6. Conclusion générale et perspectives

En tout premier lieu nous pouvons noter qu’il y a eu dévolution du problème aux élèves. Ils ont pris à leur charge la construction de nouvelles connaissances. Il semble que le Jeu Télévisé du Mercuropoly présente un cadre propice à l’utilisation et la mobilisation de connaissances multiples. Les élèves, sortis de leur contexte scolaire et motivés par le jeu mettent toutes les chances de leur côté pour gagner.

Nous observons en particulier que les interactions entre les élèves sont riches en connaissances. Ils mobilisent facilement ce qu’ils ont appris en classe et le relient aisément avec les informations dont ils disposent. Les discussions sont l’occasion pour chacun de faire appel aux savoirs partagés par tous ainsi que d’acquérir de nouvelles connaissances.

La compréhension des informations

En ce qui concerne la compréhension des informations des sites. Nous pouvons seulement souligner que nous n’avons observé aucune preuve de non-compréhension. Il semble que les élèves puissent aisément se déplacer dans les sites, chercher et sélectionner les informations qui leur semblent pertinentes. Il apparaît également qu’ils peuvent relier ces informations à leurs propres connaissances.

L’enjeu global est lié au gain d’un jeu. Toute l’énergie des élèves est donc tournée vers la recherche de la bonne réponse, leur permettant de convaincre leurs partenaires et donc d’engranger des “ points ” les rapprochant d’une victoire.

Dans la suite, nous distinguons les différents facteurs de la phase de recherche documentaire et de la phase d’interaction qui peuvent influer sur les activités des élèves.

La phase de recherche documentaire 

Pour les élèves, l’enjeu de la recherche documentaire est de trouver des données permettant de répondre à la question posée.

La durée de la recherche d’informations est restreinte, les élèves devant trouver des données rapidement afin de fournir une réponse.

Les productions finale et intermédiaire sont pratiquement simultanées, elles sont même parfois identifiables l’une à l’autre, les élèves développant leur idée en répondant à leurs camarades.

Le type de question posée (demande d’une réponse exacte et d’une justification) entraîne les élèves à utiliser une justification argumentée. Il leur faut en effet convaincre leurs partenaires de la véracité de leur réponse.

Les élèves possèdent suffisamment de connaissances pour comprendre les questions ainsi que les informations des sites. Ils utilisent largement ces connaissances à la fois pour répondre aux questions, les traiter, et pour reformuler certaines connaissances des sites.

La stratégie de recherche documentaire est celle que nous avons observée dans les deux expérimentations précédentes (Conception et production d’une affiche à partir d’une recherche documentaire et Production d’un texte et débat via Internet à partir d’une recherche documentaire). Les élèves se basent sur des mots-clefs de la question pour rechercher des informations dans les sites. Il apparaît cependant qu’à la différence des deux situations précédentes, les élèves ne peuvent trouver immédiatement une réponse à la question posée. Ils sont dans l’obligation de mobiliser et de relier des connaissances entre elles :

Notons que les élèves sont également parfois contraints de reformuler les questions ou les informations des sites. Ceci n’est possible que dans la mesure où ils utilisent leurs connaissances propres. En fait, ils n’éprouvent le besoin de traiter la question et/ou les informations seulement dans la mesure où cela est nécessaire pour trouver des données pertinentes dans les sites. L’adaptation leur permet de “ glaner ” des informations pour construire la réponse.

Notons qu’ici déjà, les élèves établissent des liens entre les connaissances propres et les informations des sites. Nous observons des activités liées à la compréhension que nous n’avons pas observé dans les deux expérimentations précédentes.

La phase de confrontation

Pour les élèves qui cherchent et doivent donner une réponse, l’enjeu de la confrontation est de convaincre leurs camarades. C’est à cette seule condition qu’ils pourront gagner des points et se rapprocher du gain de la partie engagée.

Les élèves du groupe “ chercheur ” ont peu de temps pour convaincre leurs camarades du groupe “ évaluateur ” de la justesse de leurs justifications, mais ils disposent constamment des informations des sites et s’y réfèrent de temps en temps pour trouver des arguments supplémentaires.

Notons que les élèves sont tous d’un niveau scolaire équivalent. Ils possèdent des connaissances partagées auxquelles ils font très aisément allusion lors de la phase de justification.

Il est également intéressant de signifier que lorsque cela est possible les élèves préfèrent de beaucoup utiliser les connaissances des sites plutôt que les leurs.

Il semble que la mise en commun des facteurs : temps (restreint), enjeu (gagner des points) et connaissances partagées engendre une situation tout à fait propice à la mobilisation, l’utilisation et la mise en lien des connaissances.

Ainsi, les élèves poussés par l’envie de gagner mais disposant de peu de temps sont amenés à utiliser tous les moyens à leur disposition pour trouver une bonne réponse ainsi qu’une justification acceptable par leurs “ adversaires ”. Ils font alors plus facilement appel à des connaissances qu’ils savent également possédées par leurs camarades. Ces savoirs communs (partagés) ne peuvent être discutés, mis en doute (ou, s’ils le sont, chacun peut défendre ses positions en faisant appel à des références communes). Pour les élèves, y faire allusion signifie se placer sur un terrain commun où tout le monde comprend et accepte la même “ chose ”.

Il semble donc que plusieurs facteurs jouent des rôles non négligeables dans la dévolution de la construction du sens par les élèves (et donc également dans l’émergence des connaissances) :

Une prochaine expérimentation devra donc s’attacher à la mise en lumière de l’influence de la situation de jeu telle que nous l’avons construite ici.

Si nous considérons le même type de questions, la même mise en confrontation entre les élèves, mais ceci dans une situation de recherche documentaire “ normale ” où l’enjeu n’est pas de gagner, où les élèves disposent de davantage de temps, quels seront les résultats obtenus vis-à-vis de la mobilisation des connaissances ?

C’est à ces questions que la prochaine expérimentation entend répondre.