3.1.3. Les Inforoutes dans le rôle du concurrent ?

C’est après la tentative de sollicitation avortée231 que l’on a pu noter une évolution sensible des propos tenus à l’égard de cette gigantesque expérimentation, la principale consistant à dire que le projet Inforoutes bloquait certaines initiatives du Sud 232 du département. Dès lors, la position interne et affichée également auprès de certains interlocuteurs influents sur le département a été celle d’une relative neutralité, chaque participant répondant d’ailleurs au cours de nos entretiens233 à la question « comment s’inscrit l’action de Grimpi par rapport à l’expérimentation officielle des Inforoutes ? », qu’elle venait en parallèle, au mieux en complément.

Pour mieux comprendre cette position, qu’il s’agisse de celle de Grimpi ou du SIVU, précisons que l’un des instigateurs du groupe, chef d’entreprise dans le domaine de la prestation de services informatiques, avait répondu à l’appel d’offres lancé par les Inforoutes mais n’avait pas été retenu... Rappelons enfin que le projet Mesiane dont le groupe était porteur visait entre autres objectifs, la mise à disposition de moyens techniques et de services auprès des professionnels. Malheureusement, et ceci nous a été confié par le chef de projet, les Inforoutes étaient en train de réfléchir à la même époque à l’ouverture d’un volet destiné aux entreprises...

Ainsi, on peut noter dans les transcriptions d’entretiens et les compte rendus de réunions que les Inforoutes sont vues comme un projet public à financement lourd, sous-entendu par opposition au groupe qui ne fait pas partie du public et qui ne dispose que de peu de moyens (opposition implicite et aveu d’impuissance), que Grimpi pourrait être un observateur des projets mais se pose un conflit d’optique avec le groupe des Inforoutes (on se place sur un pied d’égalité, de groupe à groupe), ou enfin que les Inforoutes, c’est surtout la mise en place de tuyaux et de structures, étant entendu que Grimpi mise avant tout sur l’innovation sociale et apporte une valeur ajoutée que les Inforoutes sont loin d’offrir.

Les Inforoutes sont donc restées un référent permanent dans le discours des participants, qu’ils s’en démarquent, qu’ils les critiquent ou qu’ils les défient, posture manifestant bien que l’action menée s’inscrivait désormais plus dans le cadre de la concurrence et du rapport de force (bien qu’unilatéral) que de la bienveillance ou relative neutralité.

Notes
231.

Il n’y avait toujours pas de réponse au printemps 1998.

232.

Rappelons que cette initiative a été lancée à l’origine sur la partie nord du département et qu’il existe culturellement et historiquement une démarcation très nette entre les deux parties du département. Le Nord est industriel, le Sud plus agricole et aujourd’hui tourné vers les services.

233.

Nous rappelons que les entretiens ont été effectués entre mai et juin 1998.