De Rachel Donelson à Rachel Donelson Jackson : les mariages

La jeunesse de Rachel

Jackson; .:Mariage;Née en 1767 dans une famille aisée de Virginie, .:Généalogie; Rachel était la cadette des onze enfants de Rachel Stockley et du colonel John Donelson (Caldwell, 1936 : 6). La généalogie américaine débuta en 1716, lorsque le grand-père de Rachel, le capitaine John Donelson;, émigra de Londres avec son père. Les Stockley, eux, seraient venus en Amérique dès 1609, bien que Caldwell (1936 : 19) reconnaisse l'absence de documents précis. Les deux familles arboraient une solide généalogie et occupaient une place honorable dans la bonne société virginienne (Caldwell, 1936 : 14).

En moins d'un siècle, les Donelson assirent une dynastie puissante, extrêmement ramifiée, qui s’étendait de la Virginie à l’Alabama, tissant une toile géante dans la généalogie des grandes familles du Sud. Tout chez cette famille marquait l’aventure des pionniers fortunés de l’Ouest. Le père de Rachel était planteur en Virginie, membre de la Chambre des Bourgeois. Également arpenteur de profession, il signa des traités avec les Cherokees, fut colonel de la milice et spécula dans les terres de l’Ouest avec Patrick Henry et George Washington (Heiskell, 1919 : 102-103).

En 1779, John Donelson quitta le Vieux Dominion 181 pour les domaines “vierges” de l’Ouest, au-delà des Appalaches, qu’il explorait depuis des années déjà. La spéculation sur les terres indiennes poussait les hommes qui la conduisaient à occuper eux-mêmes une partie des terrains “capitalisés” si âprement et offerts en manne à la civilisation blanche. Donelson vendit sa plantation, sa fonderie, réduisit ses activités mercantiles et quitta sa confortable demeure sur la rivière Bannister au matin du 22 décembre, entraînant ses dix enfants, sa femme et une trentaine d’autres familles (Caldwell, 1936 : 61-62 ; Cruse, 1994 : 3).

Le voyage dura cinq mois sur les rivières du futur seizième État de l'Union 182. À leur arrivée pourtant, les conditions de la frontière, alors hostiles et meurtrières, conduisirent Donelson à reloger les siens temporairement dans le territoire du Kentucky (ouvert aux Blancs par Daniel Boone quelques années plus tôt 183), le temps pour lui de préparer des conditions de vie plus décentes. Une telle entreprise montre l’aisance financière de Donelson et la prudence avec laquelle il organisa l’immigration de sa famille 184 dans une région dangereuse de la frontière (Caldwell, 1936 : 62-63). Les Donelson s'installèrent donc dans les environs de la forteresse de Harrodsburg, à une cinquantaine de kilomètres de Lexington (Caldwell, 1936 : 80) 185. Ils ne revinrent définitivement dans la vallée de la Cumberland qu'en 1786, l'année même où John Donelson périt mystérieusement dans la forêt (Caldwell, 1936 : 106).

Rachel Donelson, alors adolescente, vécut l’aventure de la migration avec ses parents. Mais la jeune fille qu’elle fut reste quelque peu un mystère. Voici deux courtes descriptions de Rachel par le biographe James Parton , qui ne cite cependant aucune source pour étayer ses affirmations. Il dépeint ainsi Rachel à 13 ans : ‘“ [A] black-eyed, black-haired brunette, as gay, bold and handsome a lass as ever danced on the deck of a flat boat” (I : 126) ; puis, Rachel, quelques années plus tard, quand Jackson la vit pour la première fois : “[T]he gay and lively Mrs. Robards, the best story-teller, the best dancer, the sprightliest companion, the most dashing horsewoman in the western country”’ (I : 133). Une telle jeune fille ne pouvait qu’attirer les regards de jeunes hommes en âge de se marier.

La jeune Rachel Jackson fut sans conteste une femme agréable si on en juge par la lettre d’un voisin, George Cochran, qui côtoya les Jackson durant les quelques semaines qu’il passèrent en 1791 près de Natchez, au moment de leur premier mariage :

‘However remote, I cannot lose the remembrance of the agreable hours I have past in your friendly retreat at Bayou Pierre, & Seriously, it would not be the last amongst a number of inducements I should have to receive from the hands of Mrs. Jackson so great a treasure as yr. friendship has provided, that I might again enjoy the pleasure of that Society I once did and st[ill woul]d so highly value (Smith, I : 32).

Cela est un des seuls témoignages qui attestent de la vive et charmante Rachel décrite par les biographes. À la fin de sa missive, Cochran transmet les respects d’un certain John Potter qui remercie les Jackson de leur “attention polie” lors de son séjour dans le Cumberland. Cochran fut si ébloui par la grâce de Mme Jackson qu’il en parlait encore en 1797, se faisant l’écho du sentiment que les voisins des Jackson éprouvaient toujours à leur égard, et particulièrement envers Rachel :

‘In drawing near the end of my paper I feel a strong inclination to express myself in terms suitably expressive of my respect & esteem for Mrs. Jackson. I have no words to do so. I wish her all happiness—and ardently wish I may yet in this Country (for I have as an expectation you’ll againVisit it) have her a Neighbour & friend as much regarded by Mrs Cochran as she was by her quondam neighbours on Bayou Pierre. I have not yet found one of the sex that would take that name 186 (Smith, I : 130).

La chaleur de Rachel semble avoir embrasé le Bayou en même temps que Mr. Cochran, sans parler de l’attention dont Jackson lui-même l’entourait, malgré ses voyages incessants..i).Jackson, Rachel D.:Jeunesse; La chaleur du couple apparaît dans le témoignage de reconnaissance de ce père de famille :

‘How can I sufficiently thank you for yr kind & affectionate conduct towards me, but how utterly incapable am I to thank Mrs. Jackson & yourself for yr parental conduct towards my beloved Wife & child. Such conduct is deeply engraven in my mind & neither time or distance or change of circumstances can make any impression on it (Moser, IV : 130).

Les Jackson méritaient sans doute leurs surnoms de “Oncle” et “Tante” puisque leur attitude “parentale” les fit apprécier de leurs parents et amis dès le début de leur mariage.

Notes
181.

The Old Dominion, le surnom de l’État de Virginie acquis en raison de la nostalgie des aristocrates virginiens pour la vieille patrie.

182.

Voir mon article “Voyage au Tennessee : Tous les chemins mènent à Nashville”, colloque du G.R.E.N.A., mars 1997.

183.

Pour un récit de la conquête du Kentucky par ses principaux acteurs, voir John Filson, The Discovery, Settlement and present State of Kentucke [1784] (New York : Corinth Books), 1962.

184.

Heiskell (1919 : 112) estimait que le convoi d’immigrants sur les rivières et les fleuves comprenait quelque 160 individus.

185.

Notons que Remini (1977, I : 41) donne 1785 comme date d'émigration au Kentucky, sans citer ses sources.

186.

Deux missives témoignent de cet attrait : lettre du 21 octobre 1791 de George Cochran à Rachel Jackson, Smith, I : 32 ; lettre du 15 avril 1797 de George Cochran à Andrew Jackson, Smith (I : 130), dont la citation suivante est extraite.