XXIV - "RIEN SANS PEINE"...

"... J'écris à la hâte quelques lignes pour te dire seulement que plus je vois le bon Maurice, et plus je suis content, satisfait, heureux que ton bonheur lui soit confié. Je suis convaincu maintenant que, tant pour toi que pour nous tous, nous n'aurions pu mieux ou si bien trouver. Hier, après notre bon petit dîner, il est resté seul avec moi jusqu'à minuit et il va sans dire que nous avons parlé de toi. Il désire beaucoup pour ta santé que tu ne reviennes qu'en avril et directement à la campagne ; mais le temps lui dure d'aller te rejoindre1975." ’C'est auprès de sa "bonne, bonne et brave fille", Adélaïde, qu'Arlès-Dufour s'épanche ce soir de 12 février 1853.

En ce rigoureux hiver, il est apparu souhaitable que, malgré ses fiançailles récentes, Adélaïde de constitution délicate reprenne couleurs et vitalité au soleil de la Côte d'Azur. Raoul de Cazenove, à la fois son ami depuis la plus tendre enfance et son lointain cousin, dira d'elle quelques années plus tard : ‘ "Il ne lui manque rien que de la force et de la santé; elle n'a qu'un souffle, et sans les soins tendres et dévoués dont son mari l'entoure, elle ne serait [plus] depuis longtemps de ce monde. C'est une des femmes les plus sympathiques que je connaisse. Avec tout le caractère de son père, elle a la grâce et le charme de sa mère, avec un cœur d'or et une foi vivante. [...] Il y a peu de jeunes femmes avec lesquelles on puisse causer mieux d'autres choses que de banalités."

Quant au fiancé, Maurice Chabrières, bien que de cinq ans plus âgé que lui, il est aussi, ajoute Raoul de Cazenove, l'un de ses meilleurs amis, et bien qu'ayant ‘ "la réputation d'être un peu "blagueur", on ne doit pas prendre à la lettre toutes les histoires de l'autre monde qu'il [...] raconte, mais on peut compter sur son bon cœur et l'amitié qu'il vous témoigne1976."

Dans une nouvelle missive à sa fille, descendue avec sa mère à l'hôtel des Empereurs à Nice, Arlès-Dufour narre les petits détails de son existence quelque peu esseulée : ‘ "Hier, au moment où nous allions nous mettre à table, raconte-t-il à sa correspondante, le gros Gervais et le gras Gustave Delahante sont entrés. En voyant cinq gaillards de cinq à six pouces comme le Père1977, Holstein, Gervais, Gustave et moi, Coraly1978 et Mme Montgolfier n'ont pu s'empêcher de rire et de crier à la dégénérescence de la race." ’La solitude ne semble pas entamer le moral du père et du mari. Pour la combler, son ami Enfantin, lyonnais depuis quelques mois, les favoris rasés avant son arrivée - le faisant ressembler, écrivait-il quelques semaines plus tôt, ‘ "j'ai honte de le dire, à Odilon Barrot1979" ’ - est omniprésent. Justement, le disciple dîne le lendemain chez le maître, en compagnie de Coraly et Holstein, qui, ‘ "avec l'argent de leur cagnotte, [...] nous régalent des Célestins1980 où je ferai mon petit somme en rêvant de vous1981."

L'envie ne lui manque certes pas de rejoindre celles dont il est séparé. Mais il s'est imposé une obligation, celle de mener à bien les projets qu'il a pour sa propriété d'Oullins, en vue du mariage et de l'installation du jeune ménage qui y bénéficiera d'une dépendance : ‘ "Plus je resterai ici, ajoute-t-il dans le même courrier, et plus j'avancerai les travaux de ton jardin. Lundi, on commencera à creuser l'ajouture qui, dans mon imagination, sera charmante." ’ A peu près tous les jours, il se fait mener à Oullins, à sept kilomètres de ses bureaux, pour surveiller les aménagements difficiles à conduire en raison du gel. Le chemin qui monte à la maison ne se fait que lentement faute de bonne terre en quantité suffisante‘ . "Pour l'instant, c'est un peu chantier" ’, prévient-il le 17 du même mois. Il y était encore le matin même, ‘ "par un ciel étoilé et une route craquante", ’ pour être de retour à Lyon à huit heures et demie, et déjeuner, à 9 heures, avec son fils aîné Gustave, "l'oncle Albert1982" [Dufour-Feronce], de passage, comme M. Abeyg, son mandataire de la succursale de Zurich. Sans aucun doute, avec celui-ci, un tour d'horizon complet en est-il fait. Mais il y a tout lieu de supposer que, de plus, est évoquée la question de la "maison du Talhaus1983", située dans cette ville, acquise et figurant dans ses comptes de l'année précédente pour précisément 37.647 F - à titre d'acompte peut-être -, avant d'être estimée 92.000 F les suivantes et 90.000 à compter de l'arrêté au 30 septembre 1859 jusqu'à la fin de ceux portés à notre connaissance.

Décidément, l'année 1852 aura été fertile en acquisitions. En effet, en France cette fois, deux nouvelles1984 - la précédente remontant au 18 mars 1848 - ont eu pour effet de modifier le plan de la maison de campagne de Montroses. Le 27 janvier 1852, un "contre-échange" avec des sœurs de la Congrégation de Nazareth, au couvent de Montléau, à Montmirail dans le département de la Marne, est venu l'agrandir de 86 ares moyennant une soulte de 5.355,36 F. Plus récemment, le 10 décembre, deux corps de bâtiments entourés de jardin, verger, pré et brotteaux, ont complété l'ensemble à proximité du pont, réédifié en 18271985, qui enjambe la rivière l'Yseron, parfois ruisseau, tantôt torrent.

Est-ce par souci de calme, pour s'isoler de la route qui s'ouvre sur le Languedoc, du bruit des chariots, des berlines ou des diligences qui la parcourent ? Ne serait-ce pas plutôt pour un tout autre dessein que le propriétaire songe maintenant à étendre son domaine, à nouveau, en direction de ce pont ? Le nouveau terrain qu'il convoite près de cette construction comprend - outre des "aisances" - lui aussi‘ , "bâtiments, [...], jardin, pré et brotteaux." ’ L'achat de cette parcelle indivise est rondement mené auprès de chacun des vendeurs par actes des 12 mars et 4 avril 1853, contre chaque fois cinq mille francs comptant. De nouvelles tractations verront leur terme, le 5 décembre, pour aboutir à l'échange gracieux avec un sieur Gros (dixième acquisition !) de 1.954 mètres carrés, provenant d'une partie de celui détenu depuis le 27 janvier de l'année précédente, contre 1.618 mètres carrés au nord-est des immeubles de Montroses.

Le futur beau-père est comblé par le choix fait par ‘ "cette jolie nature, fière, gracieuse, pleine de ressort1986" ’, comme il définissait déjà Adélaïde, bien des années auparavant. Maurice Chabrières paraît bien être ‘ l'"homme de cœur", ’ l'‘ "homme capable de travailler1987", ’tant espéré pour sa fille. Négociant, né le 19 janvier 1829, demeurant 13 rue Royale à Lyon, il est le fils d'une famille aisée qui demeure à Crest (Drôme), son lieu de naissance1988. Cette petite ville florissante de 5.000 habitants qui se livre au commerce de la soie est surplombée par un rocher sur lequel s'élève une tour quadrangulaire de l'époque romane. Seul reste d'un château du XIIIème siècle rasé par Richelieu1989, le père de Maurice, Mathieu-Augustin Chabrières, négociant, marié à Fanny Saint-Martin, en est le propriétaire1990. La foi protestante de cette famille ne peut que ravir Pauline qui savoure pendant ce temps un farniente méditerranéen. La jeune promise qu'elle accompagne fait, elle, l'objet, même de loin, des avis attentionnés de son père.

Suivie médicalement par le docteur homéopathe Noack, elle en respecte à la lettre les prescriptions. Avec un soin égal, elle observe les recommandations avisées dans cette science de l'auteur de ses jours, à propos de cette huile prise "avec un courage de spartiate" et qui, croit-il, si elle ne la dégoûte pas, lui fera du bien sans contrarier les remèdes envoyés par le médecin. Mais ce sont aussi des conseils d'avenir, pour son couple, qu'il lui destine : ‘ " [...] Non, mon enfant, si par haute raison, nous nous privons du bonheur de te garder chez nous, c'est pour que tu sois indépendante de tout le monde excepté de ton mari. Et si je me laisse entraîner à te garder un hiver ou deux dans le petit logement Gros1991, c'est que je suis assez faible ou assez bonasse pour penser qu'au commencement de l'indépendance, tu auras peut-être besoin de t'appuyer un peu sur la bonne épaule de la brave mère et sur le cœur du bon père1992." ’ L'entrée dans la famille de ce futur beau-frère, la perspective du mariage, l'animation que le futur événement va créer dans la maison, sont également sources de joie pour Gustave et Alphonse, deux des frères d'Adélaïde, respectivement âgés de 24 et 18 ans, une joie certainement partagée par Armand, leur cadet (11 ans).

"Sacrebleu, Maître, les enfants, c'est un fier souci et un rude boulet ! " ’ Telle est la conclusion désabusée qu'Arlès-Dufour tire, auprès d'Enfantin, du séjour à Lyon de son fils aîné, dans sa seizième année, avant son retour à l'Ecole de commerce de Leipzig en août 1845. ‘ "Nous avions laissé Gustave enfant, il nous est revenu jeune homme, et cependant pas assez jeune homme pour que, avec le plus grand désir d'y parvenir, il m'eût été possible de voir ou d'entrevoir ’ ‘ un peu ce qu'il sera, ce qu'il pourra ou pourrait être. [...] Il est bon, obligeant, bienveillant, inoffensif, mais mou, paresseux, indifférent, facile. Aucune vocation ne se montre, ne perce, ne se laisse soupçonner." ’ Apparemment pas, pas encore du moins, celle de prendre la succession qui lui est destinée... : ‘ "Désireux que je suis de me dégager tout à fait, le plus tôt possible, d'une très grande partie de ma direction commerciale, je serais peiné si Gustave n'avait pas la vocation ou l'aptitude suffisante des affaires, et cependant je m'en consolerais s'il en avait une autre. [...] La mère, non plus, n'est pas contente de son fils, quoiqu'il soit devenu un beau brin de garçon ; il n'y a qu'Adélaïde qui l'a trouvé parfait, adorable1993."

Une nouvelle année - la troisième - de scolarité leipzigoise, de solitude, éclairée de temps à autre de contacts parentaux du côté maternel, débute donc pour Gustave. Le rythme est sévère : chaque matin, lever entre cinq et six heures, et, ‘ "après avoir respiré l'air pur du matin", ’ travail jusqu'à huit heures avant de se rendre à son école, rejointe l'après-midi de deux à quatre heures. Peu d'éléments relatifs à ses études transpirent de ses courriers. Tenue de livres, correspondance commerciale, cours de mécanique et de chimie, telles sont les matières qu'il évoque dans l'un d'eux. Suivant attentivement le conseil de son père, il lit beaucoup en allemand, langue qu'il parle "assez couramment1994". Le piano semble être l'une de ses rares distractions1995, du moins à ce que veut bien en dire ce jeune homme de dix-sept ans. Avec l'approche de l'été et la fin de ses études, son éloignement familial va s'achever, aussi se poser la gestion de son devenir.

Gustave quitte-t-il à nouveau la France, cette fois à destination de Suez, pour se joindre, avec Arthur Enfantin, aux préparatifs de l'expédition et accueillir les diverses brigades étrangères de techniciens1996 ? A peine sorti de l'école, raconte César L'Habitant, son père l'avait fait accepter dans l'entreprise comme interprète parlant les trois langues de chacune des missions concernées. Si ce projet n'eut pas de suite en raison des dissensions existant entre elles, cet auteur ajoute qu’Arlès-Dufour ‘ "se plaisait à citer cet exemple aux jeunes gens comme un encouragement à étudier les langues, études dont on commence enfin à reconnaître l’utilité chez nous1997." ’ Alors, Gustave va-t-il être de retour à Leipzig, cette fois pour y faire, concrètement, son apprentissage "chez Schletter" dans le métier de son père ? Celui-ci l'avait envisagé dans ‘ ses "Instructions pour ma femme en cas de mort" ’, le 11 mai 18431998. Si l'incertitude - Leipzig ou Lyon ? - règne au sujet de cette période transitoire 1846/1848, par contre cette dernière année voit assurément Gustave entrer dans les "affaires".

"Tandis qu'en France tout reste dans un bouleversement général, nous menons ici la vie la plus tranquille et la plus régulière possible", ’écrit-il, le 12 juillet 1848, en formation à Londres grâce aux relations de son père et/ou des Leaf et, de toutes façons, hébergé chez ces derniers. Tout en précisant qu'il fait "tout [son] possible pour apprendre très rapidement l'anglais", il poursuit : ‘ "Je viens tous les matins par l'omnibus, je travaille jusqu'à six heures, soit aux écritures, soit aux étoffes, mais principalement avec Stone qui s'occupe de tout ce qui concerne les ouvriers, puis je retourne passer la soirée chez les Leaf". Le dénommé Stone - sans doute un marchand de soies, associé à un certain Zanzi - l'a convié à un bal costumé, jugé féerique, donné dans un grand théâtre au profit des ouvriers en soie. Toute la noblesse britannique est présente : la reine douairière et "une foule de baronnes et de comtesses portant toutes des couronnes de diamants comme jamais je n'en ai vu [sic]. ’" Le jeune homme est ébloui. De quoi lui donner la folie des grandeurs... Malgré tout, la raison de sa présence londonienne reprend ses droits. Et ce sont les résultats d'une grande vente de soies du Bengale qu'il communique, qualités et prix à l'appui, avec les tendances du marché. En fonction d'elles, il va même jusqu'à regretter une position prise par son père... Une vocation paraît avoir pris naissance, même s'il n'échappe pas au stagiaire qu'il lui reste bien des choses à apprendre1999 ! Après les affections à partager en famille, cette interrogation inquiète : ‘ "Pourquoi Maurice ne m'écrit-il pas2000 ? "

Dès lors, on conçoit que, comme il le confie à Adélaïde en janvier 1853, la nouvelle du mariage de sa sœur avec son ami, Maurice Chabrières, de trois semaines plus âgé que lui2001, lui fait éprouver ‘ "un véritable bonheur [...] dans la réalisation du rêve qui me fut le plus cher, celui de voir unir les deux cœurs que j'aime le plus au monde." ’ La même lettre apprend à Adélaïde que, la veille, il a donné son ‘ "dîner de procuration qui s'est très bien passé, quoiqu'un ’ ‘ peu froid2002." ’ Il avait fait ses tout débuts dans la firme paternelle en 18482003, sans doute peu de temps après son retour de Londres. Et, en ce mois de février 1853, il célèbre son 24e anniversaire en inaugurant son logement - à ce moment, sauf erreur - un chalet parmi les habitations de Montroses. Bouteilles de vin et cigares avaient été demandés à son père pour le double événement2004... Moins arrêté est l'avenir professionnel de son frère Alphonse.

Depuis la capitale londonienne, au cours de l'année 1837, se croyant sur le point de s'embarquer pour le Nouveau Monde, Arlès-Dufour avait analysé auprès de sa femme le comportement de leurs enfants et en avait déduit l'attitude à adopter à l'égard de chacun d'eux‘ . "Je ne parle pas de Titi parce qu'il te tourmentera peu" ’, nous l'avons lu précédemment2005. Il est vrai que "Titi" [François Prosper Alphonse pour l'état civil et, contrairement à ce qui suit, ce dernier prénom sera usité] n'a alors qu'un an et demi. Malgré ce très jeune âge, plus loin, il y revient par le menu : ‘ "Prosper, je tiens à ce nom2006, paraît être plus robuste que les autres, et aussi plus difficile à conduire, moins souple. Il faut bien te garder à chercher à plier sa raideur au niveau de la souplesse des autres. Elle est la conséquence de leur organisation physique, et tu ferais violence à sa nature, ce serait un sacrilège. Dieu ne veut pas que tous les individus soient semblables ; sans quoi, il leur donnerait à tous la même force. Le grand problème, c'est de diriger chacun selon ses dispositions et ces dispositions sont la conséquence, la manifestation de son organisation. Je ne veux pas dire par là que si Titi veut briser, arracher, voler, il faille le laisser faire ; non, il faut l'en détourner sans affectation et donner un aliment à l'activité, un besoin d'agir qui est la conséquence de sa forte organisation. Il faut bien se garder, en lui inspirant de la crainte, de lui ôter la franchise qui accompagne ordinairement les natures comme la sienne."

Quelques années plus tard, le donneur de conseils va devoir, lui-même, les appliquer et déployer des trésors de diplomatie. "Titi" a maintenant dix-sept ans. Il est à Zurich, en stage d'apprentissage, et prévient son père, le 17 juin 1852, qu'il lui faut, "encore une fois", lui causer du chagrin. Il se doit de lui avouer qu'il n'a aucun goût pour les affaires et qu'il se sent une vocation pour... l'agriculture ! ‘ "Je veux piocher ou bêcher comme tout autre", ’ écrit-il, suppliant le destinataire de ne pas le ‘ "forcer d'entrer dans le commerce2007". ’ Par courrier tournant, la réponse est faite, au nom du ménage en proie ‘ à "un profond chagrin". "Non pas que nous n'estimions l'agriculture, sous le rapport du bonheur, de l'utilité, de la considération, au-dessous du commerce. Mais parce que nous nous étions habitués à l'idée que nos trois garçons travailleraient ensemble à conserver et développer les établissements que j'ai successivement formés et que, Dieu aidant, j'espère remettre entre leurs mains en pleine prospérité. Prenant en considération les dispositions, les aptitudes de chacun de vous, nous avions pensé ou rêvé que, peu à peu, Gustave se formerait à la direction générale, que toi, grâce à ta nature liante, tu serais propre aux achats et aux voyages, et, enfin, qu'Armand ferait un jour un excellent chef des caisses et des bureaux2008. Quelque beau que soit ce rêve, je n'hésiterai pas à y renoncer lorsque ’ ‘ moi ’ ‘ ’ ‘ et toi-même ’ ‘ nous nous serons bien convaincus que tu n'exercerais pas le commerce avec plaisir et que ’ ‘ ta véritable vocation ’ ‘ est l'agriculture." ’ Mais cette conviction ne sera acquise, de part et d'autre, qu'une fois terminées, à Zurich, en Allemagne ou en France, les études strictement nécessaires ‘ "pour suivre l'une ’ ‘ et ’ ‘ l'autre ’ ‘ ou ’ ‘ l'une ou l'autre des deux carrières ’ ‘ du commerce et de l'agriculture. ’ ‘ " ’ Et de poursuivre, avec cette hauteur de vue qui caractérise le rédacteur et que ne dément pas le temps présent : ‘ "Ces études préalables pour ces deux carrières sont : 1° les langues française, allemande et anglaise ; je dis anglaise parce qu'à notre époque il faut, en cas de révolution ou d'insuccès, qu'un agriculteur, comme un négociant, soit en état de porter son industrie ailleurs qu'en Europe. Or, les neuf dixièmes du monde civilisé, hors de l'Europe, parlent la langue anglaise. 2° le calcul, la tenue de livres, la correspondance. 3° la chimie, la physique, les premiers éléments de géologie, d'histoire naturelle, et aussi les traits principaux des trois grandes littératures, car aujourd'hui un agriculteur comme un négociant, ne doit être déplacé nulle part. Nous aurons à voir ensemble quel est l'endroit le plus convenable pour acquérir le plus vite, et le mieux possible, ces connaissances indispensables aujourd'hui à tout homme qui a la noble ambition de faire son chemin dans le monde et de figurer dans les premiers rangs de la carrière qu'il embrasse." ’ Commerce ou agriculture ne peuvent être menés à bien, l'un et l'autre, qu'à force d'études, de soins, de capitaux, de soucis. L'époque n'est plus à la vieille charrue, la pioche, la bêche. ‘ "La nouvelle [agriculture], conclut-il, n'est autre qu'une industrie, obligée, sous peine de ruine ou de stagnation, d'être à la piste de tous les progrès, de toutes les découvertes, de toutes les machines nouvelles." ’ A Alphonse de montrer cette lettre à son frère Gustave, justement à Zurich, d'y réfléchir avec lui, avant d'en causer entre père et fils. ‘ "En attendant, mon bon enfant, je prie Dieu de t'éclairer2009."

Dieu, encore si souvent invoqué, ne l'entend pas. Dès l'année scolaire suivante, des études d'agriculture sont en effet entreprises. Mais elles semblent devoir rapidement toucher à leur fin. Le "dîner de procuration" de Gustave auquel Alphonse a été convié semble l'avoir légèrement réconcilié avec le commerce. D'ailleurs, il ‘ "ne veut plus rester à aucun prix à la Saulaie. Tu vois que l'expérience n'a pas été bien longue et j'en suis ravi", ’ commente Gustave auprès de sa sœur. ‘ "Car après tout, poursuit-il, à son âge et sachant aussi peu qu'il sait, il n'a pas de temps à perdre2010." ’ Son père ne s'opposerait pas, bien sûr, à le retirer de cette école et continue d'espérer : ‘ "Si seulement, il voulait entrer au magasin ! Enfin, je le laisse libre, ne voulant pas prendre sur moi la responsabilité d'une vocation forcée. Dieu est grand2011...", ’ écrit-il à Adélaïde. De son côté, Alphonse profite des quelques lignes adressées avec retard à Adélaïde pour tenir leur "chère mère" au courant de l'évolution des choses : ‘ "Nous avons cosé [sic] avec le père sur les études que je dois suivre et plus tard nous verrons si je resterai ou si je quitterai la Saulaie". ’ A sa sœur, pour la complimenter de sa décision matrimoniale, il déclare : ‘ "Maurice est le seul jeune homme dans Lyon qui ait l'air comme il faut ; tous les autres ont une mine de charlatans2012" [sic]...

Telle est l'atmosphère familiale, faite d'inquiétude pour l'avenir de ce second fils, à l'approche du mariage d'Adélaïde. Tracas encore avec le "cousin Arlès" pour la gestion de la succursale de Paris. Excitation enfin, concernant l'homme politique déchu, le poète condamné ‘ "aux travaux forcés littéraires2013", ’ comme Lamartine le dit lui-même. ‘ "Tout va à la diable dans mes affaires", ’ confie-t-il dans une lettre du 22 mai 1853 à Martin-Paschoud. Le pasteur la fait suivre dès le lendemain à son ami, justement à Paris. Voici ce qu'Arlès-Dufour a sous les yeux : ‘ "Actions reculantes ou suspendues. Bourse lavée. Deux banqueroutes. [mot illisible] ma pièce de vin 120.000 F perdus en une nuit. Créanciers pressants, ventes renoncées et absolument impossibles faute d'acheteurs. Maladie croissante et grave, nuits sans sommeil, jours sans repos. Voilà le bulletin. C'est celui de Moskou [sic]. Dieu punit les siens et encourage les autres. Ne ’ ‘ m'attendez plus. Je ne sors qu'avec peine. Je voudrais partir. Je ne peux, faute de 50.000 F. Mes vignerons m'attendent les mains vides ! Quel rêve et ce fut ton destin2014 ! " ’ Martin-Paschoud presse le destinataire du courrier réexpédié à agir : ‘ "N'y a-t-il vraiment rien à faire ? Faudra-t-il laisser Lamartine mourir dans le chagrin et la misère ? Le remords viendrait, n'en doutez pas, pour la France et pour les Français. Tout le monde ne lui doit-il pas quelque chose en quelque manière, l'un pour ses paroles, l'autre pour ses actes ? Et faut-il attendre la tombe pour exprimer de vains regrets ? [...] Quel dommage que vous partiez si tôt. Mais au nom de Dieu, ne partez pas sans vous être concerté avec Girardin [...]" ’ Et Martin-Paschoud de faire appel à l'imagination d'Arlès-Dufour toujours en éveil et déjà sensibilisée à cette détresse : ‘ "Ne serait-il pas possible de réaliser votre idée" ’ qu'il lui remémore : ‘ "souscription nationale et étrangère pour l'acquisition des terres patrimoniales de M. Lamartine, autorisée par le gouvernement : 50.000 actions à 20 F. Comité de direction et de surveillance : Arlès, Girardin, etc. Le premier lot serait Milly ; le deuxième Saint-Point. Montceau [le château familial] serait libre et le pauvre poète y mourrait en paix2015." ’ Malheureusement, tel ne put même pas être le cas... Quelques années plus tard, le journal lyonnais Le Progrès s'indignera à son tour : ‘ "[...] on s'étonnera qu'une nation comme la France ait laissé lutter seul contre l'insolvabilité un homme qui a rendu pendant trente ans tant de services toujours gratuits à son pays et qui a prodigué tant de fois sa fortune et son existence pour couvrir les exigences et les fortunes de tout le monde2016."

Le 18 juin 1853, on se rend, futurs époux et familles Arlès-Dufour et Chabrières réunies, à l'étude de maître Bruyn, notaire à Lyon, pour la signature du contrat de mariage. La dot ou avance d'hoirie de la future épouse s'élève à 200.000 F2017. Elle sera complétée en 1854/1855 de 77.012,85 F très précisément afin d'égaliser avec Gustave, destinataire de cette somme ‘ "pour son travail exceptionnel2018" ’. Selon le même principe d'égalité entre les enfants, au 30 septembre 1856 du Livre particulier, les comptes d'Alphonse et d'Armand, le frère cadet âgé de quatorze ans, auront été crédités de même montant toujours en avance d'hoirie. Ce qui fait écrire, au même moment, au donateur : ‘ "ma fortune s'élève donc au 30 septembre 1856 à ’ ‘ 2.724.000 F quoique j'aie donné en dot ou avance d'hoirie à ma fille 200.000, 200.000 à Gustave, 77.000 à Alphonse, 77.000 à Armand" ’, omettant les 77.012,85 F remis aux deux aînés...

Quatre jours après la formalité notariale, le 22 juin, le jeune couple Chabrières descend solennellement les marches de l'Hôtel de Ville, place des Terreaux, avant de se rendre, à n'en pas douter, au temple du Change pour la cérémonie religieuse. Ils sont entourés de leurs témoins et parents. Les témoins de la mariée sont les plus anciens et fidèles amis de son père : ‘ "Barthélemi [sic] Prosper Enfantin, âgé de cinquante-sept ans, administrateur du chemin de fer, rue de Bourbon," ’et ‘ "René Hyacinte Gauthier Holstein, cinquante-cinq ans, rentier, cours Morand" ’. Le beau-frère de l'époux, Pierre Antoine Roche, quarante-sept ans, juge de paix, demeurant à Crest, et son oncle, Maurice de Saint-Martin, soixante-trois ans, rentier demeurant au Havre, sont ceux de Maurice Chabrières. Sur l'acte, on reconnaît les signatures des mariés, de leurs parents et témoins, des frères d'Adélaïde, d'Adélaïde Dufour2019, d'Isabelle Fitler, sans pouvoir mentionner les autres, illisibles. Modeste habituellement, mais soucieux pour la circonstance de faire honneur à sa fille unique et affectionnée, l'heureux père ne manque pas d'exciper de son récent titre de conseiller général. Ni des autres d'ailleurs, à savoir ‘ "négociant, chevalier de la Légion d'honneur2020, membre du Conseil général du département du Rhône et de la Chambre de commerce de Lyon, Secrétaire général de la Société pour l'Instruction élémentaire de ce département2021." ’ Cette dernière charge s'est depuis peu alourdie. Par arrêté du 20 décembre 1852, le préfet a confié à cette Société l'administration, sous son autorité, de toutes les écoles communales laïques de garçons et de filles et de celles d'adultes des deux sexes de l'agglomération lyonnaise2022...

Un nourrisson ne tarde guère à profiter de l'air pur et frais de la colline bordée par l'Yzeron et à animer la maison du jeune ménage, en contrebas de celle des grands-parents, demeurant alternativement à Oullins et à Lyon, au 19 Port Saint Clair2023. C'est un garçon ! Le grand-père aurait cent fois préféré une fille, peut-être pour retrouver les charmes d'Adélaïde enfant. ‘ "Quoique ce soit un boy, regrette-t-il ouvertement, que Dieu soit béni de cette heureuse ’ ‘ délivrance qui ne délivre pas seulement la bonne et brave petite, mais aussi un bon mari, ses deux mères, moi et toute la famille2024." ’ C'est à Cannes qu'il apprend - apparemment - la bonne nouvelle, de retour d'une journée passée avec ses amis Reynaud, l'ancien prédicateur saint-simonien, à Paris et à Lyon, et l'homme d'état britannique, Richard Cobden, l'un des champions d'Outre-Manche du libre-échange.

Un autre courrier de Cannes, tout aussi incomplètement daté, fait état d'une nouvelle rencontre prévue, un dîner, avec Cobden ‘ "chez M. de Bunson [?]". ’ Le matin même, il a cueilli des fleurs d'orangers dans l'ancien jardin de Rachel au Canet, un ‘ "endroit plus habité encore que Cannes, mais aussi beaucoup plus triste." ’ Et en visitant avec Reynaud, le jardin d'un de ses amis de Paris, il a fait la connaissance d'un couple, précédemment employé aux pépinières impériales de Versailles, ‘ "travaillant comme si les maîtres y étaient." ’ Il se propose de les faire venir à Oullins en cas de changement de jardinier. ‘ "Tu vois, conclut-il dans cette lettre à Pauline, que, de loin même, je n'oublie pas le ménage". ’ Malgré la neige qui saupoudre l'"Estérelle" [sic] entraînant un retard dans le service des diligences, il espère être de retour le 25 ou le 26. Le fait que le lendemain, lorsque la lettre est reprise, ‘ "le soleil persiste et [qu'] on porte ombrelles et chapeaux de paille", ’ ne change rien à cette résolution... Mais il est bien troublant de lire, dans le même courrier, cette remarque, pourtant bien dans la ligne de ce qu'écrit précédemment : ‘ "La description de bastien [sic] me donne un grand désir de l'embrasser bientôt quoique garçon2025" ! ’ D'où vient notre étonnement ? C'est que, le 9 avril 1854, se présentaient à la mairie d'Oullins trois comparants pour déclarer la naissance, survenue la veille à midi, dans cette commune et au domicile du père, d'un enfant de sexe masculin prénommé Auguste François Ferdinand, à savoir : Maurice Chabrières, le père, négociant, demeurant à Oullins, âgé de vingt-six ans ; Pierre Lortet - le docteur, fidèle ami d'Arlès-Dufour - soixante-deux ans, propriétaire, demeurant à Oullins, et, les accompagnant, ‘ "le grand-père à [sic] l'enfant", "âgé de cinquante-six ans2026", ’... M. Arlès-Dufour dont la signature ne laisse pas le moindre doute !

En 1854 également, une autre gestation vient à terme à Montroses, celle d'une idée qui chemine depuis quelque temps dans l'esprit de son auteur, le propriétaire des lieux. A un destinataire et à une date - "Lyon le 25" - malheureusement inconnus, Arlès-Dufour adresse ses remerciements pour des renseignements donnés ‘ "sur les terrains propres aux constructions ouvrières." ’ ‘ "Le prix de 1000 F pour l'hectare serait certainement très modéré, estime-t-il, et permettrait de tailler largement ; mais je ne crois pas que le courant de l'émigration dans la banlieue se porte de ce côté et je sais par expérience combien il est ingrat et difficile d'aller contre le courant, même pour faire le bien. Il faut, je crois, laisser passer ou calmer la fièvre qui s'est portée sur les terrains situés sur la rive gauche du Rhône et attendre un moment plus favorable. Recevez, Monsieur, mon cordial salut2027."

Se pencher sur la misère et tenter de la vaincre en accordant temps et secours, telle a été jusque là l'action philanthropique à laquelle Arlès-Dufour s'est constamment consacré. Elle est estimée incomplète au regard de la pénurie de logements ouvriers, d'une part, de leur insalubrité, d'autre part. Ainsi que le fait remarquer Yves Lequin, une politique de l'habitat populaire fait totalement défaut dans l'agglomération lyonnaise au cours de cette période de développement industriel2028. La construction s'avère insuffisante par rapport à la démographie et les loyers atteignent des prix élevés. Dès lors, la raison de l'acharnement mis dans la poursuite d'achats de terrains dotés de "bâtiments", à proximité du pont d'Oullins, devient évidente. L'objectif est d'autant plus altruiste qu'il ne s'agit pas, pour Arlès-Dufour, de loger des ouvriers pour les fixer puisqu'il n'en occupe pas personnellement - comme les Koechlin ou les Dollfus de Mulhouse - mais bien de sacrifier une partie de son terrain, à proximité de la Grande Rue et en dessous du "cottage" du ménage Chabrières, pour l'affecter à l'amélioration du bien-être des travailleurs. La page récapitulative, intitulée "propriété d'Oullins", de son Livre particulier nous renseigne à ce propos : ‘ "En 1854, les bâtiments de la rivière sont transformés en cité ouvrière, moyennant une dépense de 34.000 qui, ajoutée à la valeur des vieux bâtiments, en fait une propriété valant 55.000 à 60.000 et louée au "Grand Central2029" pour ’ ‘ douze ans à 2.700, impôts et réparations à la charge du locataire. L'acte d'échange avec M. Gros2030 est déposé chez Duchamp, notaire."

Cette cité ouvrière représente, cette année là, environ 30% de l'estimation du reste de sa propriété (160.000 F) et le placement rapporte tout de même plus de 5%2031. Mais, comme le dit, Mgr de Bresillac, évêque de Pruze, en visite à la Cité de l'Enfant-Jésus : ‘ "A Dieu ne plaise que nous voulions dire qu'il faut faire une bonne oeuvre pour en tirer bénéfice. Mais, si c'est là un nouvel élément de force, pourquoi ne pas l'employer2032"... ’ A propos de la Cité de l'Enfant-Jésus justement, malgré l'investissement d'Oullins, Arlès-Dufour, compatissant au sort des sinistrés des grandes inondations de 1856, n'hésitera pas un seul instant à venir en aide au futur prêtre Camille Rambaud2033 en souscrivant 2.000 F aux obligations émises en leur faveur2034. Quant à la valeur de sa cité ouvrière d'Oullins, invariablement estimée 50.000 F alors que son coût est de 55.000 F, elle chute à 40.000 au dernier arrêté du 30 septembre 1862 en notre possession. Est-ce déjà, à quatre ans de la fin de la convention, le signe de l'échec de la tentative, souligné par Yves Lequin2035 ?

Quelque soit le sort de cet investissement essentiellement désintéressé, au moins avons-nous l'avantage d'en connaître la destination. Par contre, cet autre de 50.000 F, effectué à la même époque et relevé dans le mémento financier, entre les 30 septembre 1854 et 1856 inclus, sous l'appellation "Capital Chaussée d'Antin2036", demeure quelque peu énigmatique. S'agit-il d'une mise en réserve de fonds en vue de la construction du futur siège de la Compagnie de Suez2037, d'une participation à une société immobilière dans ledit quartier, ou encore de l'achat d'un immeuble où transférer la succursale parisienne ? Les questions demeurent posées, même si cette dernière supposition paraît en définitive la plus vraisemblable. Effectivement, au 30 septembre 1957, l'écriture relative à la Chaussée d'Antin disparaît pour faire place l'année suivante à cette autre : "Immeuble de Paris 500.000 F2038".

L'adresse exacte nous en est fournie, pour la première fois, par une circulaire que le nouveau propriétaire diffuse le 1er mars 1857. Attentif depuis des années à la carrière de ce compositeur saint-simonien, toujours jaloux de sa réussite, Arlès-Dufour organise une souscription de 60.000 F en faveur de Félicien David, afin de le délivrer ‘ "du souci du pain quotidien, et lui permettr[e] de se livrer en toute liberté d'esprit et de cœur aux travaux de sa vocation. Si Mozart, Haydn, Beethoven, Weber n'avaient pas trouvé des protecteurs généreux, ils seraient morts de faim et beaucoup de leurs oeuvres qui en ont inspiré tant d'autres et font encore nos délices, n'auraient pas vu le jour. [...] Si vous partagez le sentiment qui inspire ma démarche, est-il conclu, veuillez me dire, en réponse à cette lettre pour quelle somme vous désirez être compris dans cette souscription et en verser le montant à ma maison, rue du Conservatoire2039." ’ Au n° 11, est la nouvelle adresse du siège parisien de sa succursale. Un quartier, proche de celui du Sentier et de la rue des Fossés-Montmartre (actuelle rue d'Aboukir), plein du souvenir de ses débuts difficiles, non éloigné non plus du Conservatoire des Arts et Métiers de la rue Saint-Martin où la vocation du libre-échange allait lui être insufflée par Jean-Baptiste Say, un maître en la matière...

Mais qui dit échange, dit transport et, pour tout ce qui touche au commerce de la soie, plus précisément transport par mer.

De retour d'Egypte, reclus à Curson, désemparé, angoissé pour son avenir, sans complexe pour autant, Enfantin adresse au roi, le 26 mars 1837, une respectueuse et interminable exhortation2040. Il s'y risque même à suggérer des "dérogeances aux habitudes du passé" pour les fils du souverain, les ducs d'Orléans et de Nemours et le prince de Joinville. A l'intention de celui-ci, il écrit : ‘ "Que Monseigneur le prince de Joinville inspecte la nouvelle ligne de communication à vapeur de la Méditerranée ; qu'il installe celle qu'il faut établir avec l'Amérique, et qu'il ait près de lui des hommes au fait des intérêts commerciaux qui unissent les ’ ‘ peuples2041." ’ Au moment où la machine à vapeur tente de s'appliquer à la navigation, la question des liaisons maritimes est, en effet, de plus en plus à l'ordre du jour.

Le 24 janvier 1839, la Chambre de commerce de Lyon prend connaissance avec intérêt du rapport de Wurstemberg, député de la Gironde, sur le projet d'établir, entre Bordeaux et New-York, un service de paquebots à vapeur. Sa satisfaction est d'autant plus grande que ce document, exprime la Compagnie consulaire, ‘ "a, pour notre place, une spécialité d'intérêt qui nous fait hâter de tous nos voeux le moment où l'entreprise qui en est l'esprit pourra définitivement se réaliser2042." ’ L'année précédente, quatre steamers britanniques avaient traversé l'Atlantique et cette année-ci (1839) allait être fondée la société, ancêtre de la Cunard Line2043. Le 30 janvier 1840, force pour l'organisme consulaire est d'enregistrer ‘ "la marche rapide et très ascendante dans le progrès de sa navigation à vapeur" ’ que suit l'Angleterre grâce à ses compagnies fortement organisées. Aussi se prononce-t-elle, à l'instigation de son homologue de Marseille, au profit de la liaison Marseille - Nouvelle Orléans, y voyant un facteur d'accroissement possible de sa prospérité manufacturière au détriment de l'Angleterre2044. Deux ans plus tard, une nouvelle rivalité transatlantique se dessine. Lors de la délibération du 12 mai 1842, "un membre" (Arlès-Dufour ?) la dénonce, ainsi que le préjudice que peut encourir le commerce français et spécialement la fabrique lyonnaise : l'établissement à Anvers d'un service de paquebots à vapeur à destination de New-York2045. Alerté, le ministre du Commerce assure que rien ne sera négligé pour hâter l'établissement de la ligne de bateaux à vapeur destinée à desservir New-York au départ du Havre et consacrée par la loi du 16 juillet 18402046.

Enfin, en 1844, est mise en activité une ligne de paquebots, non pour cette destination mais entre Marseille et Alexandrie2047. En direction de ce bassin méditerranéen qui l'attire inlassablement, Enfantin affiche justement des ambitions quelque temps plus tard. Il les dévoile à son "opposant filial2048", au moment où l'on sait2049 qu'Arlès-Dufour est fort loin de partager l'admiration de Lamartine pour le journal Le Crédit, et aussi celle du "Père" pour Cavaignac2050. Voici ce qu'écrit Enfantin : ‘ "Vous rêvez pour moi, et par moi, des choses qui vous semblent de fort grandes choses, et voilà pourquoi vous qualifiez un peu légèrement X, chez qui j'ai dîné avant-hier avec Cavaignac ; N, chez qui j'ai rencontré hier encore Cavaignac et Bartholony, et qui n'est pourtant pas lui-même un homme sans influence sur les affaires de chemins [de fer], de mines, de transports, de banques et de crédit ; les messagistes avec lesquels je complote l'affaire des bateaux à vapeur de la Méditerranée, c'est-à-dire l'affaire sœur du Lloyd autrichien et de la Compagnie péninsulaire anglaise, avec lesquelles sœurs l'affaire de Suez et celle d'Orient seront des amusettes pour nos vieux jours ou pour nos enfants2051 ! "

Mais dans ce domaine, au plan national, les choses suivent leur petit bonhomme de chemin, en raison de la modicité des subventions et du faible intérêt de l'Etat porté à la marine, tout au moins marchande2052. Le transport maritime va-t-il profiter du même zèle que celui apporté par le gouvernement impérial au transport par voie ferrée ? La décision en est fâcheusement différée sous le fallacieux argument ‘ "de récentes découvertes [...] laiss[ant] entrevoir la possibilité de réduire dans une forte proportion la consommation du combustible [...]2053".

Heureusement, le 18 novembre 1852, un décret a autorisé la Société générale du Crédit Mobilier dont le but, pour leurs fondateurs saint-simoniens, les frères Pereire, est de soutenir et même d'imprimer la plus vive impulsion à l'industrie, au commerce et aux travaux d'intérêt public. Pour les promoteurs de la voie ferrée Paris-Saint-Germain, pour les adversaires malheureux des frères Talabot avec leur Lyon/Avignon et Avignon/Marseille, pour ceux qui dominent, par contre, notamment dans les réalisations ferroviaires du nord et du sud-ouest, ‘ "le navire prolonge un pays et, en quelque sorte, l'étend sur l'eau2054", ’ selon la jolie formule de Roger Vercel. Le 24-25 février 1855, Isaac Pereire, président du conseil d'administration du Crédit Mobilier, et Adolphe d'Eichthal, vice-président et ancien président du Paris-Saint-Germain, signent l'acte constitutif de la Compagnie Générale Maritime2055. Les statuts de cette société sont approuvés, le 2 mai suivant, par l'Empereur, aux Tuileries, sous la signature de Rouher, ministre secrétaire d'Etat de l'Agriculture, du Commerce et des Travaux publics. Grâce à "neuf navires en fer, à hélice", cette Compagnie se propose de relier, directement et chaque semaine, les Etats-Unis, certains en onze jours, d'autres en quatorze, selon leur tonnage et leur puissance. Le Brésil, quant à lui, serait rallié deux fois par mois2056.

Les exportateurs français ne peuvent que se féliciter de cette initiative, prometteuse d'un considérable gain de temps et d'argent, et, parmi les soyeux lyonnais, l'un de leurs plus importants commissionnaires en particulier. Aussi, malgré l'inauguration récente de l'Exposition universelle, celui-ci n'hésite-t-il pas à abandonner, le 11 juin, son fauteuil de Secrétaire général de la commission, afin de participer à la première assemblée générale de la nouvelle compagnie. Là, il retrouve ses amis Adolphe d'Eichthal, président du conseil d'administration, Isaac et Emile Pereire, ce dernier qu'il vient peut-être de quitter puisqu'il siège au sein de ladite commission. Les statuts adoptés, il est procédé à l'élection des dix-neuf membres du conseil d'administration. Arlès-Dufour est du nombre et devient ainsi administrateur-fondateur de la Compagnie Générale Maritime2057, la future Compagnie Générale Transatlantique2058, aux côtés de Benjamin Delessert et de Mathieu Dollfus notamment. L'assemblée générale étant formée des possesseurs de vingt actions ou plus (chacune de 500 F), selon l'article 41 des statuts, le nouvel administrateur ne peut qu'en être porteur pour figurer parmi les quarante-trois présents2059. Effectivement, son "Livre particulier" consigne, sous la seule mention de "Maritime" qui ne laisse pas de doute cependant, une souscription de 25.000 F en contrepartie de 100 actions2060. Administrateur éphémère apparemment et au risque de décevoir ses amis, il se libère de cet engagement au cours de l'année qui suit. Perçoit-il déjà les difficultés qui se feront jour, sous peu, dans l'entreprise ?

Quant à la formulation de Roger Vercel, dédiée plus haut aux frères Pereire, elle peut tout aussi bien l'être à l'adresse de leurs rivaux directs, les frères Talabot. Ceux-ci souhaitent, en effet, trouver dans la modernisation du port de Marseille et l'aménagement des nouveaux docks un prolongement naturel et puissant à leurs entreprises ferroviaires débouchant dans cette ville. Paulin Talabot, ingénieur en chef des Ponts et chaussées et directeur de la Compagnie Paris-Lyon-Méditerranée, y travaille. Il réussit à passer, le 14 octobre 1856, avec la ville de Marseille un traité de "rétrocession" du dock de la Joliette2061. Le commerce grandissant avec l'Algérie, l'exploitation de mines de fer déjà entreprise sur ce territoire par les Talabot, la perspective du canal de Suez - même s'il sait maintenant qu'il n'en sera plus l'artisan direct - et, par voie de conséquence, les facilités accrues d'importation des soies d'Extrême-Orient ne peuvent qu'inciter le commissionnaire lyonnais à prendre aussitôt ses marques auprès de la société préparatoire.

Constituée dès le 20 septembre de cette année, elle réunit autour de Paulin Talabot, Emilien Rey de Foresta, administrateur des Chemins de fer de Lyon à la Méditerranée, Ernest Simons, administrateur de la même compagnie ainsi que du Service maritime des Messageries impériales, et Armand Béhic, lui aussi dirigeant de ces Messageries, président des Forges et chantiers de la Méditerranée (et futur ministre des Travaux Publics)2062. A cette société préparatoire, future Compagnie des docks et entrepôts de Marseille dont l'officialisation sera consacrée par décret du 23 février 1859, Arlès-Dufour souscrit 50 actions (10.000 F), puis 100 en 1858-18592063. Son influence n'y sera point négligeable. Au passage, mentionnons l'embauche en 1861 de l'ancien capitaine Giraud comme chef de service des mouvements maritimes ; il l'obtient, toujours préoccupé du service à rendre, de Talabot et du Lyonnais Jacques Breittmayer, premier directeur de la Compagnie2064.

De retour de l'assemblée générale historique de la Compagnie Générale Maritime, Arlès-Dufour reprend le cours de ses harassantes activités à l'Exposition universelle de 1855. Depuis l'inauguration du Palais de l'Industrie par l'Empereur, un mois avant, on emporte encore les "dernières planches", et ‘ "une fièvre d'activité et de patriotisme [...] transforme, de la veille au lendemain, les places vides en places occupées et les cases nues en étagères chargées de produits.". ’ Tel est le constat dressé par le journaliste Ch. Magne, le 16 juin 1855, de l'état présent de ‘ "ce grand concours de l'intelligence humaine2065". ’ La réussite sera néanmoins au bout de ces efforts.

La position éminente occupée dans l'organisation de l'éclatante manifestation internationale est faite pour séduire celui qui est toujours friand de contacts humains. Les occasions de connaissances et de fréquentations sont multiples et variées : les exposants nationaux et étrangers, les membres de la Commission eux-mêmes, les artistes reconnus (Ingres, Delacroix) qui en font partie, ou encore ceux qui viennent soumettre leurs créations à l'appréciation du public. On se souvient, en effet, qu'un décret impérial avait étendu l'exposition aux Beaux-Arts. Barbedienne présentant ses bronzes inimitables est du nombre2066. C'est apparemment dans le même cadre qu'est faite la connaissance du sculpteur François Félix Roubaud2067 et la réalisation d'une statuette en bronze à son effigie commandée à cet artiste2068. Aux dimensions de 20 X 20 X 70 cm (haut), elle représente Arlès-Dufour en pied, posant une main sur d'épais volumes sur lesquels figurent successivement les noms de Cobden, [Saint-]Simon, Enfantin et Hahnemann : quatre noms qui ont jalonné ou jalonnent encore sa vie ! Peut-être, une occasion fortuite avait-elle été aiguillonnée par Pauline et sa tradition familiale et non, en aucun cas, par un quelconque culte de la personnalité cultivé par le personnage reproduit. Déjà, en 1826, jeunes mariés fraîchement arrivés à Lyon, ils avaient, l'un et l'autre, séparément, posé devant le chevalet de Jean-Marie Régnier2069. Plus tard, ‘ "par son ami Régnier, Arlès-Dufour en 1860" ’- selon la marque portée sur la toile de 1,350m de haut et 1,035m de large - cet artiste, quelques années avant sa mort, exécutera le portrait à l'huile du récent commandeur de la Légion d'honneur, cravate de cet ordre en sautoir, assis, dans l'attitude d'un homme qui vient d'écrire, près d'une table recouverte de diverses décorations rapportées des expositions universelles2070.

A l'exception de ces toiles, l'artiste, à notre connaissance du moins, n'immortalisa pas d'autres traits familiaux. Tel aurait pu cependant être le cas des deux premières belles-filles d'Arlès-Dufour. En effet, Gustave suit, trois ans après, l'exemple de sa sœur et se marie à Paris (ou Versailles), le 12 juin 1856 à Lucy Martin-Paschoud2071, la fille du pasteur de l'Eglise réformée de Paris, un homme que, bien que d'église, Arlès-Dufour porte en son cœur. Du jeune marié âgé de 27 ans, Raoul de Cazenove dit, sévère et prématurément : ‘ "Gustave est loin d'avoir les mérites de son père ; c'est un homme paisible et bon, sans beaucoup plus" ’, avant d'ajouter à propos du ménage ‘ : "J'aime à les croire heureux ; on les voit rarement, elle a été souvent malade2072."

Quant à l'apparition de la seconde belle-fille, elle est à l'évidence l'un des résultats des séjours leipzigois d'Alphonse, finalement entré au service de son père. Celui-ci n'avait pas ménagé sa peine pour tenter de l'intéresser à son métier. Il lui avait d'abord procuré un stage à Londres en 18542073, puis, l'année suivante, un autre dans la capitale saxonne, en le confiant aux bons soins du cousin Dufour-Feronce. Les nouvelles reçues "sur sa bien bonne mine" étaient fort satisfaisantes. ‘ "Je vois avec plaisir, assurait le cousin, qu'il prend du corps et que son teint est clair et annonce une bonne santé2074". ’ Et pour cause... Dans la même ville de Leipzig, le 3 août 1858, est célébré le mariage d'Alphonse et d'Annette Louise Hedwig Fuss-Seillier, née le 26 juillet 1840 à Schönebeck/Elbe2075. La veille, un contrat de mariage devant le bailliage judiciaire de Leipzig était intervenu. Par cet acte, Alphonse recevait en avancement d'hoirie de ses père et mère, présents, une somme de 160.000 F sur la succession du prémourant des donateurs et la propriété dépendant de la communauté de 3 hectares environ à Oullins, d'une valeur de 40.000 F. Le chroniqueur de la société lyonnaise Raoul de Cazenove, poursuivant, d'octobre 1858 à mai 1859, la rédaction de ses Notes, commente, toujours ‘ "à l'usage exclusif de Lucie de Marveille ’", sa fiancée : ‘ "Le second des trois fils - dont le cadet Armand est encore à ses études - a fait l'an dernier [en 1858] un mariage de vive inclination très partagée avec Melle Sellier [? officiellement Fuss], de Leipzig. Ils n'avaient pas 40 ans à eux deux2076, c'était un peu jeunes commencer la vie [...]2077."

Si le père est désormais rassuré sur l'avenir professionnel d'Alphonse, sur la précocité de ce dernier événement matrimonial, nous ignorons sa réaction. Dans un tout autre domaine, une idée à peine réalisée lui tenant fortement à cœur, il en mûrit une autre. De la première de ces idées, son fils Armand, âgé de quinze ans, en porte témoignage2078. Depuis le 3 novembre 1857, avec treize autres élèves, il fréquente l'Ecole Centrale Lyonnaise qui vient d'ouvrir ses portes au n° 19 du quai Castellane (futur quai des Brotteaux et actuel quai général Sarrail), à l'angle de la rue d'Enghien (actuelle rue Vauban). Trois ans après, il fait partie de la première promotion, celle de 1860, avec le titre d'ingénieur, et y figure en tête de liste2079. ‘ "Armand ’ ‘ Arlès-Dufour ouvre la marche selon l'ordre alphabétique et c'est aussi stricte justice. Ainsi l'Ecole voit à ses commencements le père, premier fondateur, et le fils, premier élève" ’, écrit Auguste Jouret à l'occasion du centenaire de l'Ecole2080.

Au fil du temps, la renommée de l'école de la Martinière s'est étendue au plan national. En 1837, Enfantin ‘ "dési[rait] beaucoup pour lui [son fils Arthur seulement âgé de dix ans] deux années de la Martinière2081." ’ Des délégations officielles la visitent, certains souhaitent en créer de semblables, tel Michel Chevalier à Paris et à Reims2082. Conçue dès son installation par Tabareau, ancien officier du génie, comme une école d'apprentissage, ‘ "cette institution gratuite, destinée à répandre l'instruction primaire scientifique dans la classe ouvrière2083" ’, s'adapte progressivement au développement industriel. Le neveu de Tabareau, Désiré Girardon, l'un des éminents professeurs de l'école - également enseignant à l'Ecole de Beaux-Arts de Lyon et ‘ "au cours municipal annexé à la Faculté des sciences2084" ’ - s'y emploie, non parfois sans difficultés avec la commission administrative de l'établissement2085.

Qui d'Arlès-Dufour ou de Girardon eut l'idée de créer une école de formation d'ingénieurs ? Posant la question, tout en spécifiant qu'il s'agit d'un détail, Auguste Jouret quelques pages plus loin désigne le premier2086. Le 3 juillet 1857, Arlès-Dufour informe Enfantin de ses projets : ‘ "Je vais réaliser mon vieux rêve d'une Martinière bourgeoise que j'appellerai probablement l'Ecole Centrale lyonnaise de l'Industrie et du Commerce2087" ’ Trois jours après, il précise auprès du même qu'il s'agira d'une "Martinière supérieure" où seront formés les meilleurs sujets de la Martinière. ‘ "Mon école a été recrutée en un tour de main à la surprise de ceux qui connaissent nos bourgeois. Il est vrai que j'ai dit qu'il fallait créer l'école des officiers de l'Industrie dont la Martinière ferait les sous-officiers2088."

Une "Martinière supérieure" que les progrès de l'industrie exigent en matière d'enseignement technique pour la formation d'ingénieurs ? Tel n'était pourtant pas l'avis de certains. Témoin, cet extrait de discours de Thiers, du 13 février 1850, au sujet de cet enseignement : ‘ "C'est le genre d'établissement que je déteste le plus au monde. Les écoles professionnelles, animées d'un esprit détestable, ne sont bonnes qu'à faire des petits Américains de leurs élèves ; écoles polytechniques au petit pied, elles en auront tous les défauts, même en les exagérant, sans les compenser par des avantages. [...] J'aime mieux qu'on ait parlé aux enfants de Scipion et de Caton que de triangles et d'équerres2089." ’ Un nouveau point d'opposition entre Thiers et Arlès-Dufour, après celle du ministre du Commerce et des Travaux publics à l'égard de l'impôt progressif, après ses préventions contre l'utilité du chemin de fer - au retour de sa visite en 1834 de celui de Liverpool à Manchester2090 -, après ses "assertions économiques" scandalisant son visiteur au risque, pour celui-ci, de devenir "grossier2091", après enfin sa dénonciation du principe de l'association comme utopique2092... Cependant, l'avis péremptoire du ‘ "petit homme taillé en force par la nature" ’ - ainsi que Lamartine l'avait décrit, et comme justement le rappelle, quelques semaines plus tôt, l'hebdomadaire Le Passe-temps2093 - lui importe peu. Tout d'abord, il a songé à créer, seul, une école supérieure de la Martinière. ‘ "Mais, ajoute-t-il, j'ai vite compris que, d'abord, mon nom tout seul serait un épouvantail pour l'Université et qu'ensuite, l'affaire étant mienne, j'éprouverais le besoin de m'en mêler, d'autant plus que je rêve depuis longtemps d'un ensemble d'études pratiques qui, appliqué rigoureusement, nuirait probablement au succès2094."

Aussi, le 21 août 1857, en l'étude de Maître Vachon, notaire à Lyon, est signé l'acte constitutif de la ‘ "société en nom collectif pour M. Girardon, seul associé gérant responsable, et en commandite seulement pour chacun des autres" ’. La raison sociale de cette société est "Girardon", son siège à Lyon. ‘ Elle ’ ‘ "a commencé le 15 juillet 1857 et finira le 31 août 1875" ’ et a pour objet : ‘ "la création et l'exploitation d'un établissement destiné à l'enseignement des sciences industrielles, basé essentiellement sur les méthodes de l'Ecole de la Martinière et ayant pour dénomination Ecole Centrale Lyonnaise pour l'Industrie et le Commerce. Il est prévu également que Girardon, en qualité de directeur de l'établissement, "ayant droit à une levée de 6.000 F par an, au logement, au chauffage et à l'éclairage", "gérera seul les affaires de la société" ’. Les statuts prévoient en outre ‘ "qu'il pourra être désigné un conseil de patronage et d'étude" ’ au but ‘ "uniquement scientifique, d'émulation et honorifique." ’ Chacun des vingt commanditaires verse une somme de 5.000 F. Parmi leurs noms, on relève, bien sûr, ceux d'Arlès-Dufour et de Désiré Girardon, mais aussi de Jean Thomasset, rentier, Clément Desorme, ingénieur civil, Henri Germain, propriétaire, Joseph Ancel, ingénieur civil, Jules et Antoine Vachon, négociants, Adolphe Girodon, négociant, Louis Guérin, négociant, Prosper Dugas, négociant, Jacques Brettmayer, négociant, etc.

Seule de l'espèce en France, existe jusqu'alors l'Ecole Impériale Centrale des Arts et Manufactures. Elle est placée sous la direction d'Auguste Perdonnet, ‘ "un vétéran des chemins de fer2095", ’ comme il se définit lui-même. C'est également un vétéran du saint-simonisme2096, libéral et philanthrope, et un ami d'Arlès-Dufour : ‘ "Notre bon et brave Perdonnet2097", ’ dit-il de lui à ‘ "[s]on brave Bey" ’ Lambert. Evidemment, l'Ecole centrale est installée à Paris. Aussi, à propos de l'Ecole centrale Lyonnaise récemment créée, l'Annuaire de Lyon de 1860 insiste sur la facilité donnée aux familles lyonnaises et à celles des départements voisins ‘ "de procurer à leurs enfants un enseignement scientifique [...] qu'elles ne pouvaient obtenir jusqu'ici qu'au prix d'une séparation et d'un isolement trop souvent dangereux2098." ’ Quant aux matières du programme, on croirait presque relire l'énumération des matières rigoureusement indispensables prônées par le père d'Alphonse...

Toutefois, l'Ecole connaîtra diverses vicissitudes financières, en raison surtout de son loyer trop onéreux, de frais de scolarité modestes de 600 F par an2099, d'un effectif réduit d'une soixantaine d'élèves fréquentant l'établissement en 18902100. Le capital social s'avère insuffisant, une première fois, dès 1860. Chaque commanditaire est amené à verser un complément de 2.500 F. En 1867, il doit être fait appel à neuf nouveaux commanditaires dont Raoul de Cazenove, rentier, Félix Mangini, ingénieur, et le sénateur Edmond Réveil. Leur participation individuelle de 7.500 F leur confère le titre de fondateur. Les subventions accordées par la ville et le Conseil général depuis 1866, chacune de 2.800 F, s'avèrent hélas insuffisantes2101. Arlès-Dufour espére-t-il un concours financier, cette fois gouvernemental, grâce à l'appui de Michel Chevalier ? De Lodève, le 14 janvier 1868, celui-ci répond : ‘ "Cher ami, Je suis venu dans ce pays pour le Conseil général [...] Une fois à Paris, je m'occuperai de votre Ecole centrale. Duruy [ministre de l'Instruction publique] est bien pauvre. A vous de cœur2102." ’ L'année suivante, une nouvelle société succédant à la "société Girardon" doit être créée sur décision d'Arlès-Dufour et d'Ancel2103. Tous deux rédigent cette déclaration : ‘ "L'assemblée reconnaissant qu'il est d'un intérêt réel pour la ville de Lyon de ne pas laisser disparaître un établissement aussi utile, reconnaissant aussi qu'il y a lieu d'espérer qu'avec des réformes et des économies, on pourrait en assurer la marche et le développement, est d'avis de reconstituer une nouvelle société2104 avec l'actif non absorbé de la société primitive, nomme à cet effet, en lui donnant les pouvoirs les plus amples, une commission provisoire composée de MM. Arlès-Dufour, Girodon, Monnier, Piaton, Ancel et de Cazenove." ’ Le premier nommé en est le président2105.

Face à ces nombreuses difficultés budgétaires, il est fort à supposer qu'Arlès-Dufour, comme d'autres, dut plusieurs fois venir au secours d'une trésorerie défaillante. Pourtant, curieusement, la récapitulation des sommes versées par le fondateur en faveur de l'Ecole centrale apparaît sobrement comme suit dans son Livre particulier :

« Au 30 septembre 1858 1.000 F
1859 1.000 F
1860 1.000 F (7.500)
1861 Aucun détail fourni
1862 100 F (7.500) »

Ultérieurement, une décision prise, en son absence, par le conseil devait faire réagir fortement le fondateur : la suppression de l'enseignement des langues allemande et anglaise. Cet enseignement qui lui tenait à cœur depuis si longtemps, tellement et à juste titre, fut rétabli avec empressement2106. La guerre de 1870 devait encore faire trembler les fondements de l'Ecole, installée un an plus tôt au n° 20 du quai de Joinville (futur quai de La Guillotière et actuel quai Augagneur), à l'angle de la rue Mazenod. Mais le succès escompté par Arlès-Dufour, un succès complet éclate enfin, définitif, pour faire de l'Ecole centrale lyonnaise, à la fois, la plus ancienne des écoles techniques supérieures de province et ‘ "l'une des plus heureuses institutions de notre cité", ’ selon le mot d'Edouard Herriot2107. Lors de la commémoration du centenaire, le maire de Lyon, président du Conseil d'administration de l'Ecole et président d'honneur de l'Assemblée Nationale, devait poursuivre son hommage en ces termes : ‘ "Il faut dire que, dès le départ, l'Ecole avait bénéficié d'une rencontre heureuse d'hommes au mérite exceptionnel. Ces fondateurs sont de la génération des Saint-Simoniens, grands bâtisseurs et hardis créateurs [...] : Arlès-Dufour, Henri Tabareau, Désiré Girardon, Gustave Fortier, et bien d'autres encore."

Malgré sa conviction inébranlable, Arlès-Dufour, a-t-il imaginé un jour qu'un tel anniversaire puisse être célébré ? Aurait-il pu rêver également que, plus de cent quarante ans après sa réalisation, cette oeuvre perdurerait et que "son" école - l'"Ecole Centrale de Lyon" depuis le décret du 20 mars 19702108 - deviendrait une grande école de réputation scientifique internationale aux technologies de pointe2109 ?

Indépendamment de cette idée de créer une école d'ingénieurs, une autre - encore ! - poursuit Arlès-Dufour, et de longue date. Depuis ses débuts professionnels dans la capitale de la soie, Arlès-Dufour n'a qu'une aspiration pour sa ville d'accueil : faire de Lyon ‘ "l'un des entrepôts du commerce du monde2110". ’ Chacun de ses voyages en Angleterre et la visite des imposants docks-entrepôts londoniens, actifs, efficaces et plus que centenaires, l'ont forgé dans cette ambition. Dès 1834, il l'écrit dans son ouvrage ‘ "Un mot sur les fabriques étrangères..." ’. A la même époque, son ami saint-simonien, l'ingénieur Eugène Flachat, constructeur des premières voies ferrées françaises, lui aussi, est fortement impressionné par l'étendue et la puissance de ces installations portuaires britanniques2111. A Lyon, par nécessité évidente, existe bien un entrepôt des soies, mais en 1843, son ‘ "délabrement [...] exige de grandes réparations qui sont aussi de la plus extrême urgence" ’. Un rapport de Louis Dugas déplore cette situation dans un rapport lu au cours de la séance de la Chambre de commerce du 29 juin. Deux lettres, au préfet et au maire, suivent le 17 juillet. Dans la seconde, l'on se plaît à compter sur un prompt et efficace "égard", aussi sur le "zèle" qui l'anime [le maire] pour tout ce qui touche à la prospérité de notre commerce et de notre industrie manufacturière2112." ’ ‘ A se demander d'ailleurs si le ministre du Commerce connaît l'existence même des installations en cause dont la juridiction consulaire dit ne l'en avoir jamais entretenu. Et si elle le fait, cette fois, le 19 octobre - Arlès-Dufour venant d'être installé après sa réélection - c'est pour ’ ‘ "témoigner combien il importe, à la prospérité de notre commerce et de notre principale industrie manufacturière, que cet établissement réunisse au plus haut point, toutes les conditions qui attirent et maintiennent la confiance des expéditeurs étrangers2113."

Dans la même ville, sans doute exclusivement durant les crises d'intense gravité, une société de prêts sur dépôts de soies, sous l'égide de la Banque de Lyon, vient au secours des situations les plus désespérées de la Fabrique2114. Arlès-Dufour en a rappelé les éminents services dans sa harangue aux fabricants de 18482115. Pourquoi ne pas créer un établissement de prêts sur soieries, et aussi, pourquoi pas, sur toutes autres marchandises, suggère-t-il aussitôt après. Comme en écho, un décret du 21 mars 1848 décide l'établissement de magasins généraux à Paris et autres villes de France. Ils ont pour but de faciliter, sans déplacement de lieu, la circulation des produits et, au besoin, de les faire circuler de main en main, sans déplacement réel, chaque fois moyennant un récépissé transmissible par voie d'endossement2116. Cette procédure, déjà pratiquée chez nos voisins, originale en France, séduit. Chacun s'emploie à la mettre en oeuvre dans les délais les plus brefs. Dès le 7 avril, le comité municipal des Finances de Lyon convie la Chambre de commerce à conférer avec lui en vue de la création et de l'organisation de ces magasins publics2117. Certains, pourtant, s'impatientent des lenteurs de la mairie provisoire, en butte à d'autres problèmes au moins aussi urgents pour elle dans cette période transitoire2118. Avec faveur, le 20 mai, la Chambre de commerce examine la proposition de la Compagnie des ponts, port et gare de Vaise de convertir ladite gare et ses dépendances ‘ "en vaste succursale des magasins de dépôt déjà établis2119." ’ Cependant, différents vices de la législation de 1848 empêchent les warrants de se vulgariser dès cette époque. Il faudra encore attendre dix ans...

Depuis en particulier l'Exposition de 1855, Arlès-Dufour a-t-il ses entrées chez l'Empereur ? Il le semble fort, ainsi qu'il le rappelle à Rouher. Le ministre de l'Agriculture, du Commerce et des Travaux publics n'est pas le destinataire de sa lettre du 4 mars 1858, bien qu'il ait pourtant été personnellement mandaté par lui pour sa mission à l'Exposition de Manchester. Avec un grain de malice et une pointe d'impertinence, c'est à "l'économiste", selon le préambule, à ‘ son "ex-collègue" ’ [de la Commission impériale], dans la formule de politesse, auxquels il s'adresse.... Peut-être aussi à l'ami ? Car, s'ils n'existaient pas déjà - ce que nous ne pouvons certifier à cette date - des liens cordiaux uniront les deux hommes, comme en font foi quelques correspondances adressées en 1863 dans lesquelles Rouher assure "(s)on cher Arlès" de ses ‘ "sentiments affectueux2120". ’ De toutes façons, les termes de cette lettre nous paraissent devoir être rapportés dans leur intégralité : ils témoignent encore de la vivacité de caractère et de plume de leur auteur ; si besoin est encore, ils apportent une nouvelle justification de sa longue et inlassable marche contre le protectionnisme, non éloignée d'ailleurs de l'objet des entrepôts et warrants qui précède. Voici ce qu'il écrit :

"Monsieur, Le remarquable rapport et le décret sur la boucherie [sic] expliquent et excusent la liberté que je prends d'écrire à l'économiste, et non au Ministre.

"En réponse à un mémoire qui, sous l'apparence de la spécialité, touche à la grande question du commerce en général, le ministre a bien voulu me faire écrire une lettre fort élogieuse, dont mon expérience dans les notions administratives me font traduire le sens par : "Votre intéressant travail sera enterré avec tous les honneurs dus à votre nom, à votre expérience, à votre dévouement." J'avoue que j'aurais préféré, que j'avais espéré même, une ligne de vous me prouvant que vous avez lu ce travail auquel j'attribue, à tort peut-être, mais en toute conscience, une utilité très actuelle s'il est pris au sérieux par le ministre qui vient d'obtenir de l'Empereur une réforme plus délicate, plus difficile, plus controversée, si possible, que celles que j'indique.

"Les trop courts entretiens que j'ai eu l'honneur d'avoir avec S.M. l'Empereur au sujet de la liberté commerciale m'ont toujours impressionné vivement et m'ont inspiré, comme à tous les hommes impartiaux des pays les plus civilisés, la conviction que la longue hésitation et la dernière retraite de l'Empereur au sujet de la nouvelle politique commerciale, étaient exclusivement dues à des raisons de politique intérieure, habilement enflées et exploitées par les hauts intéressés au maintien des monopoles.

"Il me paraît impossible qu'un esprit aussi profond ne se préoccupe pas des moyens d'enlever pacifiquement à l'Angleterre au profit de la France, un des plus grands éléments de sa puissance maritime, commerciale, industrielle et partant politique. Je veux parler du monopole de l'entrepôt universel des substances alimentaires et des matières premières, monopole qu'elle a conquis tout bonnement en proclamant la liberté des échanges et l'égalité des pavillons. J'espère, Monsieur et ex-collègue, que vous excuserez mon infraction à l'étiquette en faveur de la loyauté de l'intention. Agréez, je vous prie, l'assurance de haute considération de votre dévoué serviteur2121..."

La réaction, sèche mais réconfortante, ne se fait pas attendre. ‘ "Monsieur, J'ai reçu la lettre du 4 de ce mois" ’, lui répond Rouher le 9 et cette fois sous sa signature, ‘ "par laquelle vous exprimez la crainte que je n'aie pas pris connaissance du mémoire que vous m'avez adressé récemment. Je m'empresse de vous faire savoir que vous êtes à ce sujet dans l'erreur. J'ai lu votre travail et je ’ ‘ puis vous dire que je le considère comme un des éléments les plus sérieux pour lever la levée [sic] des prohibitions. Il ne saurait, dès lors, être mis de côté, comme vous le supposez à tort. Recevez2122..."

Dans son compte rendu de mission à l'Exposition de Manchester déjà cité et dont connaissance donnée quelques semaines plus tôt, le 11 février 1858, à la Chambre de commerce, Arlès-Dufour écrivait également2123 : ‘ "[...] lorsque l'Europe avait à peine des routes viables et que la mer était pour elle la voie la plus prompte et la plus économique, l'Angleterre pouvait et devait être son marché, son entrepôt, son magasin général. Mais aujourd'hui que le continent est sillonné de chemins de fer qui mettent ses principaux centres de production et de consommation en communication facile et rapide avec la France, c'est elle qui, placée au centre de l'Europe, et baignée par trois mers, doit devenir cet entrepôt. Il ne faut pour cela que la modification de lois de douanes et l'établissement sur une large échelle de docks ou magasins privilégiés, délivrant des warrants facilement négociables, en avance sur les marchandises entreposées et sans l'absurde obligation d'une autre caution que la marchandise et l'endossement du déposant." ’ Avant de terminer, le rapporteur, qu'il soit commissionnaire lyonnais ou futur actionnaire de la Compagnie de docks et entrepôts de Marseille, mais toujours avec la même sincérité désintéressée, revient à la charge pour conclure : ‘ "Quant aux entrepôts avec warrants, soit à Marseille, soit à Lyon, c'est encore un moyen qui ne coûterait absolument rien au gouvernement qu'une simple disposition administrative. Vous le voyez, Monsieur le Ministre, le Gouvernement peut facilement, promptement et sans aucun sacrifice, venir en aide à l'industrie française en général, et à la nôtre en particulier. Il lui suffit de vouloir et nul doute qu'il voudra lorsqu'il saura2124."

Simple coïncidence ? Lien de cause à effet ? Quoiqu'il en soit, deux mois seulement après les assurances de Rouher, la loi du 28 mai ‘ 1858 "sur les négociations concernant les marchandises déposées dans les magasins généraux et sur les ventes publiques de marchandises en gros2125" ’ apporte d'utiles changements aux textes en vigueur relatifs aux warrants. Pour la liberté des échanges, il faudra encore patienter... Mais, pour "l'entrepôts avec warrants" de Lyon, la plus grande célérité s'impose. Et sans trop se soucier de la régularisation officielle à intervenir, la circulaire aux succursales de la maison Arlès-Dufour proclame, dès le 30 juillet 1858 : ‘ "L'événement notable de la quinzaine est la création de la banque des soies, institution dont l'effet sera de créer pour les soies asiatiques une concurrence sérieuse aux marchés anglais2126."

Les 28, 29, 30 et 31 décembre 1858, la Société anonyme du Magasin général des soies de Lyon est consacrée par acte passé devant Maître Thomasset, notaire à Lyon. L'objet principal de cette société, primitivement appelée Entrepôt et Banque des soies, est défini dans ses statuts, du moins dans leur projet, ainsi qu'il suit : ‘ "Considérant que tous les hommes pratiques reconnaissent la nécessité d'établir à Lyon un entrepôt de soies et une institution de crédit destinée, par les facilités qu'elle offrira au commerce et à l'industrie des soies, de fixer à Lyon le marché continental des soies de toutes provenances, à accroître dans l'intérêt de la fabrique lyonnaise l'approvisionnement du marché, à favoriser ainsi les producteurs de la soie ; [...]2127." ’ La Chambre de commerce, parmi ses délibérations, traite du futur organisme à plusieurs reprises2128, notamment les 12 mai et 29 juin 1859. Le ‘ "sénateur, chargé de l'administration du Rhône", ’ rend compte, le 16 juin, à son administration centrale de l'évolution des choses, lesquelles s'accélèrent favorablement.

Tout autant que leur bon déroulement, une question primordiale se pose, celle de l'implantation du futur Magasin général des soies. Bien évidemment, Arlès-Dufour est loin de négliger cet impératif. A l'époque de la fusion des banques départementales avec la Banque de France, la Banque de Lyon était propriétaire de l'hôtel qu'elle occupait. Au mois de mai 1848, cet hôtel devient le siège de la succursale de la Banque de France, avant son transfert, fin 1857, dans la nouvelle rue Impériale2129. Les installations devenues vacantes, situées dans le quartier Saint-Clair, place des Pénitents de la Croix, sont aussitôt mises en vente, au prix de 40.000 F, à la suite d'une délibération du conseil de la Banque du 7 janvier 1858. L'un des trois censeurs de l'ex-Banque de Lyon est devenu l'un des trois censeurs de la Banque de France, succursale de Lyon. Il s'agit, bien sûr, de l'initiateur du Magasin général des soies qui, au cours des mois suivants, tremble certainement à l'idée d'un preneur de ces locaux. En effet, l'ensemble de l'immeuble - présentant une première façade de 32 mètres sur la place de Pénitents de la Croix et une profondeur de 44 mètres et une seconde sur la rue des Fantasques, couvre une superficie de 1.800 mètres carrés, dont 770 de constructions de hauteurs diverses - répond parfaitement aux besoins de son entreprise, même si le quartier semble dénué d'avenir depuis les percements de la rue Impériale de 1854.

Le 8 septembre 1859, les statuts définitifs de la Société anonyme du Magasin général des soies de Lyon, d'une durée de trente ans, sont déposés chez Maîtres Thomasset et Deloche, notaires à Lyon. Son capital social est de 1.850.000 F, divisé en 3.700 actions de 500 F, portant intérêt de 5%. Arlès-Dufour souscrit au capital pour un montant de 22.500 F représentant 225 actions2130.

Les opérations de la société (Titre III - Article XVII) comprennent : ‘ "1° / La création à Lyon d'un magasin général pour les soies de toute nature et de toute provenance, ainsi que pour les cocons, les déchets de soie, les fils de bourre de soie, et toutes matières soyeuses ou mélangées, indigènes ou exotiques, autres que les tissus. 2° / La vente publique des matières brutes ou ouvrées énumérées ci-dessus, déposées ou non dans des magasins généraux ou des entrepôts,[...]. 3° / L'estimation et la garantie de valeur pour un temps déterminé des marchandises déposées dans le magasin général de la société."

Par bonheur, aucun acquéreur n'ayant offert le prix demandé, l'ancien Hôtel de la Banque de France est loué au Magasin général des soies de Lyon, pour une durée de neuf ans, moyennant un loyer annuel de 12.000 F. Curieusement, la date de signature de cette location diffère selon les documents officiels... Selon les uns, l'immeuble est loué en novembre 18592131. Selon les autres, la régularisation du bail intervient le 11 octobre2132 ; soit antérieurement aux deux décrets impériaux du 29 octobre autorisant, le premier, la société anonyme, le second à ‘ "s'établir dans la ville de Lyon, dans le local de l'ancienne banque", ’ référence de ce bail citée à l'appui. Peut-être, Arlès-Dufour a-t-il usé de sa position pour abréger, d'une part, les délais de décision et de promulgation de ces textes et prendre option, d'autre part, sur l'immeuble en cause.

Le premier président du conseil d'administration est naturellement l'instigateur de l'affaire, ‘ "négociant, commissionnaire en soies et en soieries, officier de l'ordre de la Légion d'honneur, membre de la Chambre de commerce, du Conseil général et du Conseil municipal, censeur de la Banque2133". ’ Au sein de ce conseil d'administration, composé de douze membres, il est entouré des personnalités suivantes, aux noms pour la plupart familiers : Henri Aynard, ‘ "banquier, chevalier de l'ordre de la Légion d'honneur, ancien président du tribunal de commerce, membre de la Chambre de commerce, censeur de la banque", ’ Paul Chartron, "négociant, marchand de soies", Joseph Denavit, "marchand de soies, juge au tribunal de commerce", Eugène Durand, "fabricant d'étoffes de soies", Oscar Galline, "banquier, membre de la Chambre de commerce et du conseil d'administration des Hôpitaux", Adolphe Girodon, "fabricant d'étoffes de soie, chevalier de la Légion d'honneur, membre de la Chambre de commerce", Louis Guérin, "banquier, marchand de soies, membre du conseil d'administration des Hôpitaux", Amédée Monterrad, "ancien fabricant d'étoffes de soies, membre de la Chambre de commerce", Natalis Rondot, "officier de l'ordre de la Légion d'honneur, ancien membre de la mission de France en Chine, délégué de la Chambre de commerce", Saint-Olive, "ancien fabricant d'étoffes de soie, président du conseil d'administration du Mont de Piété, censeur de la Banque", et enfin Félix Vernes, "banquier à Paris".

En d'autres termes, ce conseil d'administration est composé, par suite du cumul de titres, de huit soyeux (commissionnaire, marchands ou fabricants, dont deux en cessation d'activité) ; six membres de la Chambre de commerce ; quatre banquiers ; trois censeurs de la Banque [de France] ; un juge et un ancien président du tribunal de commerce ; deux officiers et deux chevaliers de la Légion d'honneur. Parmi les 72 souscripteurs originels, relevons la présence d'Henri Germain, titulaire de 50 actions2134.

Il convient maintenant d'aménager les locaux de l'ancienne banque en fonction de la spécificité des opérations prévues. La surveillance des travaux, le choix d'un directeur - arrêté sur la personne de V. Philippe2135, chargé de la gestion -, l'organisation administrative à mettre en place, les réunions du conseil d'administration chaque quinzaine, viennent encore accroître l'emploi du temps de son président. Enfin, tout est prêt et les opérations peuvent débuter en mai-juin 1860.

Arlès-Dufour peut-il enfin se déclarer comblé d'avoir mené son projet parfaitement à bien ? Dans l'immédiat sans doute, mais s'en satisfait-il totalement pour autant ? Non, point de façon définitive. Voici que maintenant, à l'occasion de l'assemblée générale du 18 avril 1863, il souhaite recevoir dans l'établissement de Lyon, conjointement avec les soies, ‘ "des fils de laine, de toile, de coton, de lin, de chanvre ou d'autres matières propres à la fabrication des étoffes de soie mélangée." ’ Il y sera autorisé par décret du 10 septembre 18642136. Mais ce n'est pas tout. Auparavant, lors de l'assemblée générale ordinaire et extraordinaire du 28 février 1863, il propose que le conseil d'administration de 12 membres soit augmenté de trois membres pour chaque succursale ouverte. Il songe, en effet, à étendre les opérations du Magasin général des soies de Lyon aux Entrepôts et Magasins de Paris, aux Docks et Entrepôts de Marseille et aux Magasins Généraux d'Avignon2137. Le 27 mai, la Chambre de commerce de Lyon approuve, considérant que ‘ "l'établissement de ces succursales ne pourrait que profiter à l'agrandissement de notre marché des soies2138." ’ Des négociations sont engagées dans chacune des trois villes2139.

En Avignon, un traité passé entre la Ville et la Société du Magasin général des Soies de Lyon, le 13 avril 1863, autorise cette dernière à établir, dans le magasin général créé par la ville, une succursale pour le magasinage des soies avec salle de ventes publiques. Un décret impérial du 10 octobre de la même année entérine cet accord, tandis qu'un second décret du même jour accepte le changement de dénomination de la société contractante devenue la Société Lyonnaise des Magasins généraux des soies2140. F. Fabre est chargé de la direction particulière de cette succursale2141. Un nouveau décret impérial du 28 décembre 1864 permet d'annexer deux nouvelles succursales à celle déjà créée, à savoir les magasins en cours de construction, dans le quartier Saint-Roch, et les bâtiments dépendant de la maison déjà occupée par la direction et les bureaux de la société, situés rue de la Croix, n° 10. Quatre ans après, il est demandé que les magasins d'Avignon puissent recevoir ‘ "toutes espèces de marchandises conjointement avec les soies et les garances2142". ’ Sous la pression des événements, du tribunal de commerce et de la Chambre de commerce d'Avignon, l'année suivante, une nouvelle fois, un décret du 25 avril 1868 fait droit à cette demande : les blés ne pouvant trouver place dans les docks de Marseille, ‘ "le point d'entrepôt très favorable2143" ’ est celui du magasin général d'Avignon. Par suite de la nouvelle extension d'opérations, un changement d'appellation s'impose encore. Aussi, le Palais des Tuileries, dans le même texte, suite à un acte passé le 11 avril 1868, en l'étude de Maître Messimy, donne son approbation à la société à l'effet de substituer à sa dénomination, celle de "Société lyonnaise des Magasins généraux2144". Notification en est faite personnellement par le ministre du Commerce, le 25 mai, à Arlès-Dufour, 19 place Tolozan, le 25 mai suivant2145.

Si aucune suite, apparemment, ne fut donnée aux ambitions touchant la capitale - un domaine où les Pereire, eux-mêmes ne pourront aller au bout de leurs projets avec les anciens Docks Napoléon2146 -, les négociations sont menées grand train à Marseille, parallèlement à celles d'Avignon. Elles se déroulent les 27 juin, 1er et 24 juillet 18632147, largement facilitées par la nature amicale des relations entre le protagoniste et actionnaire lyonnais2148 et les Talabot. Arlès-Dufour obtient d'eux l'autorisation d'établir et d'exploiter une succursale à l'intérieur même des locaux de la Compagnie des Docks et Entrepôts de Marseille, tant pour le magasinage de la soie et de toutes matières propres à la fabrication d'étoffes de soie mélangée que pour les ventes publiques. Un décret, déjà cité, du 10 septembre 1864 concrétise officiellement cet accord et E. Lambert est nommé directeur particulier de l'établissement2149, alors que les docks-entrepôts de Marseille sont entrés en plein fonctionnement depuis le 1er janvier de l'année. Ainsi, les approvisionnements de soies du monde transitent par l'antenne marseillaise de la Société lyonnaise des magasins généraux, d'où n'est pas éloignée la succursale de la maison Arlès-Dufour établie entre-temps dans la cité phocéenne2150. Voici de quoi combler les voeux de son propriétaire, aussi de renforcer une position commerciale déjà qualifiée, six ans plus tôt, de "presque cosmopolite2151". Quant à la possibilité de recevoir ‘ "toute espèce de marchandise2152" ’ accordée aux magasins d'Avignon, elle s'étendra également au dit établissement.

Rien que dans ce seul domaine, durant cette dizaine d'années, que de chemin parcouru ! Que d'entretiens, d'échanges de vue, de tractations, de notes, de correspondances, de rapports, de comptes rendus, de projets et de modifications de statuts, de déplacements, d'efforts, de fatigues pour ce sexagénaire à l'écriture de plus en plus malaisée ! Et dans ce seul domaine de la manutention, du stockage de soie et matières diverses, de l'émission de warrants négociables, sans négliger pour autant d'autres sphères d'activité...

Toutefois, il en est une à l'égard duquel Arlès-Dufour commençait à prendre quelque distance depuis plusieurs semaines, sinon plusieurs mois. Le 31 décembre 1859, le secrétaire général de la Société pour l'Instruction Primaire du Rhône adressait les lignes suivantes à son président de la Commission exécutive, M. Valois : ‘ "Vous verrez par la circulaire ci-jointe que je clos ma carrière commerciale. Cette carrière de prés d'un demi-siècle, car elle a commencé à la paix de 1814, a été rude et, comme les longues carrières, ’ ‘ mêlée de plaisirs et de peines, mêlée ’ ‘ de pluie et de soleil ’ ‘ ; en définitive, Dieu l'a bénie et c'est pour le reconnaître que je pense aujourd'hui aux oeuvres auxquelles j'ai coopéré. La plus importante, la plus utile, la plus religieuse est notre société pour l'instruction populaire, à laquelle vous-même travaillez avec tant de zèle et d'intelligence.

"Ne pouvant encourager tous nos agents et trouvant que, ainsi que partout et toujours, les femmes sont moins bien traitées que les hommes, je pense, cette fois, exclusivement à elles et je viens vous prier de placer à la caisse de retraite pour la vieillesse 25 F pour chacune de nos directrices d'école, qui, je crois, sont au nombre de dix-neuf ou de vingt, et 20 F pour chacune de nos adjointes, au nombre de quatre ou de cinq.

"A cet effet, et dans ce but exclusif, je vous remets une somme de six-cents francs.

"Je ne m'excuse pas de l'embarras que ce legs, ou plutôt ce don, va vous donner, parce que je vous connais de longue date et que je sais que votre cœur vous récompensera, en attendant que Dieu le fasse comme le souhaite

Votre vieil ami

Arlès-Dufour2153."

Notes
1975.

Lettre d'Arlès-Dufour, Lyon, 12 février 1853, à sa fille Adélaïde (Archives familiales).

1976.

Raoul de Cazenove, Notes sur la société lyonnaise..., op. cit., p. 150.

1977.

Rappelons qu'Enfantin séjourne à Lyon depuis octobre 1852.

1978.

Coralie, veuve de Jules Plantin en 1837, devenue l'épouse de René Holstein en 1839.

1979.

Lettre d'Enfantin, 25 septembre 1852, à Arlès-Dufour (Archives familiales).

1980.

Théâtre lyonnais.

1981.

Lettre d'Arlès-Dufour, Lyon, 17 février 1853 à sa fille Adélaïde (Archives familiales).

1982.

Ibid.

1983.

Nous ignorons tout et notamment la destination de ce bien, tantôt dénommé "Maison du Talhaus", ou "Propriété Zurich" ou "Immeuble Zurich". S'agit-il du nouveau siège de la succursale locale et en même temps d'un immeuble de rapport ? Aucune trace de revenu relatif n'est relevée.

1984.

Selon acte d'achat de Mme Adélaïde Chabrières née Arlès-Dufour, passé chez Maître Lombard-Morel, notaire à Lyon, le 6 juillet 1883, cité XVIII - Un prolétaire enrichi...

1985.

René Laplace, op. cit., p. 88.

1986.

Lettre d'Arlès-Dufour, Londres, "Park Hill Mai 1837", à sa femme, avant l'abandon de l'idée de son départ pour New-York, (Archives familiales), citée in XVII - Un nouveau départ : La maison Arlès-Dufour.

1987.

"Instructions pour ma femme en cas de décès", Arlès-Dufour, 11 mai 1843, cité.

1988.

Ces divers éléments selon Registre de l'état civil, Mairie du 1er arrondissement de Lyon, Acte de mariage n° 317, 22 juin 1853.

1989.

Jules Verne, op. cit., p. 74.

1990.

Cette tour est restée propriété de la familleEX \f nom «Chabrières (Adélaïde)» jusqu'à ces dernières années.

1991.

Venant de la 10e transaction du 5 décembre 1853, citée plus haut.

1992.

Lettre d'Arlès-Dufour, Lyon, 17 février 1853, à sa fille Adélaïde, citée.

1993.

Lettre d'Arlès-Dufour, Zurich, 16 août 1845, à Enfantin (ARS 7682/175) déjà citée in XIX - "Le cadeau de l'Angleterre au monde".

1994.

Lettre de Gustave Arlès-Dufour, Leipzig, 6 mai 1846, à son père, Lyon (Archives familiales).

1995.

Ibid., 4 avril 1846.

1996.

Cf. XX - "Une belle part dans l'histoire".

1997.

C[ésar] L[‘Habitant], op. cit., p. 138.

1998.

"Instructions pour ma femme en cas de mort" d'Arlès-Dufour, 11 mai 1843, cité (Archives familiales).

1999.

Lettre de Gustave Arlès-Dufour, Londres, 8 septembre 1848, à son père (Archives familiales).

2000.

Ibid., 12 juillet 1848.

2001.

Pour mémoire : MauriceEX \f nom «Chabrières (Adélaïde)» né le 19 janvier 1829 à Crest (Drôme), Gustave Arlès-Dufour né le 12 février 1829 à Lyon.

2002.

Lettre de Gustave Arlès-Dufour, 24 janvier 1853, à sa sœur Adélaïde, (Archives familiales).

2003.

Circulaire "Les successeurs d'Arlès-Dufour et Cie", Lyon 23 juillet 1883 (Archives familiales) : "M. Gustave Arlès-Dufour désirant prendre du repos après une carrière commerciale de 35 ans..."

2004.

Lettre d'Arlès-Dufour, Lyon, 12 février 1853, à sa fille Adélaïde, citée.

2005.

Lettre d'Arlès-Dufour, Londres, "Park Hill Mai 1837" (Archives familiales), déjà citée in XVII - Un nouveau départ...

2006.

L'éternel témoignage d'amitié à Enfantin...

2007.

Lettre d'Alphonse Arlès-Dufour, Zurich, 17 juin 1852, à son père (Archives familiales).

2008.

Pour mémoire, Armand Arlès-Dufour né le 3 juin 1842 à Lyon.

2009.

Lettre d'Arlès-Dufour, Lyon, 25 juin 1852, à son fils Alphonse (Archives familiales).

2010.

Lettre de Gustave Arlès-Dufour, non datée [février 1853], à sa sœur Adélaïde (Archives familiales).

2011.

Lettre d'Arlès-Dufour, Lyon, 22 février 1853, à sa fille (Archives familiales).

2012.

Lettre d'Alphonse Arlès-Dufour, Lyon, 8 février 1853, à sa sœur Adélaïde (Archives familiales).

2013.

Dictionnaire Biographique des Auteurs..., op. cit., t.2, p. 54.

2014.

Lettre de Lamartine, 22 mai 1853, à Martin-Paschoud (Archives familiales).

2015.

Lettre de "Martin-Paschoud, pasteur, aux Loges par Versailles", 23 mai [1853], à Arlès-Dufour (Archives familiales).

2016.

Le Progrès, 30 décembre 1859. Le 21 janvier 1862, Enfantin suggérera à Arlès-Dufour de constituer une rente viagère insaisissable au profit de Lamartine, à l'aide de leur contribution personnelle et de celle de Pereire et Bartholony. "En attendant, il est impossible que vous ne répondiez pas à cette lettre par l'envoi de 360 F pour les 40 volumes", ajoute-t-il dans la crainte de l'absence de réception du prospectus concernant l'édition des oeuvres du poète. (OSSE, Vol. 13, p. 142).

2017.

Selon l'acte de mariage du 22 juin 1853.

2018.

Livre particulier au 30 septembre 1855, cité.

2019.

Belle-mère d'Arlès-Dufour, veuve depuis le 3 septembre 1858. Pour mémoire, décédée le 7 mai 1863 à Lyon.

2020.

Rappelons qu'il a été fait chevalier de la Légion d'honneur en février 1837 (XVI - Des balles et des boulets) et qu'il sera promu officier par décret du 15 décembre 1855 (XXII - Les Expositions).

2021.

Selon l'acte de mariage du 22 juin 1853, cité dans le présent chapitre, d'où sont extraits les noms et qualités qui précèdent.

2022.

Arrêté préfectoral du 20 décembre 1852, Annuaire du département du Rhône, 1858, p. 222.

2023.

Du moins selon l'acte de mariage d'Adélaïde, cité. La date exacte de l'installation permanente d'Arlès-Dufour à Oullins n'a pu être déterminée.

2024.

Lettre Arlès-Dufour, "Cannes, mardi 54", sans formule de destinataire, sans nul doute à femme et enfants, se terminant par "Je vous embrasse tous" (Archives familiales).

2025.

Lettre Arlès-Dufour, "Cannes, le samedi 18 - Dimanche", à "Brave amie" [Pauline] (Archives familiales). Cette lettre semble bien se situer dans le contexte de la précédente et pouvoir être datée d'avril 1854. L'énigme ne se pose pas seulement à nous : une mention ultérieure, d'origine inconnue, pose la question : "1860 - Naissance Auguste ?". Or, AugusteEX \f nom «Chabrières (Adélaïde)» est bien né le 8 avril 1854 et il n'est pas né d'enfant mâle avant 1865, année de la mort de Cobden... Quant au prénom de Bastien [sans majuscule dans le texte], il s'agit une façon plaisante, selon nous, de désigner le nouvel héritier.

2026.

AML, Registres de l'état civil.

2027.

Lettre d'Arlès-Dufour "Lyon le 25", à ?, fac-similé in Le Monde en Déshabillé - Autographes et dessins du vieux Lyon et du vieux Paris, Cahier n° 1, 1879, Lyon [?],.Alexis Rousset.

2028.

Yves Lequin, Les ouvriers de la région lyonnaise... , op. cit., t. II, p. 17.

2029.

Précisons qu'Arlès-Dufour fait apparaître, pour la première et la dernière fois, dans son bilan financier au 30 septembre 1853, 50 actions du "Grand Central" d'une valeur de 10.000 F. Cette compagnie concessionnaire du chemin de fer de Rhône et Loire, créée en avril 1853, est une entreprise des frères Pereire, avec l'appui de Morny..., Jean Autin, Les frères Pereire,... , op. cit., p. 135.

2030.

Il s'agit de la 10e acquisition du 5 décembre 1853 citée plus haut dans ce chapitre.

2031.

Au moins jusqu'en 1862 dans l'état des éléments en notre possession. Le Livre particulier se clôt, rappelons-le, au 30 septembre 1862.

2032.

Gazette de Lyon, Mardi 1er septembre 1857, 13e année, n° 206, p. 3. Pour mémoire : Pruze, aujourd'hui Bursa et en français Brousse (Turquie).

2033.

Camille Rambaud a été ordonné prêtre le 25 mai 1861 (Jules Aeschimann, op. cit., p. 17)

2034.

Livre particulier, cité, au 30 septembre 1857.

2035.

Yves Lequin, Les ouvriers de la région lyonnaise... , op. cit., t. 2, note 98, p. 374, fournit à l'appui les résultats de l'"Enquête parlementaire... 1872, Chambre de commerce Lyon et Conseil d'hygiène" (A.N., C 3021) : "La fondation Arlès-Dufour dépérit, bien que les ouvriers des grandes usines de la banlieue méridionale de Lyon soient les plus mal logés." D'une manière générale, comme l'écrit la Revue des Deux Mondes du 1er avril 1868, p. 776, "les cités ouvrières n'ont pas réussi, et nous félicitons la sagesse des ouvriers d'avoir répugné à ce classement par domicile."

2036.

Livre particulier, cité.

2037.

Cf. XX - "Une belle part dans l'histoire"...

2038.

Livre particulier, document cité. A la lueur de ce qui suit, il semble donc que l'immeuble ait été occupé avant de paraître dans les comptes.

2039.

Lettre circulaire d'Arlès-Dufour, Paris, 1er mars 1857 (ARS 7688).

2040.

OSSE, Vol. 10, pp. 178-195.

2041.

Ibid., p. 184.

2042.

CCL, Registre des délibérations, 24 janvier 1839 - CCL, Registre des Copies de lettres, lettre n°402 du 29 janvier 1839 à Fulchiron, membre de la Chambre des Députés, expéditeur du rapport Wurstemberg.

2043.

François Caron, Histoire économique et... , op. cit.

2044.

CCL, Registre des délibérations, 30 janvier 1840.

2045.

Ibid., 12 mai 1842.

2046.

Ibid., 23 juin 1842. C'est dans la lettre de la CCL au ministre du 12 mai 1842 qu'est citée la loi du 16 juillet 1840.

2047.

Ibid., 29 février 1844. Selon un avis adressé à la CCL par le directeur des postes de Lyon.

2048.

Selon l'expression, citée au chapitre XXI - "Le printemps" et ses orages, qualifiant Arlès-Dufour de "principal organe de cette opposition filiale" (OSSE, Vol. 12, p. 149).

2049.

Cf. XXI - Le "printemps" et ses orages.

2050.

OSSE, Vol. 12, p. 148.

2051.

Lettre d'Enfantin "au principal organe de cette opposition filiale" [Arlès-Dufour] du 17 janvier 1849, (OSSE, Vol., p. 150).

2052.

On sait par contre le rôle joué par la marine de guerre française lors de la guerre de Crimée aux côtés de la déficiente force navale britannique.

2053.

Le Moniteur Universel, 23 avril 1853, cité par Félix Rivet, La navigation à vapeur..., op. cit., p. 552.

2054.

Roger Vercel, "Préface", in Marthe Barbance, op. cit.

2055.

Marthe Barbance, op. cit., p. 36. Toutefois, selon la reproduction dans cet ouvrage du décret impérial du 2 mai 1855, l'acte a été passé les 24 et 26 février 1855.

2056.

Selon reproduction "Projet d'établissement des services à vapeur de l'Atlantique nord et sud, de la main d'Isaac Pereire", in Marthe Barbance, op. cit., p. 37.

2057.

Selon reproduction du "Procès-verbal de la première assemblée générale de la Compagnie Générale Maritime, 11 juin 1855, donnant la liste des administrateurs...", in Marthe Barbance, op. cit., p. 38.

2058.

Par décret impérial du 25 août 1861, et redevenue ces dernières années "Compagnie générale maritime".

2059.

Selon reproduction de la "Première page du premier volume manuscrit des rapports du conseil d'administration aux assemblées d'actionnaires", in Marthe Barbance, op. cit., p. 44.

2060.

Livre particulier au 30 septembre 1855 (Archives familiales). Le nombre de ces actions paraît erroné et devrait s'élever à 50, selon la valeur de chacune prévue aux statuts.

2061.

René Borruey, op. cit., p. 108.

2062.

Ibid. p. 122, et Jean Lenoble, op. cit., p. 254.

2063.

Livre particulier, document cité : Arrêté au 30 septembre 1857 : 50 actions valeur 10.000 F - Au 30 septembre 1858 : 50 actions valeur 10.000 F - 30 septembre 1859 : 100 actions 15.000 F - 30 septembre 1860 : 100 actions 20.000 F - Pour mémoire, l'année 1861 n'est pas détaillée et les comptes de l'année suivante inachevés ; parmi ceux existants en 1862, les "docks Marseille" n'y sont pas mentionnés. L'acte de partage de la succession ne fait aucune référence à ces titres.

2064.

Lettre de remerciements du capitaine Giraud, sur papier à entête "Compagnie des docks et entrepôts de Marseille", 15 février 1861, à Arlès-Dufour (Archives familiales).

2065.

Ch. Magne, "Exposition universelle de l'Industrie ", L'Illustration - Journal universel, 16 juin 1855, réédit. in Les grands dossiers de l'Illustration - ... , op. cit., p. 24.

2066.

Pour mémoire, Barbedienne adressera, le 10 septembre 1863, la lettre suivante à Arlès-Dufour : "Cher Monsieur, Parmi toutes les marques de sympathie qui m'arrivent, la vôtre a, pour moi, un prix à part. Vous avez suivi mon travail, vous l'avez défendu souvent contre l'ignorance et les préjugés. Par vos paroles et par votre influence, vous m'avez aidé contre les difficultés et la mauvaise fortune. Et, aujourd'hui encore, votre approbation est une récompense bien douce à mon cœur. Je suis heureux de vous apprendre que, par les soins du Prince Napoléon, j'ai été décoré par décret du 29 août. Ainsi se trouve fermée cette longue, difficile et souvent douloureuse phase de ma vie..." (Archives familiales)

2067.

Il est rappelé qu'Arlès-Dufour séjourna à Paris, la majeure partie de son temps, de fin 1853 à novembre-décembre 1855. Il est aussi possible qu'il ait connu ce sculpteur à Lyon antérieurement, comme il l'a sûrement retrouvé plus tard dans cette ville. En effet, François Félix Roubaud (1824-1876) a été élève de l'Ecole des Beaux-Arts de Lyon de 1846 à 1849, puis de celle de Paris en 1849, puis de Pradier à Paris également. Ses oeuvres : "L'Eau et le Feu", (Palais du Commerce, Lyon) ; "La Sculpture et la Peinture", bas-reliefs (Louvre) ; "La Justice et la Force" (Palais de Justice, Lyon) ; "La Danse et la Musique" (Grand Théâtre, Lyon) ; "Le Peintre Taunay", buste (Versailles) (Dictionnaire encyclopédique Quillet, 1952, et Marius Audin et Eugène Vial, op. cit., t. II.). A noter encore que "Roubaud, statuaire à Lyon," figure parmi les membres honoraires des "Amis de la famille" saint-simonienne (H.-R. d'Allemagne, Prosper Enfantin..., op. cit., p. 185).

2068.

Une reproduction en plâtre de cette statuette appartient au fonds du Musée Historique de Lyon et porte cette dédicace "A mon ami Holstein". Elle a été présentée dans le cadre de l'Exposition de la Bibliothèque municipale de Lyon "C'est nous les canuts", du 28 mars au 26 mai 1984.

2069.

Jean-Marie Régnier , ancien dessinateur fabricant, élève de P. Révoil à l'Ecole des Beaux-arts de Lyon. Né dans cette ville en 1796, il y est mort en 1865. Ce peintre (ou son homonyme ?) a été déjà rencontré, à plusieurs reprises, dans les chapitres précédents : témoin à la naissance d'Alphonse en 1835, commandant de la Garde nationale, aide lors de l'incendie de 1851. Le portrait d'Arlès-Dufour en 1860, alors qu'il semblait destiné au personnage représenté, a curieusement été offert par la veuve de l'artiste, en 1865, au Musée des Beaux-Arts de Lyon (E.-C. Martin d'Aussigny, Notice des tableaux exposés dans les galeries du Musée de Lyon, Lyon, Perrin, 1877), avant de disparaître de ses réserves, selon les précisions fournies par le Musée... Audin et Vial, op. cit., à propos de Roubaud, signalaient déjà, en 1919 : "[Régnier] représenté autrefois au Musée de Lyon, par un "portrait d'Arlès-Dufour"".

2070.

Cf. XXV - De longs efforts couronnés de succès.

2071.

Lucy Martin-Paschoud, née à Lyon le 4 septembre 1834, décédée à Lyon (6e) le 25 octobre 1871. Contrat de mariage signé chez Me Jozon, notaire à Paris, le 11 juin 1856.

2072.

Raoul de Cazenove, Notes sur la société lyonnaise... , op. cit., p. 149.

2073.

Lettre d'Alphonse Arlès-Dufour, Londres, 26 mars 1854 à sa mère (Archives familiales)- Lettre d'Arlès-Dufour, Oxford, 1er août 1869, à sa femme rappelant une visite antérieure de cette ville, en 1854, en compagnie d'Alphonse (Archives familiales).

2074.

Lettre d'Albert Dufour-Feronce, Leipzig, 29 novembre 1855, à Pauline Arlès-Dufour, 42 avenue Gabriel, Paris (Archives familiales), déjà citée in XXII - Les premières Expositions universelles.

2075.

Décédée le 26 février 1901 à Leipzig-Plagwitz (Archives familiales), elle est la petite-fille de Pierre Louis Daniel Sellier et de Annette Sellier (Selon la traduction française du contrat de mariage joint à l'acte de partage de la succession de Pauline Arlès-Dufour établi le 4 juin 1881 en l'étude de Me Lombard-Morel, notaire, 26 rue de la République, à Lyon).

2076.

En fait, 40 ans 9 mois, précise très exactement Etienne de Cazenove, auteur en 1992 du complément des Notes sur la société..., op. cit.

2077.

Raoul de Cazenove, Notes sur la société lyonnaise... , op. cit., p. 149.

2078.

L'âge d'admission à l'Ecole centrale sera porté à 16 ans et, ultérieurement, à 17.

2079.

Armand Arlès-Dufour sera le fondateur et le premier président du groupement des anciens élèves, selon Auguste Jouret, op. cit., p. 33. Nous sommes redevables à cet ouvrage de divers emprunts, sauf mention contraire. La Revue du Siècle - Lyon - Année 1890, p. 509, désigne Armand comme président honoraire de l'Association des anciens élèves, ajoutant qu'il est viticulteur en Algérie. Toutefois, il n'est pas mentionné dans la liste des présidents de l'Association "depuis sa fondation" (Annuaire 1987 - Association des anciens élèves de l'Ecole centrale de Lyon) ; le premier président cité est Vachon, en 1867, promotion 1861. La raison en est que ladite Association n'a été autorisée par arrêté préfectoral que le 28 juillet 1866, d'où la dénomination de "groupement" par Auguste Jouret. Par contre, Armand Arlès-Dufour est signalé dans le Bulletin de l'Association des anciens élèves de l'Ecole centrale lyonnaise, p. 36, Lyon, n° 224, janvier 1927, comme ayant été, après la guerre de 1870, le 11 octobre 1874, président d'un "Comité de réorganisation" de l'Association. Cette présidence devait sans doute être tout à fait symbolique, Armand étant installé en Algérie.

2080.

Auguste Jouret, op. cit., p. 33.

2081.

Lettre d'Enfantin, Curson, 7 août 1837, à Arlès-Dufour (OSSE, Vol. 31, p. 123).

2082.

Jean Walch, op. cit., p. 52, note 113.

2083.

CCL, Registre des délibérations, 18 novembre 1839.

2084.

"Ecole centrale lyonnaise", Annuaire de Lyon et du département du Rhône, 1860. Girardon sera également professeur à la Société d'Enseignement professionnel du Rhône (SEPR).

2085.

Lettre d'Arlès-Dufour, ? juillet/août 1857, à Enfantin, citée par Auguste Jouret, op. cit., p. 25 : "Ce seront [les administrateurs de l'Ecole centrale] des patrons mais non des conseillers, Girardon ayant trop souffert de l'intervention d'une commission pour en accepter une."

2086.

Auguste Jouret, op. cit., p. 24 et 47. Malgré cela - modestie ou réalité ? -, il fait suivre sa signature, dans une lettre (Archives familiales) du 23 février 1865 à Béhic, successeur de Rouher à la tête du ministère du Commerce, de l'énumération de ses divers titres relatifs à l'enseignement dont le suivant : "L'un des fondateurs de l'Ecole centrale lyonnaise." Il faut ajouter cependant que pour les organismes cités à la suite il n'est pas l'unique fondateur.

2087.

Ibid., p. 24.

2088.

Ibid., pp. 24-25.

2089.

Cité par Pierre Guiral, Adolphe Thiers... , op. cit., p. 258.

2090.

Auguste Perdonnet, Les chemins de fer, op. cit., p. 17. Thiers avait déclaré à la tribune de la Chambre : "Je viens de voir en Angleterre les chemins de fer ; je crois les avoir bien vus, et je vous déclare qu'ils ne sont pas ce que bien des gens supposent. Pour mon compte, je m'estimerais bien heureux si, en France, on en construisait seize kilomètres par année."

2091.

Lettre d'Arlès-Dufour, 2 septembre 1840 à Enfantin , déjà citée in XVIII - Un prolétaire enrichi...

2092.

En 1848. Pierre Guiral, Adolphe Thiers... , op. cit., p. 246.

2093.

Portrait de Thiers par Lamartine, cité par Ernest Bazard, "Les contemporains en pantoufles - LV - Thiers", Le Passe-Temps, n°56, 23 mai 1857.

2094.

Auguste Jouret, op. cit., p. 25.

2095.

Auguste Perdonnet, Les chemins de fer, op. cit., p. 7.

2096.

Du moins selon Sébastien Commissaire, op. cit., t. 2, p. 189.

2097.

Lettre d'Arlès-Dufour, "Lyon 27" (1858-1860 ?), à Lambert (ARS 7688/36). On retrouve également mention du "brave Perdonnet" dans une lettre d'Arlès-Dufour au même, 29 rue de Tournon, Paris, du 9 avril 1860 (ARS 7688/39).

2098.

Annuaire de Lyon et du département du Rhône, Année 1860, Lyon, Mougin-Rusand, 1860.

2099.

Ibid.

2100.

Revue du Siècle, Lyon, Année 1890, p. 506.

2101.

M. Chabot et Sébastien Charléty, op. cit. - Selon la Revue du Siècle - Lyon - Année 1890, p. 508, ce n'est qu'à partir de 1872 que la Chambre de commerce accordera à l'Ecole centrale une subvention de 2.000 F ; auparavant, et depuis sa délibération du 30 juin 1860, elle attribuait une bourse de 500 F à trois élèves.

2102.

Lettre de Michel Chevalier [bordée de noir], Lodève, 14 janvier 1868, à Arlès-Dufour (Archives familiales).

2103.

Au sujet de ces difficultés financières, cf. Auguste Jouret, op. cit., pp. 48-52.

2104.

Cette nouvelle société ne fut légalement constituée que le 15 mai 1883 (acte notarié Me Messimy, notaire à Lyon) et ses statuts approuvés par l'assemblée générale du 21 juin de la même année qui nommait, entre autres parmi les dix administrateurs : Gustave Arlès-Dufour, négociant, Victor Girodon, fils du fondateur Adolphe Girodon, Joseph Gillet, teinturier, etc. (Auguste Jouret, op. cit., pp. 57-58)

2105.

Auguste Jouret, op. cit., p. 56.

2106.

Ibid. : Le cours d'allemand fut de nouveau supprimé en 1872, après la mort d'Arlès-Dufour...

2107.

Edouard Herriot, Préface, in Auguste Jouret, op. cit., p. 5.

2108.

Annuaire 1987 - Association des anciens élèves de l'Ecole centrale de Lyon, p. 35.

2109.

Inauguration d'un microscope électronique en transmission à hautes performances, en association avec l'INSA et le CNRS (Lyon Figaro 28 février 1998).

2110.

Cf. XIV - Lyon, tremplin de l'Orient.

2111.

Eugène Flachat, Etablissements commerciaux. Docks de Londres, entrepôts de Paris, projet de docks à Marseille, Paris, 1836, cité par René Borruey, op. cit., annexe n° 4, pp. 400 et s.

2112.

CCL, Registre des délibérations, 29 juin 1843. (Pour mémoire, Arlès-Dufour absent à cette séance) - CCL, Registre des copies de lettres, 17 juillet 1843.

2113.

CCL, Registre des copies de lettres, lettre au ministre du Commerce n° 1003 du 19 octobre 1843.

2114.

Cf. XXI - Le "Printemps" et ses orages.

2115.

Ibid.

2116.

Alphonse Courtois fils, op. cit., p. 182. Il est fait appel à cet ouvrage pour un bref rappel historique concernant les warrants.

2117.

CCL, Registre des délibérations, 20 avril 1848. Pour mémoire, Arlès-Dufour est absent à cette séance ; il est à Paris pour la fusion des banques (Cf. XXI- Le "Printemps" et ses orages).

2118.

CCL, Registre des délibérations, 4 mai 1848.

2119.

Ibid., 20 mai 1848.

2120.

Lettres diverses de Rouher à Arlès-Dufour des 22 juin, 12 juillet, 24 juillet et 21 septembre 1863, 1864 et 1867 (Archives familiales). Déjà, le 26 juillet 1860 , Enfantin pouvait écrire à Arlès-Dufour : "[...] il me semble que vous êtes assez lié avec Rouher pour lui en dire autant..." (OSSE, Vol. 35, p. 230).

2121.

Lettre d'Arlès-Dufour, "Lyon 4 mars" [1858], "A l'honorable Monsieur Rouher, ministre du Commerce" (ARS 7688/46).

2122.

Lettre de Rouher, 9 mars 1858, à Arlès-Dufour (ARS 7688).

2123.

Cf. XXII - Les Expositions.

2124.

Compte rendu de la mission d'Arlès-Dufour à l'Exposition de Manchester, sur demande personnelle du ministre du Commerce, CCL, Registre des délibérations, 11 février 1858 (Six pages de ce registre !).

2125.

L'objet de cette loi du 28 mai 1858 est cité dans le second décret du 29 octobre 1859 autorisant le "Magasin général des soies de Lyon" à s'établir dans le local de l'ancienne banque (Ampliation Mes Thomasset et Deloche, notaires à Lyon). Le développement qui suit, sauf mention contraire, est emprunté soit au texte de ce décret ou à celui du premier décret du même jour autorisant le "Magasin général des soies de Lyon", soit au dossier ADR 8 MP 187 : Sté lyonnaise des Magasins généraux (1859-1887).

2126.

Circulaire de la maison Arlès-Dufour du 30 juillet 1858 (Archives Morel-Journel).

2127.

ADR, Dossier 8 MP 187, cité supra.

2128.

Délibérations visées dans le décret du 29 octobre 1859 autorisant la société du Magasin général des soies de Lyon à s'établir dans le local de l'ancienne banque.

2129.

L'historique qui suit est extrait de la Note pour Mr. le Gouverneur - Projet d'aliénation de l'ancien immeuble de la succursale de Lyon, s.d., document présenté, à l'occasion de l'Exposition "De la rue Impériale à la rue de la République", organisée par les AML à Lyon en octobre-novembre 1991. Ce document n'est pas répertorié dans le Catalogue de l'Exposition, Lyon, Archives municipales, 1991, 151 p.

2130.

Livre particulier, cité, arrêté du 30 septembre 1859. Ce nombre de 225 actions de la main d'Arlès-Dufour sur son Livre particulier pourrait paraître erroné et il conviendrait normalement de lire 45 actions (45 actions X 500 F = 22.500 F). Cependant, ses arrêts comptables suivants mentionnent toujours 225 actions pour un total de 22.500 F ; de plus, à l'un d'entre eux, il indique bien un prix unitaire de 100 F... L'actif de la succession d'Arlès-Dufour (Acte Me Lombard-Morel, notaire à Lyon, 4 juin 1881), relève la vente de 207 actions en deux temps : le 23 mai 1872 vente de 60 actions pour 9.000 F (prix unitaire 150 F) et le 30 juin 1876 vente de 147 actions pour 22.050 F (prix unitaire 150 F).

2131.

Note pour M. le Gouverneur..., document cité.

2132.

Le bail en date du 11 octobre 1859 est visé dans le décret du 29 octobre 1859 autorisant la société du Magasin général des soies de Lyon à s'établir dans le local de l'ancienne banque, déjà cité. Il sera renouvelé en 1868 moyennant le même loyer de 12.000 F pour une nouvelle période de 9 ans. En définitive, l'immeuble sera acheté, en 1878, par la Société lyonnaise agissant par son président Oscar Galline.

2133.

L'énumération de ces titres est extraite des statuts du 8 septembre 1859. Il en est de même pour ceux des autres administrateurs.

2134.

Jean Bouvier, Le Crédit Lyonnais..., op. cit., p. 109.

2135.

ADR, dossier 8 MP 187 cité, et Indicateur de la fabrique de soierie, des industries qui s'y rattachent..., 1866. Selon cet Indicateur de 1866, p. 6, Arlès-Dufour étant président du conseil d'administration, V. Philippe est le directeur général de la Société lyonnaise des magasins généraux des soies (Cf. plus loin le changement de dénomination de la Société) deux "directeurs particuliers" exerçant à Marseille et Avignon.

2136.

La demande formulée par l'assemblée générale du 18 avril 1863 est visée dans le texte du décret du 10 septembre 1864 qui autorise également l'installation et l'exploitation d'une succursale dans les locaux de la Compagnie des docks de Marseille (Cf. infra).

2137.

Lettre du ministre de l'Agriculture, du Commerce et des Travaux publics, 12 mai 1863 (ADR, dossier 8 MP 187, cité).

2138.

Cité dans dossier ADR 8 MP 187, cité.

2139.

Nous ignorons la nature de celles engagées à Paris.

2140.

Acte passé par Arlès-Dufour en l'étude de Maître Thomasset, notaire à Lyon, le 28 avril 1863.

2141.

Indicateur de la fabrique de soierie, des industries qui s'y rattachent... , 1866, p. 6.

2142.

Acte notarié Maître Messimy du 4 juin 1867, passé par Oscar Galline et Théodore Cote, suite à assemblée générale extraordinaire du 18 avril 1867 (ADR, dossier 8 MP 187, cité).

2143.

Lettre du ministre du Commerce, 13 janvier 1868, au préfet (ADR, dossier 8 MP 187, cité).

2144.

ADR, dossier 8 MP 187, cité.

2145.

Lettre du ministre de l'Agriculture, du Commerce et des Travaux publics, 25 mai 1868, à Arlès-Dufour, 19 place Tolozan, Lyon (ADR, dossier 8 MP 187, cité).

2146.

Jean Autin, Les frères Pereire,... , op. cit., pp. 255-256.

2147.

Un nouveau traité passé entre les mêmes sociétés, les 20, 22 mars, 8 et 13 avril 1864, prorogera le précédent, mais le décret du 10 septembre 1864, d'où sont extraits ces éléments, n'en précise pas la durée (ADR, dossier 8 MP 187, cité).

2148.

Comme vu plus haut, on ignore si les actions de la Compagnie des docks ont été ou non conservées.

2149.

Indicateur de la fabrique de soierie, des industries qui s'y rattachent..., p. 6, 1866.

2150.

Date d'installation non exactement connue, présumée en 1858 ou 1859. L'acte passé le 30 décembre 1859 devant Maître Deloche, notaire à Lyon, formant la Société Arlès-Dufour et Cie, fait mention de l'existence de cette succursale. Le 22 mars 1857, Arlès-Dufour écrivait : "Nous avons la prétention de développer Paris énormément, de fonder à Marseille une grande maison" (ARS 7686), cité par Pierre Cayez, L'Industrialisation lyonnaise au XIXe siècle, op. cit., p. 662.

2151.

Rapport au ministre au sujet de l'Exposition de Manchester (CCL, Registre des procès-verbaux, 11 février 1858, p. 241).

2152.

Date non connue. Indication relevée sur l'en-tête de la lettre de la "Société lyonnaise des magasins généraux" adressée le 10 août 1870 au préfet du Rhône (ADR, dossier 8 MP 187 cité). Il ne semble pas que cette facilité ait été accordée au siège de Lyon.

2153.

Lettre d'Arlès-Dufour, 31 décembre 1859, au président Valois, Président de la Commission exécutive de la Société pour l'Instruction Primaire du Rhône (Archives familiales).