (visite du Conseil général, d’un supermarché, d’une banque, etc.). Les membres du groupe discutent et réfléchissent plusieurs semaines sur chaque thème jusqu’à ce qu’ils aient le sentiment de le maîtriser. Cela se termine par l’élaboration collective d’un outil de communication, destiné à être diffusé dans le milieu scolaire, les bibliothèques, les centres sociaux, etc. Ainsi les Écoles de Halluin et de Wervicq ont réalisé un guide d’achat et un guide sur la citoyenneté ; l’École de Halluin a produit un jeu de société familial sur le passage à l’euro ; l’École de Bousbecque propose des brochures sur la Caisse d’allocations familiales, la Caisse primaire d’assurance maladie, ou encore la Sécurité sociale. Les Écoles de la vallée de la Lys offrent des livrets sur l’héritage et la succession, l’usage du téléphone. L’École d’Aulnoy-les-Valenciennes propose une exposition sur les relations familiales, celle de Wazemmes une exposition sur les relations bancaires, etc.

Notes
361.

La plupart des animatrices sont conseillères en économie familiale.