D’autres unions

La vie mondaine favorisait les rencontres et deux jeunes protégées de Jackson séjournant avec lui se marièrent à la Maison-Blanche. Nous l’avons dit, le 10 avril 1832, Mary Eastin épousa Lucius J. Polk 385 à la Maison-Blanche, précédant le mariage de Mary Ann Lewis le 29 novembre avec le secrétaire de la légation française, Joseph Pageot (Stickley, 1965 : 192). L’excès de réceptions et le coût de deux mariages successifs asséchèrent la bourse de Jackson. Remini précise qu’une mauvaise récolte de coton ne rapporta rien à l’Hermitage cette année-là, alors que le train de vie à la Maison-Blanche était fastueux :

‘Thomas Hart Benton’s daughter remembered as a girl the sumptuous meals served in the White House during Jackson’s tenure. She remembered the immense number of wax candles burning in all the state rooms, the ‘stands of camelias and laurestina’ brightening each corner of every room, and the enormous supper table in the State dining room shaped like a horseshoe with a ‘monster salmon in waves of meat jelly’ at either end (...) These dinner parties were so frequent and so magnificent that Jackson practically bankrupted himself before he left the White House (cité dans Burke, 1941, II : 346).

Cette dégradation financière exigeait une réaction rapide. En mars 1832, Jackson écrivit à John Coffee de collecter l’argent dû par ses débiteurs :

‘I will thank you at as early period as your leisure will permit, to advise me if any, and what funds, can be collected for me—my son’s marriage has increased my expence. The marriage of Mary Eastin which is to take place the 14th of next month, will add a little more to it, and the conduct of my overseer and the smallness of my present crop, will give me nothing from my farm; therefore the desire I have to know all the means I can command and shape expenses accordingly (Bassett, IV : 401).

Malheureusement, Jackson ne pouvait pas contrôler les passions de ses pupilles, même s’il avait exercé sur tous et toutes une influence décisive. L’union de Mary Anne Lewis huit mois après cette lettre, en partie aux frais de Jackson, prouve que malgré l’alarmante ponction opérée sur son fragile équilibre financier, Jackson offrait à l’une de ses jeunes favorites une célébration présidentielle. Le mariage étant le point d’orgue de l’éducation des jeunes, le dernier rite avant l’entrée dans la vie active, il convenait d’offrir aux jeunes mariés une cérémonie qui augurait bien de leur existence future.

Dans une lettre à Rachel, Jackson rappelait quelles étaient les vertus cardinales présidant à une vie honorable  : ‘“I hope all my acts & conduct through life they will measure with propriety and dignity, or at least with what I believe true dignity consists, that is to say honesty, propriety of conduct, and honest independence”’ (Moser, IV : 62). En accompagnant les jeunes gens dans le mariage, les aînés pouvaient inculquer ces valeurs à la nouvelle génération, et lui indiquer le chemin à suivre. Dans une lettre du 18 avril 1833 à Andrew J. Hutchings, Jackson renouvelait ses conseils à l’aube de la nouvelle vie entamée par son pupille à présent majeur :

‘One word to you as to matrimony—seek a wife, one who will aid you in your exertions in making a competency and will take care of it when made, for you will find it easier to spend two thousand dollars, than to make five hundred (...) live within your means, never be in debt, and by husbanding your money you can always lay it out well, but when you get in debt you become a slave, therefore, I say to you never involve yourself in debt, and become no mans surety (...) think of all these things, practice them as you enter life and they will end your days in pleanty and in peace. I say live always within your means (Bassett, V : 60).

Cette mesure presbytérienne, Jackson ne la respectait pas toujours, surtout durant les années extravagantes de Washington. Pourtant, il connaissait le prix de l’argent. Mais la vie des planteurs reposait essentiellement sur le crédit et l’endettement. Tout dépendait de la capacité du gentilhomme à obtenir des fonds et à les rembourser à temps. Pour cela, la réputation était capital(e) et la parole donnée faisait office de garantie. De toute façon, dans ce petit monde clos, le mauvais payeur ne tardait pas à être mis à l’index, avant de sombrer dans la misère. C’est pourquoi Jackson insista toujours auprès de Junior pour qu’il ne s’engageât pas dans des cautions qui le mèneraient à la ruine et qu’il s’acquittât de ses dettes. Après son mariage, le jeune homme devait être le garant de son nom et de celui de sa famille.

Notes
385.

Mary Eastin avait accompagné Junior pour son propre mariage à Philadelphie. Elle devait d’abord épouser un officier de marine du nom de Fisk, agé environ de 40 ans, le 14 février. La nouvelle ayant atteint le Tennessee, le jeune Lucius J. Polk, désespéré, se rendit immédiatement à Washington et conquit apparemment sa belle puisqu’ils furent mariés le 10 avril, négligeant l’année traditionnelle de fiançailles. Ces événements ne reçurent aucun écho défavorable de qui que ce soit. L’histoire ne dit pas comment Fisk fut éconduit ni comment il accepta son éviction.