On a coutume de dire qu'une thèse est une longue aventure solitaire, alternant les moments les plus euphoriques avec les périodes les plus noires, une expérience à vivre, parce qu'elle peut difficilement se partager. Certes, c'est sans doute ce qui laisse la plus durable impression après trois années d'un travail acharné. Mais c'est un peu vite oublier la multitude de rencontres, d'échanges, de conseils, d'encouragements, de critiques, sans lesquels la qualité de la pensée serait bien pauvre. Sous cet angle, le traditionnel exercice des remerciements n'est plus un catalogue de politesses dressé sans enthousiasme, en veillant à ne froisser personne. C'est, au contraire, un moment de prise de recul, qui rend plus lucide sur la pratique de la recherche et en révèle sa dimension ô combien collective.
Parmi les nombreuses personnes qui m'ont aidé dans mon aventure, il y a d'abord celles qui ont rendu cette recherche possible. Au premier rang, Andrée Tiberghien s'est démenée, comme à son habitude, pour que mon travail ne soit pas pur bénévolat. Je me souviendrai longtemps de cette période pleine d'incertitudes, où nous recherchions désespérément un financement auprès de certaines entreprises. Et puis la chance nous a sourit lorsque l'ISTP de Saint-Etienne, sous la houlette de Roger Helliet et de Claude Boyer, a choisi de se donner les moyens de mieux comprendre les mécanismes d'apprentissage des élèves dans les formations par alternance. Elle m'a encore sourit, lorsque, trois ans plus tard, Claude Boyer, Paul Rousset et l'équipe du département OGP de l'IUT Lumière m'ont permis de terminer la rédaction de la thèse dans de bonnes conditions. Que toutes ces personnes soient remerciées, car la présente thèse n'aurait pas existé si elles n'avaient pas cru en l'intérêt du travail que j'ai réalisé.
Puis il y a les personnes qui m'ont encadré dans cette recherche pendant trois longues années, supportant, souvent avec persévérance, mes doutes et mes idées reçues. Je dois beaucoup à Andrée Tiberghien, ma directrice de thèse. Elle a pris des risques en me laissant une grande marge de manoeuvre dans mes lectures, dans mon travail de terrain et finalement dans mes analyses. Elle a su intervenir aux bons moments, insistant sur l'utilisation de certains concepts clés de la didactique, qui se sont avérés effectivement des points centraux de la recherche. Mes remerciements vont aussi à Michèle Grosjean. Lorsque nous lui avons proposé de co-diriger la thèse, elle n'a pas hésité une seule seconde, nous rejoignant ainsi dans une barque navigant souvent en eaux troubles. Je la remercie, en particulier, pour ses précieux conseils de lecture et l'énergie avec laquelle elle a pointé mes incohérences. Au delà de la qualité des conseils scientifiques qu'elles m'ont apportés, je tiens aussi à remercier Andrée et Michèle pour leur amitié et leur soutien sans faille, sans lesquels j'aurai certainement eu plus de moments difficiles.
Ces trois années ont aussi été l'occasion de mieux connaître le monde de la formation professionnelle, à la charnière des sphères éducatives et industrielles. Je tiens à remercier ici toute l'équipe des permanents de l'ISTP pour leur accueil et tout le plaisir que j'ai eu à travailler avec eux. Ils m'ont beaucoup appris sur les spécificités de la formation par alternance des ingénieurs. En retour, je pense leur avoir apporté un regard neuf sur les mécanismes de l'apprentissage en situations professionnelles. Nos débats n'ont pas toujours été de tout repos. Mais la volonté existait, de part et d'autres, de trouver les compromis les plus profitables aux élèves et aux entreprise. J'ai aussi eu l'occasion de discuter, plus qu'à l'occasion, avec les membres de l'IRUP, m'ouvrant, par là, à d'autres types de formations et de questions. Membres de l'ISTP ou de l'IRUP, quelle que soit leur fonction, ils ont montré de l'intérêt pour mon travail, et plus largement pour ce que je suis. Leurs témoignages m'ont souvent aidé à garder le cap dans les moments difficiles.
Passons maintenant à ceux qui furent plus directement sous les feux de la rampe, acceptant d'être observés, questionnés, enregistrés jusqu'à plus soif. Qu'ils soient élèves, tuteurs entreprise ou tuteurs école, je remercie sincèrement Stéphane Albrieux, Johann Romeyer, Daniel Triouleyre, Pascal Masson, Michel Sauzet et Jean-François Collard qui m'ont tous consacré de longs moments de leur précieux temps pour satisfaire mon appétit de questions. J'en profite aussi pour remercier les responsables et les personnels des deux entreprises dans lesquelles j'ai conduit mes observations. Les conditions qui m'ont été offertes ne pouvaient pas être meilleures. Je n'ai jamais essuyé de refus de quiconque, mais au contraire, toujours reçu un accueil intéressé.
J'ai aussi trouvé au sein de l'équipe COAST et plus largement du laboratoire GRIC, un environnement humain chaleureux, riche et stimulant, que ce soit au cours des séminaires, des discussions informelles ou plus simplement dans tous les gestes du quotidien. La qualité de cette atmosphère tient au souci des deux directeurs successifs du GRIC, Catherine Kerbrat-Orrechioni et Christian Plantin, de donner les meilleurs conditions possibles pour la recherche. La qualité de mon environnement de travail doit aussi beaucoup à ceux que j'ai côtoyé au quotidien, en particulier les thésards "coastaux", mes compagnons les plus proches dans l'apprentissage de la pratique de la recherche. Ils furent les joyeux régulateurs des angoisses qui n'ont pas manqué de m'assaillir plusieurs fois. Je les en remercie chaleureusement, car sans eux, j'aurai eu certainement beaucoup de mal à trouver la motivation pour me lever certains matins.
Il ne saurait être question de clore ces remerciements sans m'attarder sur les êtres qui me sont les plus chers.
Mes amis d'abord : ils m'ont vu passer par tous les stades psychologiques possibles et imaginables sans toujours comprendre l'origine de mes euphories ou de mes asthénies. Je les remercie pour les discussions qui m'ont sans cesse obligé à décrocher de mes voyages intérieurs pour reprendre pied dans le concret de la vie et pour les encouragements qu'ils n'ont pas manqué de m'apporter à de nombreuses reprises.
Ma famille ensuite : j'ai une pensée particulière pour mes parents. J'ai conscience de l'étrangeté, pour eux, de mon projet de recherche. Malgré cela, ils m'ont soutenu et se sont intéressé à mon travail. Merci également à mes frères, ma soeur et à toute ma belle famille pour toute l'affection témoignée fréquemment pendant ces trois ans.
Cristelle, ma femme, enfin : elle partage mes pérégrinations intellectuelles depuis que je me suis mis en tête de bifurquer des études techniques vers les sciences humaines, et de réaliser une thèse. Il lui a fallu de la patience et de l'amour à revendre pour me supporter et m'apporter tout le réconfort dont j'avais besoin aux moments les plus difficiles de mes recherches. Je souhaite lui dédier ce mémoire de recherche car le travail qui a été nécessaire à sa réalisation lui doit énormément.
" Ce que faisait Stillman dans ses pérégrinations demeurait un mystère pour Quinn. Il pouvait certes voir de ses propres yeux ce qui se passait, et il notait tout fidèlement dans son cahier rouge. Mais le sens de ces choses continuait à lui échapper. Stillman ne semblait jamais aller quelque part en particulier et il ne paraissait pas davantage savoir où il allait. Pourtant, comme à dessein, il se confinait dans une zone circonscrite avec exactitude, limitée au nord par la 110ème rue, et au sud par la 72ème , à l'ouest par Riverside Park et à l'est par Amsterdam Avenue. Dans ses déplacements, aussi livrés au hasard qu'ils puissent paraître (et leur trajet variait tous les jours), Stillman ne franchissait jamais ces frontières. Une telle précision confondait Quinn, car, à tous autres égards, Stillman ne semblait pas avoir de but"
(Paul Auster – Cité de Verre)