Parmi les textes qui ont marqué l’histoire littéraire du sceau indélébile de leur universalité, Les Mille et une nuits offrent une vision remarquable du récit. Le dédoublement de la narration en récit cadre et récit emboîté multiplie les possibilités d’exploration du champ littéraire. Les Mille et une nuits a influencé, à l’instar d’autres ouvrages de la littérature arabo-persane, la tradition occidentale du conte comme, à titre d’exemple, Le Décaméron de Boccace, lui-même source d’inspiration de L’Heptaméron de Marguerite de Navarre.
L’aspect le plus significatif pour la perspective que nous envisageons dans ce qui suit est sans doute celui de l’importance capitale, voire vitale, qu’acquiert la parole dans Les Mille et une nuits. Edgard Weber, dans son étude du chef-d’oeuvre anonyme, évoque ce point auquel nous nous intéressons. Il désigne la parole telle qu’elle apparaît dans ce recueil de contes, comme « une parole qui lutte contre la mort »240. Et c’est en tant que telle que nous abordons la parole dans les romans de Boudjedra et Kundera. Nous ne nous arrêtons certes pas au procédé formel du récit cadre repris dans La Répudiation et L’Insolation car tel n’est pas notre propos. Cependant, nous évoquerons entre autres procédés, celui de l’enchâssement des récits en tant que révélateur de l’écriture de l’urgence.
- WEBER, Edgard. Le Secret des Mille et une nuits – L’Inter-dit de Shéhérazade, Paris, Eché, 1987, 237 pages; p. 5.