3.1 Une stratégie de différenciation des modes d'entrée dans l'activité

Au départ de cette réflexion, il y a l'opposition, constatée en ergonomie, de deux modes d'entrée dans l'activité : l'approche par la tâche ou bien par les commentaires de l'acteur observé.

3.1.1 L'approche par la tâche

Le premier mode, exposé dans un article de référence de J Leplat et J-M Hoc (1983), repose sur la distinction entre tâche prescrite, tâche effective et activité. La tâche prescrite est ce qui est donné à faire à un acteur, la plupart du temps par des supérieurs. Mais les exigences explicites passent sous silence de multiples conditions nécessaires à l’activité. Pour cette raison, Leplat et Hoc ont introduit la notion de tâche effective, correspondant aux buts et conditions qui sont réellement pris en compte par celui qui travaille. En conséquence, l'analyste doit chercher à analyser a priori cette tâche effective, car elle est le modèle qui déclenche et guide l'activité de l’acteur. Concrètement, cela passe par une étude minutieuse, des prescriptions et de l'environnement de travail réel d'un acteur, afin de dégager les caractéristiques de cette tâche effective. A l'issu de ce travail, des catégories de pensées ou d'actions peuvent être définies. Elles vont fournir à l'observateur les outils de description et/ou d'analyse33 de l'activité effective de l'acteur.

Certains auteurs réfutent cette entrée par la tâche, car selon eux, elle se heurte à des difficultés importantes :

‘" Un tel point de départ rencontre une première difficulté [..] : la tâche prescrite y est souvent très mal définie, contrairement aux situations de laboratoire. Mais on se heurte à une difficulté plus radicale : les questions que l'on se pose à propos de l'activité sont commandées par une description extrinsèque à l'activité, celle de la tâche. [En procédant ainsi] nous n'avons aucune garantie de ne pas attribuer indûment à l'opérateur, une organisation des processus qui n'est pas la sienne, lorsqu'il est engagé dans la réalisation de son action" (Pinsky, 1991, p128).’

Cette remarque vaut particulièrement pour notre étude, en regard de l'imprécision des prescriptions fournies aux élèves, mais plus généralement en raison de la forte incertitude sur ce que seront, a priori, leurs environnements de travail. La correspondance entre les contraintes de l'environnement et l'activité effective de l'élève est très aléatoire, puisque l'on ne contrôle pas a priori où se déplacera l'élève, ni ce qu'il fera.

Notes
33.

Les catégories peuvent être un outil de description lorsqu'il n'est pas possible d'utiliser des modes d'enregistrement automatiques de l'activité, vidéo ou audio, voire informatiques. Le travail de l'observateur consiste alors à décider régulièrement quelle catégorie rend compte d'un acte, d'un processus cognitif, ou plus largement d'une action observé(e)