Rebondissements

L’affaire ne s’arrête pas là. Quelques années plus tard, George Washington Campbell, représentant au Congrès, homme de loi et juge (State Supreme Court of Errors and Appeals), découvrit que le tribunal fédéral qui avait autorisé la vente publique des terres de la Duck River n’avait pas juridiction sur l’affaire. Cette “nouvelle” mettait en péril tous les titres établis lors des ventes successives, et rendait Jackson responsable de la valeur des terres et de la plus-value apportée par les nouveaux propriétaires au fil des années. On imagine le prix faramineux de ces terres à coton... (Remini, I : 130).

Jackson galopa donc en Géorgie pour obtenir des héritiers de David Allison une cession en bonne et due forme de la totalité des 85 000 acres qui l’en rendait absolument propriétaire (James, 1938 : 132-134). Il resta ensuite en procès pendant dix ans avec le détenteur du reste des titres, puisqu’il essaya de lui revendre ce qui, après signature des héritiers, lui appartenait de droit. Le spéculateur concerné, Joseph Erwin , qui se trouvait être le chef politique de l’opposition à Jackson au Tennessee, refusa le marché. Ce n’est qu’en 1824 que Jackson obtint satisfaction devant les tribunaux. Erwin était alors incapable de payer et devant les supplications de Mme Erwin, le général Jackson, magnanime, effaça d’un revers de main les dix mille dollars de la dette (Remini, I : 131).

L’intérêt de l’affaire d’Allison tient, d’une part, à l’implication de si nombreuses personnalités, à l’importance des sommes en jeu, au coût financier porté aux affaires de Jackson, à la vente de sa plantation de Hunter’s Hill. Cependant, il est tout aussi fascinant de voir que, malgré le poids de la dette, Jackson poursuivit ses spéculations, ses achats, ses entreprises de toutes sortes, certaines hasardeuses, d’autres moins, beaucoup sans succès. Il est frappant de constater son pouvoir de réaction face à l’adversité. En cela, sa détermination est emblématique de celle de ses pairs, pour qui tout échec n’était qu’une étape dans la longue course aux richesses. Il semble toutefois qu’une telle ressource soit liée autant à sa propre volonté qu’à sa capacité de se reporter sur le réseau d’amitié et de soutien qui lui permirent de passer sans trop de difficultés un cap que bon nombre d’entrepreneurs auraient jugé insurmontable.