b) Explications, ajouts :

  1. « ...ses mollets gainés de nylon (ajoutant au désir brut un érotisme publicitaire de mauvais aloi)... » p. 12. [description]

  2. « ...mes cauchemars ... où les femmes jouaient toujours des rôles très importants (comme dans cet affreux rêve où j’avais vu un lapin écorché sur lequel on jetait des bassines de sang, alors que ma mère, à côté, agonisait par la faute de menstrues démentielles qui ne voulaient pas s’arrêter; dans mon cauchemar, je ne faisais pas la liaison entre le sang déversé sur l’animal excorié et le sang de ma mère, et ce ne fut qu’au réveil que je me rendis compte que tout le sang provenait de ma mère, vidée et râlante). » p. 13. [explication et description]

  3. « ...soudainement j’éprouvais le besoin d’énoncer à haute voix des certitudes flagrantes. (La rue en bas est étroite. Elle débouche sur les quais. Hier, nous avons mangé des crevettes grillées dans une gargote du port où l’on nous avait proposé du haschisch; j’ai répondu brusquement : non ! Céline m’a regardé avec un petit air étonné. Au retour j’ai lavé ma chemise dans le lavabo.)... » p. 18. [explication et description]

  4. « ...Céline ... à qui je m’ingéniais à ne plus parler (disant que je ne savais plus)... » p. 29. [précision]

  5. « ...le mouvement ... devient obsédant et pénétrant (prélude à l’acte sexuel). » p. 37. [aparté]

  6. « ...la tortue, morte maintenant et dont personne ne s’était occupé. (Ma, demain, lui ferait de belles funérailles et irait peut-être jusqu’à encenser la maison, en hommage à l’animal qu’elle avait amené avec elle le jour de son mariage.) » p. 50.

  7. « Et la chanson de l’eau (chasse, bidets). » p. 61. [explication]

  8. « ...mon compagnon (ou mon frère aîné)... » p. 61. [explication]

  9. « Ma chambre (c’était celle de ma mère, en même temps)... » p. 73. [explication]

  10. « ...un foisonnement multicolore (vert, rouge...). » p. 73. [description]

  11. « Lui, persistait dans son fracas (tumulte et coups...). » pp. 87-88. [description]

  12. « ...nous ... donnons des noms splendides aux insectes (rien que des noms de rois et d’empereurs). » p. 96. [explication]

  13. « Je ne me souviens que de leurs chansons stupides (Colombes !) ». p. 103. [illustration]

  14. « (Carnet de Zahir découvert dans un tiroir, après sa mort.) p. 104. [précision]

  15. « (Carnet de Rachid récupéré par Zahir.) » p. 106. [précision]

  16. « Euphémisme (huile, vaseline, fornication). » p. 107. [exemples]

  17. « Je rêve debout (la putain au maillot jaune... C’est un camarade de lycée bègue; il manque les cours d’arabe pour aller au bordel. Il raconte. Il nous énerve à bégayer au moment le plus crucial. Nous exigeons des détails. Pourquoi n’enlève-t-elle pas son maillot jaune ?Il ne sait pas. A-t-elle de gros seins ? Enormes ! Il sait aussi la pommade onctueuse dans le gros machin. Il n’ose pas dire son nom. Il s’affale sur la table, jouit à nouveau devant nous. Plus envie de travailler. Aller en groupe reluquer la fille et vérifier les dires du bègue...). » pp. 107-108. [explication]

  18. « Réduit à n’être qu’un lèche-plaies longitudinales (toujours ce goût de sel lorsque je fait l’amour, lorsque j’entend ma mère uriner et lorsque mes cousines me laissent les regarder faire) » p. 110. [explication]

  19. « Il ... risquerait de suffoquer (il est si maigre !). » p. 111. [explication]

  20. « Entre le père inexpugnable et sa femme entrouverte, j’étais pris en tenailles (le contact épidermique m’était vital et je cherchais avec la même ferveur les coups du père et les caresses de la marâtre; c’était, en fait, une façon comme une autre de me déculpabiliser). » p. 116. [explication]

  21. « Le chat, alors, avait l’air de rigoler si fort que sa moustache en tremblait. (Il ressemblait au chat de la vieille institutrice française qui passait son temps à regarder la mer; elle nous obligeait à apporter, pour la leçon de sciences naturelles, des poissons qu’elle donnait au matou-roi et on avait beau étudier d’autres animaux et d’autres flores, c’était toujours des poissons qu’elle nous réclamait; pour arrêter la saignée que l’entretien du félin occasionnait dans le budget de nos familles, nous décidâmes de mettre le chat dans un sac et de le jeter à la mer : l’institutrice en mourut. Elle ne pouvait plus haïr les Arabes ! ». p. 122. [description]

  22. « ...eau fraîche à goût de goudron (précieuse amertume)... » p. 126. [illustration métaphorique]

  23. « (Parfois, j’avais des tendresses qu’il aurait fallu pressentir. Tant pis ! elles étaient prêtes à se libérer de notre tutelle et de celle des avunculaires, pour aller n’importe où, fût-ce chez un idiot qui à quarante ans urinait dans son lit et restait attaché à une mère dominatrice qui le gâtait de pâtisseries turques. Saïda nous haïssait; mais l’habitude avait vite anéanti toute révolte en elle; et son refus de lutter n’était qu’une prétérition : elle était déjà entrée dans le malheur. Elle changeait tous les jours les draps du lit conjugal; combien d’enfants, échappés de justesse à l’aliénation, avait-elle mis au monde ? Elle n’en était plus à dénuder sa poitrine derrière les fenêtres qui donnaient sur un certains salon de coiffure blafard où les amis de Zahir venaient entre deux pipes reprendre contact avec le réel. (Mais pourquoi parler de Zahir ? n’était-il pas mort ?) [parenthèse dans la parenthèse] Une longue vie de femme algérienne, en somme ! L’honneur, l’encens, les circoncisions, les provisions de couscous, de tomates séchées et de viande salée, les prières du soir, les carêmes interminables, les sacrifices de moutons... Elle aussi, en était au chapelet d’ambre – ramené par son beau-père de la Mecque où il accomplirait bientôt son septième pèlerinage – qu’elle triturait plutôt qu’elle n’égrenait patiemment à la façon des vieilles dévotes. Elle avait encore le temps de tisser un sperme de fou dans son ventre; l’accouchement se faisait tous les neufs mois, dans une ambiance de kermesse : tout le monde hurlait et Saïda suppliait tous les saints de hâter sa délivrance. Louange à Dieu, elle ne suffoquait pas à respirer cette odeur âcre et lourde; les négresses se mettaient à pousser des « you-you » stridents pour annoncer l’arrivée d’un nouveau monstre.) » pp. 130-131. [description]

  24. « ...était-ce un pot qui appartenait à Zoubida ? (paresseuse, elle ne voulait pas quitter sa chambre et avait essayé de faire comme les hommes dans le lavabo, ce fut un échec et elle m’en voulu de cette suprématie.) » p. 131. [description explication]

  25. « Mes tripes collent à la paroi d’un anus mal torché (pour éviter de lui faire un enfant, j’empruntais la voie rectale). » p. 132. [explication]

  26. « ...une couverture tchèque dont on aperçoit déjà la trame (très courte, cette couverture de couleur grège ramenée du camp)... » p. 136. [description]

  27. « ...lunettes aux verres éblouissants qui reflètent tout (bureau, table, fauteuils, murs, couleurs, plantes, tableaux, etc.)... » p. 143. [énumération]

  28. « ...mon image transparente me lancine (il s’agissait alors de partir à la recherche d’une cohorte cisaillée par les ballets et les boulets, dissimulée derrière la faille prodigieuse d’une gorge désertique où le seul point de repère était un tunnel noir de fumée, interdit aux trains, et où se perd ma mémoire. Tapis, camouflés, puis vite surgis et dressés, nous haletions, dans un délire d’aubépine et de rocaille. Les fusils parsemaient ma trajectoire, ainsi que la senteur du sang dense et torrentiel à l’oblique d’une gorge qui appartenait peut-être à un garde forestier corse. Le viatique aspergé, nous ne pouvions manger pendant des jours, non que la nourriture vînt à manquer, mais par la faute du défunt corse moustachu dont la bedaine floche ne cessait de harceler nos cauchemars et de pourrir jusqu’à l’atmosphère des grottes dans lesquelles nous étions cachés; et nous n’aurions de cesse que nous ne l’ayons dix, vingt fois tué; mais dix, vingt fois resurgi du fond d’une ténacité ancestrale, il lançait à notre poursuite un bataillon d’aspics et de lombrics, malmenant notre gibbosité devenue insupportable, à flanc de colline où les hommes roses s’esclaffaient de notre insouciance simulée; à notre tour, nous ruisselions de sang et n’arrêtions pas de provoquer les chacals, au point que les malentendus nous donnaient des prurits; du soleil tombaient des pointes effilées qui, malgré leur acuité, amenaient avec elles le vague nécessaire à notre survie; les collines s’enrobaient de nuit et les galets devenaient frais, malgré les cérastes qui s’éternisaient à des jeux amoureux et pervers dont nous appréciions quand même le répit; à ce moment, nul ressac du rien fugace et bleuté ne nous parvenait; mais nous avions la certitude de la proximité de la mer, au bord de laquelle nous allions bientôt reposer nos pieds ensanglantés par les marches harassantes). » pp. 143-144. [description]

  29. « Ridicule, ton chapeau de brousse ! répondait-elle. (Elle avait la manie de sauter sur les détails.) » p. 146. [explication]

  30. « ...l’aine qu’elle avait large et généreuse (au dire des cousines qui l’avaient vue se déshabiller)... » p. 158. [explication]

  31. « ...une image (celle du mort)... » p. 164. [précision]

  32. « ...il faut se venger... dès que l’odeur du sang aura disparu de partout (maisons, rues, rigoles et cône de déjection). » p. 204. [énumération]

  33. « ...on fera des prères supplémentaires, non pour la paix de mon âme (je n’en ai pas!)... » p. 205. [explication qui est aussi une confidence]

  34. « Se débiner. Même misère que dans les quartiers arabes, du côté du port; pas du côté d’El Biar (villas, jasmin). » p. 206. [illustration]

  35. «  Les gens sont nets et ont tous un journal plié sous le bras (signe de distinction). » p.207. [explication]

  36. « ...quelques touffes de poils blancs, presque insolites, apparaissent sur ce corps gras et huileux ... (sur les flancs, la marque nette, quasi laiteuse, due au frottement des bras contre le corps). » p. 208. [description]

  37. « Fuir (mais les femmes attendent les têtes de mouton pour les briser en deux et en extraire la cervelle flasque). » p. 210. [explication]

  38. « ...seul Zahir pourrait expliquer l’épisode du four. (Lui que ma mère a surpris, un jour, dans une position scandaleuse, en compagnie d’un gamin du voisinage; elle ne comprenait pas et n’en croyait pas ses yeux; abominable, le spectacle de son enfant monté en grande pompe sur le dos légèrement duveteux de l’autre misérable avec sa sale figure de petit jouisseur; emportés tous les deux dans un monstrueux va-et-vient qui ébranlait leurs corps élancés, la tête ballottante, à la recherche d’un plaisir, somme toute, formel, entrevu à travers les fanfaronnades des grands, pressenti chez les femmes qui erraient l’aine lourde, dans la maison comme si elles se rendaient compte tout à coup du plaisir que pourrait leur procurer ce fouillis de poils et de chairs vives, rouges et molles, annonciatrices, déjà, de l’ivresse du tréfonds; et Ma les regardait faire, et Ma ne savait que dire; et moi derrière elle, pris entre le fou rire et la violence, et les soeurs derrière moi fixant Saïda et attendant d’elle quelque explication à cette grotesque et haute pitrerie des deux garçons juchés là-haut sur la terrasse et dont on apercevait les têtes et les bustes qui gigotaient, se malmenaient et se violentaient tragiquement; nous tous, rivés à ce spectacles incroyable, debout dans cette grande pièce tout en baie, ouverte sur la terrasse pleine de draps blancs et de vêtements multicolores roidis par le soleil qui s’incrustait dans chaque goutte de couleur, dans chaque millimètre du tissu criblé, craquelé sous la constante cuisson du ciel – poutre bleue au-dessus de cet étalage de linge séchant au grand air; et moi griffé, écartelé, entre la bouffonnerie et la sage lente mort, dans cette belle chaleur immobile qui rendait les vibrations de l’air plus sonores et plus réelles; et Zahir qui ne se rendait pas compte ! toujours amarré à son camarade rechignant, peut-être, contre la lenteur du partenaire qui venait juste de faire l’expérience de cette déflagration au bout de son membre, non pas hideux, non pas crispé, mais simplement étonnant dans son érection sordide; et Ma qui ne pouvait interpeller son fils car elle n’était pas capable d’aller jusqu’au bout de l’explication à donner à cette agglomération de deux corps entrevus l’espace d’une douleur – d’autant plus âpre qu’elle n’allait pas pouvoir s’exprimer; et Ma finit par nous chasser de la pièce, ferma la porte à clef : « ce n’est rien qu’un jeu brutal », dit-elle). » pp. 210-211-212. [explication de son affirmation – phrase soulignée – par la description d’un autre épisode]

  39. « ...Membres Secrets du Clan (M.S.C.). » p. 214. [précision]

  40. « ...les Membres Secrets, à la solde du Clan discret et anonyme des bijoutiers et des gros propriétaires terriens (dont Si Zoubir) » p. 214. [précision]

  41. « ...encore des stylos, éclatés et bavant d’une encre qui salissait leurs doigts grassouillets (ils s’étaient engraissés rapidement en quelques années d’abondance et de traitements mirifiques)... » p. 217. [explication]

  42. « ...couverture complètement lacérée pour l’heure et qui ne pouvait plus servir à personne, pas même au Devin (enterré dans une chemise mauve et un blue-jean râpé, à la lisière d’une forêt que personne ne pouvait plus localiser, pas même ceux qui l’avaient enterré, gênés peut-être par la rapidité avec laquelle ils avaient opéré, pendant cette pluvieuse et froide journée; pressés, peut-être, de lui voler ses lunettes de soleil, sans aucune valeur mais qui les fascinaient à cause de ce miroitement fabuleux qui plaquait sur les yeux des couleurs aveuglantes et meurtrières – soleil et taches d’ombre superposés – donnant aux visages et aux objets alentour un air fantastique et irréel; jamais ils ne lui avaient pardonné de leur faire ainsi plisser les yeux chaque fois qu’ils essayaient de le regarder en face; et lui s’amusait de son astuce et de leur trouble, prêt à en rire, non seulement avec nous qui étions ses amis, mais avec eux aussi qui maugréaient dans leurs barbes, s’enfermaient dans leur gangue, voyant bien qu’il se moquait de leurs traditions ancestrales, et préparaient déjà leur revanche pour le faire taire à jamais; il profanait à leurs yeux tout ce qui était sacré; alors que lui, assis sur ses talons à la manière d’un singe ou d’un devin – son surnom lui venait de cette position qu’il préférait – , passait son temps à expliquer aux paysans, à chaque halte, ses théories plus ou moins arides; eux le comprenaient, hochaient la tête et crachaient par terre en signe d’assentiment; les Membres du Clan, faufilés parmi eux ne disaient rien). » pp. 219-220. [description]

  43. « ...ils avaient beau me hurler à l’oreille (croyant à une faiblesse auditive)... » p. 224. [explication]

  44. « ...une voix qui se voulait calme et patiente (comme celle d’une personne sensée parlant à un malade, et qui, au fond, était très agressive)... » p. 232. [explication]

  45. « ...intrusion (factice ou réelle)... » p. 232. [qualification]

  46. « ...l’hôpital (ou clinique)... » p. 234. [ajout]

  47. « ...la prison (ou bagne, ou villa). » p. 234. [pour ces deux dernières parenthèses, il s’agit de rectifications, d’ajouts, pour signifier que quelque soit le terme employé, le lieu est exécrable]

  48. « ...faune nuisible (rongeurs, protozoaires et hyménoptères)... » p. 235. [énumération d’exemples]

  49. « ...mon état mental précaire (selon les dires des médecins et de Céline)... » p. 239. [précision]

  50. « ...père (aujourd’hui assimilé aux membres du Clan des bijoutiers)... » p. 241. [précision]

  51. « ...la mort du Devin devait, prétendaient les Membres Secrets, supprimer toute démagogie , grâce à cette collaboration de classes que le Clan (depuis qu’il avait pris le pouvoir, racheté tous les cafés et les bordels aux Espagnols et aux Corses et essaimé à travers le pays des villas de souffrance, mieux équipées parfois que celles des hommes roses pendant la guerre de sept ans) essayait de rendre inévitable... » pp. 241-242. [précision]

  52. « ...elle savait que j’étais au courant de plusieurs de ses tentatives de suicide (elle se tailladait à chaque fois les veines du poignet)... » p. 246. [description]

  53. « ...l’enfer de l’électrochoc (ou des électrodes grises)... » p. 250. [autre qualificatif]

  54. « ...puiser notre force dans la rancoeur du sang (de tout le sang !)... » p. 250. [précision]

  55. « ...sang (sang des animaux sacrifiés et sang des femmes). » p. 250. [précision]

  56. « ...peuple des chômeurs (200 000 de plus chaque année, selon les propres statistiques du Clan !)... » p. 251. [précision]

  57. « Demain, le chant des prisonniers (dont le poète Omar) me parviendra de la cour de la prison... » p. 252. [précision]