C. Le prêt collectif comme mode de gouvernance

Le prêt collectif apparaît également comme un moyen de remédier aux carences de gouvernance en renforçant le « capital social » des sociétés locales. Banalisé depuis les travaux de James Coleman [1988] et de Robert Putnam [1995], le terme « capital social » fait désormais partie du vocabulaire de la Banque mondiale. L’hypothèse est la suivante : la nature et l’intensité des interactions au sein de la société civile sont un facteur clef des performances économiques et gouvernementales régionales. L’engagement civique est à la base du capital social, que Robert Putnam définit de la manière suivante :

‘« modes d’organisations sociales, telles que les réseaux, les normes et la confiance, qui facilitent la coordination et la coopération pour un bénéfice mutuel » [Putnam, 1995, p. 65].’

Les réseaux sociaux et les normes qui leur sont sous-jacentes jouent un rôle déterminant à la fois d’un point de vue politique, à travers l’efficacité des gouvernements, et économique, via la diminution des coûts de transaction. Le capital social diminue l’opportunisme, facilite la réciprocité et la confiance sociale, considérées comme des « lubrifiants » des transactions politiques et économiques ; il encourage la circulation de l’information, autorisant ainsi une diminution des coûts de transaction ; enfin il favorise la coordination et l’action collective, permettant ainsi une meilleure coopération à la fois politique et économique.

Le principe des banques villageoises, lorsqu’il vise à promouvoir les capacités d’organisation collective, s’inscrit explicitement dans cette mouvance. On suppose que la gestion d’un crédit va renforcer l’interdépendance et la coopération locale. Bien au-delà du prêt, le capital social ainsi créé devrait faciliter les performances économiques futures : directement, en limitant les coûts de transaction et en autorisant la mise en oeuvre de contrats incomplets, et indirectement, à travers l’acquisition de compétences en matière d’auto-organisation.