3.2.1. L’Etat comme instance démocratiquement neutre

Grimpi est né de deux initiatives qui se sont croisées, leur point de rencontre et d’aboutissement étant la sous-préfecture, sollicitée dans les deux cas. Cette interpellation, au-delà du fait qu’elle met en cause un acteur local classé dans la catégorie des institutionnels n’est pas sans conséquence pour l’action entreprise.

‘« ce n’était pas la sous-préfecture en tant qu’institution comme ça aurait pu être n’importe quelle autre ». « On vit dans une structure, dans cette structure, qu’on l’appelle la nation ou la société, il y a des points de repère et l’Etat est un point de repère fort. ». « Grimpi s’est retrouvé citoyen républicain en recevant de l’Etat une caution qui était nécessaire ». « Je crois que l’Etat a amené une neutralité...c’est à cet Etat-là que nous nous sommes adressé ». « On a tenu à ce que nos réunions se passent à la sous-préfecture, parce que c’est un territoire neutre ». « Ca aurait été difficile de trouver un lieu de réunion aussi neutre et réunissant qu’une sous-préfecture ». ’

Cette démarche correspond donc à la volonté des deux instigateurs de départ, d’une part, de rendre à l’Etat (par l’intermédiaire de ses représentants) son rôle d’acteur sur le territoire, pour l’aider à tenir « sa mission de responsable d’une partie de l’aménagement du territoire » et de l’autre, de recevoir une caution située à mi-chemin entre la caution morale et la validation tacite. Dans cette perspective, être un groupe-citoyen, c’était donc mener une réflexion dans laquelle les pouvoirs publics soient directement intégrés, considérant qu’il était de leur ressort de participer à la réunion des différents acteurs de la vie locale et à la réduction des tensions qui auraient pu les diviser. C’est cette position qui a conduit la plupart des participants à reconnaître dans la présence du sous-préfet une sorte d’autorité qui valait référence pour les actions entreprises, surtout en rappelant le principe d’honnêteté intellectuelle au service de la collectivité associé normalement aux représentants de l’Etat. Nous verrons plus loin que cette caution morale officieuse était aussi un atout stratégique.

Au-delà du rôle tenu par le sous-préfet, soulignons également que la référence régulière à l’Etat et aux élus comme instance de compétences (comme c’était le cas pour les Inforoutes) reflète également un souci de compromis et une conscience aiguë du besoin de l’institution, qui seront tempérés par la section 3.2.3. Les membres de Grimpi constatent ainsi qu’ils leur faut des appuis, que certains acteurs publics sont incontournables, qu’ils doivent concilier leur rythme de progression avec celui des élus, et qu’il leur appartient d’aller au-devant des maires. Toute la contradiction de la démarche, qui sera reprise dans les deux sections suivantes, tient dans l’association de ces deux extraits issus de deux compte rendus de réunion différents : on est dans un domaine de l’ordre du politique (cause noble à laquelle il plaît de souscrire, du politique impliquant ici une référence à la cité et au collectif) et parallèlement, il faut trouver un mode de raisonnement non politique (la démarcation vis à vis d’un univers synonyme de rigidité et de lourdeur est implicite).