C. L’hétérogénéité du public

1. L’hétérogénéité des groupes

Les groupes sont relativement disparates, tant en termes de composition que de dynamisme. Ici on dénombre davantage de « jeunes », ailleurs au contraire il y a une prédominance de personnes retraitées. Ici on compte une majorité de personnes bénéficiaires de prestations sociales, ailleurs au contraire il y a essentiellement des salariés. C’est enfin la proportion entre personnes isolées et personnes vivant en couple qui varie370.

L’hétérogénéité au sein des groupes facilite sans aucun doute le processus de médiation. Pour que le groupe devienne un lieu de communication et d’apprentissage de la réciprocité, pour que le groupe joue un rôle de médiation entre la spécificité de chacun tout en assurant une certaine cohésion, une relation de confiance mutuelle est incontournable. Or l’hétérogénéité des membres joue un rôle décisif dans la mise en place d’un climat propice à l’échange. Les échanges sont ainsi d’une grande richesse ; beaucoup relativisent leurs problèmes ; certains ont le sentiment de sortir de leur milieu d’origine, et sont désormais moins « complexés » à l’égard de milieux sociaux qu’ils avaient tendance à juger « supérieurs ». À l’inverse, un groupe trop homogène n’incite guère à la communication et à l’extériorisation ; les personnes ont le sentiment de voir leurs propres problèmes se démultiplier et d’être « enfermées » entre « pauvres »371. La mise en commun des souffrances se transforme en un statut collectif stigmatisant qui bloque tout espoir de dynamique commune. Les personnes se sentent « tirées vers le bas » ; elles adoptent une attitude de distanciation, voire de distinction à l’égard des autres auxquelles elles refusent de s’identifier.

Notes
370.

Toutes ces données sont précisées en annexe 4.

371.

Comme le souligne D. Bondu, à propos d’un travail de médiation sociale envers des jeunes : « de fait, l’homogénéisation des statuts, qui préside généralement au regroupement des publics sur une même opération d’insertion, revient à gommer la réelle diversité des profils et des situations et donc à supprimer toute la richesse humaine que contient l’être ensemble d’une pluralité de personnes, quelles qu’elles soient. Dès lors, le fait que le recrutement d’un groupe soit le résultat d’une opération de catégorisation (on regroupe tous ceux qui sont identifiables institutionnellement comme cas-problèmes similaires) ne peut qu’aboutir à constituer un collectif sériel sur l’unique base d’une identité négative, ce qui renforce l’exclusion commune des participants à l’égard de leur environnement social » [Bondu, 2000, p. 102].