La question de l’argent motivait bien des décisions d’orientation. L’État de l’Alabama avait établi la Banque d’État à partir de la vente partielle des terres donné par le gouvernement fédéral pour la construction d’une université. Cette réorientation montre que l’intérêt supérieur de certains n’avait rien à voir avec l’éducation (Abernethy, 1975 : 117-118). Toutefois, même pour ceux qui reconnaissaient la nécessité de fréquenter une institution scolaire, le coût des études entraînait des exigences de la part des bailleurs de fonds. Lors de la signature du traité avec les Chickasaws en septembre 1816, Jackson exposa crûment le problème à Rachel en des termes surprenants de sincérité :
‘Tell [our little son] his sweet papa hears with pleasure that he has been a good boy & learns his Book, Tell him his sweet papa labours hard to get money to educate him, but when he learns & becomes a great man, his sweet papa will be amply rewarded for all his care, expence, & pains (Moser, IV : 62). ’Cette leçon donnée à l’enfant de 7 ans montre combien l’éducation signifiait davantage que la simple acquisition de connaissances. L’effort consenti par Jackson s’inscrit dans une vision globale de la famille et des devoirs édictés à chacun par le patriarche. Le développement de l’enfant n’est pas seulement pris en compte au niveau individuel, mais plutôt en terme de la responsabilité familiale dont chaque membre est redevable. Cette responsabilité incluait l’enfant dans le réseau des rôles familiaux, mais l’exhortait aussi une fois parvenu à l’âge adulte à s’occuper de ses parents ainsi que de sa famille seconde, c’est-à-dire sa propre cellule nucléaire où il/elle est parent.
Traiter des problèmes financiers liés à l’éducation , voire même comme sujet de l’éducation dans le cas cité ci-dessus, c’est démontrer l’engagement de Jackson et de beaucoup de ses semblables dans l’éducation de leurs enfants. Le sujet concerne d’abord les difficultés de rassembler des fonds pour payer les frais de scolarité ; ensuite il fallait donner aux jeunes le sens de l’argent. Des planteurs comme Jackson étaient très riches, mais leur fortune était constituée principalement de leurs terres et de leurs esclaves. La gestion du patrimoine et les limites fixées au train de vie formaient les deux composantes indispensables à une solvabilité à long terme 335. En outre, les caprices de l’agriculture et les aléas des affaires en général rendaient l’investissement d’autant plus périlleux que le résultat n’était jamais garanti 336. Les dépenses pourtant étaient lourdes .
Notons pourtant que le manque chronique d’argent provenait souvent d’un train de vie extrêmement élevé. De plus, David Hoth (1998, correspondance privée) précise un point important quand il dit que Jackson sous-estimait souvent l’état de sa fortune et tendait à se penser beaucoup moins riche qu’il ne l’était en réalité.
Les jeunes hommes sortaient de l’académie et se demandaient parfois ce qui devait advenir, alors que les jeunes filles voyaient leurs aspirations limitées par l’unique et cloisonnante perspective du mariage (Stowe, 1990 : 155-156).