2.2 Les caractéristiques du réseau socio-technique de production

2.2.1 Des analyses rapidement réalisées

Commençons par nous intéresser au réseau socio-technique de production de l'entreprise E2 concerné par le Projet de J, à savoir la ligne de production ampoule. En fait, ce ne sont pas seulement les caractéristiques des réseaux socio-techniques de production qu'il faut prendre en compte dans notre analyse, mais simultanément le type de projet confié. En effet, le Projet de J a comme particularité d'être constitué d'une succession de projets qui l'oriente tour à tour sur des parties relativement restreintes du réseau (cf. figure 3).

De fait, J n'a pas à faire une analyse préalable de l'ensemble du réseau pour cerner et localiser les points de dysfonctionnements, avant de concentrer son attention sur ces points locaux. Pour tous ses projets, il sait, a priori, où il doit faire les changements et quelle est la nature de ces changements :

  • mettre en place un dispositif de séchage automatisé et sécurisé sur un poste de travail pour éviter que les vapeurs d'un produit n'intoxiquent les opérateurs,

  • ajouter un dispositif automatique de vérification du niveau des ampoules sur des postes de conditionnement pour fiabiliser ce contrôle que l'on sait trop variable lorsqu'il est fait manuellement,

  • remplacer un dispositif de remplissage des flacons devenu trop vétuste, par un dispositif plus moderne et automatisé,

  • modifier l'agencement d'un poste de travail pour que des travailleurs handicapés physiques légers puissent y travailler,

  • modifier l'implantation des différents postes d'une partie de la ligne de production.

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Figure 31 : Zones concernées par les projets de l'élève

Il n'y a donc pas nécessité d'une analyse globale du réseau socio-technique, qui peut être souvent longue et complexe, comme on l'a vu pour le premier élève. On a là une première explication de la faible fréquence des actions d'analyse. Ce n'est pas la seule.

Une autre vient de la densité d'acteurs humains au sein de ce réseau. La production est ici de type discontinu, c'est-à-dire, que le réseau socio-technique s'organise autour de postes de travail, où sont réalisées une ou plusieurs opérations. A chaque poste, se trouvent un, voire plus rarement, deux ou trois opérateurs qui répètent sans cesse un nombre limité d'opérations. Ces postes occupent des espaces relativement restreints : quelques dizaines de mètres carrés, tout au plus. Si bien que les opérateurs ont toujours la même zone de perception et d'action. En toute logique, ils acquièrent donc des connaissances très précises sur ce qui se passe dans cette zone, en particulier sur les caractéristiques des machines qu'ils manipulent quotidiennement et leurs dysfonctionnements les plus fréquents. Pour un ingénieur du service engineering, l'observation n'est donc pas le seul moyen possible pour analyser le fonctionnement de ces postes. Elle peut être considérablement accélérée par des questions aux opérateurs. Les chroniques d'activité locales et globales montrent bien que J utilise souvent de manière privilégiée le dialogue avec les opérateurs. Par exemple, lorsqu'il veut comprendre le fonctionnement de l'actuel dispositif de remplissage (actes n° 30363039, 30483054,30563058), il interroge tour à tour deux opérateurs et le chef de ligne.

Enfin, une autre part de l'explication vient tout simplement du fait que deux des projets ont déjà été entamés lorsque J en prend la responsabilité. L'étape d'enrichissement des données a déjà été réalisée, ce qui contribue à diminuer encore le nombre des actions d'analyse.