2.1. Le tiers symbolique

L. Quéré indique que des sujets sociaux qui prennent part à une activité communicationnelle ne peuvent arriver à la compréhension que par un intermédiaire, ce tiers mentionné étant nécessairement objectif. En effet, ce tiers que L. Quéré qualifie de « tiers symbolisant » est défini comme « ‘le pôle extérieur d’un neutre, qui, n’étant ni (pour) l’un, ni (pour) l’autre, et occupant une position de référence possible pour l’un et l’autre, les conjoint dans leurs différences ’» (Quéré L., p33, 1982)156. Outre l’intérêt majeur que revêt cette citation - elle résume parfaitement l’objet de la médiation -, elle permet ici de comprendre que L. Quéré fait référence à un méta-niveau qui n’est pas le médiateur physique157 auquel nous pensions nécessairement avec D. Van Den Hove.

Il s’agit en fait d’une allusion au pôle institutionnel qui apparaît alors comme l’artisan de la médiation dans tous les échanges auxquels se prêtent des sujets sociaux. Dès lors, la médiation devient ce processus de va et vient permanent entre des sujets sociaux qui cherchent à se comprendre. Tout se passe « ‘comme si la communication entre les sujets sociaux nécessitait à chaque instant la représentation d’une totalité sociale’  » (Quéré L., p33, 1982)158 Cela signifie que ce rapport d’échange auquel nous faisons référence est contraint de s’objectiver lui-même dans ce que L. Quéré finit par appeler une extériorité ou une altérité.

Cette idée nous séduit car, face à l’incompréhension et l’anxiété qu’occasionne la perspective confuse d’une société fondée sur les technologies d’information et de communication, l’idée d’offrir aux milieux ruraux la possibilité de « visualiser » leur devenir dans cette société informationnelle par une information accrue et un apprentissage adapté trouve sa place. La médiation devient alors le moyen d’aider une population à construire une image de l’innovation attachée à cette société informationnelle, image qui facilite la compréhension du projet collectif que cette même société engendre. Cette phase se présente comme une phase intermédiaire entre l’incompréhension et la décision d’adoption.

En définitive, bien au-delà d’un processus de résolution de conflit, et dans la perspective qui est la nôtre, la médiation devient alors le moyen par lequel nous pouvons passer « ‘du local au global, de la vie quotidienne au politique, de la communication interpersonnelle à celle de masse »’ (Quéré L., p34, 1982)159, de la peur individuelle à la compréhension collective, de l’aveuglement à une représentation claire d’une totalité sociale, en l’occurrence celle d’une société informationnelle. Cette dernière remarque nous permet alors d’approcher la notion de médiation à travers une dernière perspective : nous pourrions parler de méta-niveau de la médiation. Ceci complète le dispositif théorique nécessaire à l’analyse de notre objet.

Notes
156.

Ibidem.

157.

Notons que le tiers qui s’installe dans la relation de couple représente toujours l’humanité et est nécessairement social.

158.

Ibidem...totalité sociale qui n’est pas nécessairement la société globale.

159.

Quéré L., (1982), op. cit.