2- Un essai de typologie

A partir des années 1950, en même temps que se met en place un système de spécialisation de l’habitat et de hiérarchisation dans le logement social normal, il se développe des formes institutionnelles de logements spécifiques reproduisant ce modèle hiérarchisé (cf. le système des igloos dans les cités de promotion familiale, les PSR, PLR, cités de transit ...) dont ils ne sont finalement que le maillon le plus bas.

Si ces formes institutionnelles de logement spécifique ont à chaque fois failli par rapport à l’intention d’en faire un segment réel de la chaîne du logement, les conceptions qui les ont portées perdurent et se traduisent dans un effort constant de renouvellement des modes d’intervention. Dans cette permanence de la thématique de l’adaptation de l’habitat, le parallèle peut être fait entre l’évolution dans les formes d’intervention, de la répression vers la prévention et l’intégration, et l’évolution dans les formes d’habitat, du spécifique et du ségrégé vers le banal et l’intégré. Ces évolutions formelles laissent toutefois, à travers les produits-logements qui les traduisent, une trace forte dans l’espace urbain.

On peut classer les formes de logement abritant les populations les plus défavorisées selon une catégorisation qui tient compte de la situation de ces logis par rapport aux circuits institutionnels (encadrés ou en dehors) et de leur degré de mobilisation comme support de projets politiques de regroupement des rejetés de la société. Les systèmes locaux chargés de la gestion du logement, pour lesquels la spécificité de ces logements peut représenter un moyen de régulation souple, entérinent cette distinction et s’en saisissent comme élément de régulation à la marge du fonctionnement normal du marché du logement.

Antérieurement puis parallèlement à l’engagement des pouvoirs publics dans la promotion d’un logement spécifique en direction des plus défavorisés, des formes de logements précaires (que nous qualifions ici de traditionnelles) ont de longue date permis à ceux que le fonctionnement du système urbain rejetait de se maintenir ainsi sur les marges, y compris internes et interstitielles, de la ville. La subsistance de ces formes jusqu’à nos jours révèle non seulement la difficulté d’apporter une solution réelle définitive aux problèmes de logement mais surtout souligne leur rôle dans la régulation des marchés du logement local. Elles n’en ont pas moins été largement critiquées combattues, pour des raisons tenant à leurs caractéristiques intrinsèques et aussi, plus implicitement, parce que jouant mal ce rôle de recours et de refuge pour les plus démunis qui leur était dévolu.

Ces formes sont peu nombreuses et peuvent faire l’objet d’une première typologie, à laquelle se rajouteront les formes institutionnelles que les pouvoirs publics vont promouvoir à partir des années 1950, le plus souvent d’ailleurs par la remobilisation, dans un éternel mouvement de récupération-amélioration, de formes d’habitat déjà expérimentées, dont l’efficacité se révélera à chaque fois moins évidente que la présentation qui en est faite.